08. Écris des adieux. Entre deux personnes, entre une personne et un lieu, entre une personne et un animal, adieux temporaires (des au revoir, donc) ou définitifs.
Isha était affalée sur l'un des canapé de son salon, les yeux suivant les flocons qui tombaient derrière les vitres. L'hiver était sa saison préférée depuis qu'elle était arrivée en France quatre ans plus tôt. En Inde, d'où elle était originaire, il ne neigeait pas. Alors, en arrivant sur le continent européen, l'adolescente avait noté un nouvel objectif dans son carnet : essayer le ski alpin.
Le regard de la jeune indienne se posa sur sa jambe droite qui reposait sur un épais coussin, elle était enfermée dans un plâtre de la cheville jusqu'à mi-cuisse. C'est pour cette raison, au grand désespoir d'Isha, qu'elle ne pouvait que barrer au fur et à mesure les objectifs qu'elle s'était fixés et les rêves qu'elle espérait : pas parce qu'elle les avait accomplit. Mais, parce qu'elle ne pourrait jamais, désormais, que se contenter de les imaginer.
Sentant les larmes de rage piquer ses yeux, elle détourna le regard pour le poser sur la cheminée. Le mois de décembre et la neige s'étant abattu sur la France, le feu était allumé tout au long de la journée, répandant sa douce chaleur.
Les flammes dansaient dans l'âtre. Elles ondulaient, s'entremêlaient, semblaient se mouvoir pour former un ballet brûlant et magnifique. Et, les mains d'Isha se mirent à trembler alors qu'elles serraient un petit carnet orange.
La danse avait été l'unique raison pour laquelle Isha avait résisté en arrivant dans ce pays si différent du sien, alors qu'elle n'en comprenait ni la langue, ni les coutumes de ses habitants. Elle s'était accroché, avait tout fait pour s'intégrer - elle ne portait plus aucuns vêtements indiens, s'étant adapté au style plus occidental - et ne relâchait la pression qu'une fois en justaucorps et pointes.
Elle se réfugiait dedans à chaque fois que quelque chose n'allait pas, qu'elle était contrarié. C'était devenu sa raison de vivre. Et, entrer a l'Opéra de Paris son rêve le plus fou, celui qu'elle désirait ardemment et dans lequel elle mettait tout en œuvre pour y arriver. Isha vivait pour la danse.
Ce fut la première chose à laquelle elle pensa lorsqu'elle avait sentit l'impact de la voiture sur son corps frêle, juste avant que sa tête ne heurte l'asphalte et que la douleur aiguë dans sa jambe ne lui fasse perdre connaissance.
Une fois réveillée, à l'hôpital, elle n'avait posé qu'une seule question a l'infirmière venu la voir : Et la danse ? Elle ne lui avait jeté qu'un vague coup d'œil, s'était excusé en prétextant un patient difficile dans la chambre d'à côté et s'était éclipsée.
Mais, Isha n'était pas bête. Et, elle avait compris.
Elle avait compris que plus jamais elle n'enfilerait son justaucorps. Plus jamais elle ne se dresserait sur les pointes. Plus jamais elle n'inventerait de superbes chorégraphies avec Ila. Plus jamais elle ne râlerait car sa professeur de danse leur faisait faire trop d'exercices à la barre. Plus jamais elle ne se disputerait le premier rôle du spectacle de fin d'année avec Justine. Plus jamais elle ne pourrait faire de danse classique.
Plus jamais elle ne pourrait essayer d'accomplir son plus grand rêve.
Les os étaient trop fragiles, et l'impact de la voiture trop violent. Mais ce n'était rien à côté de la claque qu'avait reçu Isha quand le docteur avait dit qu'elle boiterait peut être à vie, et de la blessure béante qui s'était ouvert dans son cœur.
Ça faisait un mois qu'Isha était alitée, qu'elle prenait l'ascenseur plutôt que de monter les escaliers. Seulement un mois sur tout une vie.
Et, elle avait l'impression d'avoir perdu sa meilleure amie.
Les flammes dans la cheminée continuaient leur danse, après tout, elles, elles le pouvaient encore. Une larme glissa le long de la joue d'Isha pour atterrir sur la page du carnet qu'elle venait d'ouvrir, au moment même où elle barra définitivement les mots : entrer à l'Opéra de Paris.
Autant vous allez vous dire mais wtff elle est où la deuxième ''personne''. En vrai, je réfléchissais à ce que je pouvais bien faire comme adieux, genre entre qui et qui. Et puis, j'ai vu un gif sur We Heart It (ci-dessous) et hop une idée. Pas d'adieu entre deux êtres vivants, plutôt entre une adolescente et sa passion. Et voilà mon petit texte, n'hésitez pas à donner votre avis.
Oui je sais c'est encore pas bien joyeux mais cette fois j'y suis pour rien ahah.
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Les mots d'Octobre ❊ WRITOBER 2018
Short StoryLes mots s'envolent comme des feuilles. Projet de @writober COVER PAR @lvnaetic