Vérité

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Cela faisait longtemps qu'ils avaient laissé Bilbon seul dans la chambre. Thorin décida alors d'aller le voir afin de s'assurer qu'il allait bien. Il frappa à la porte. Aucune réponse. Il entrouvrit la porte, mais ne vit personne sur le lit. La panique s'empara alors de lui. Et s'ils étaient revenus le chercher ?
Il ouvrit complètement la porte avant d'entrer dans la chambre. Il fut immédiatement rassuré en découvrant le hobbit assis par terre dans un coin de la pièce, les genoux ramenés contre lui, la tête baissée. Le nain s'approcha doucement de lui. Bilbon ne leva même pas les yeux vers lui. Le paquet ouvert et la lettre dépliée gisaient à côté de lui.
Thorin s'assit à côté de lui, sans un mot. Le hobbit lui tendit alors la lettre, sans lui accorder un seul regard. Celui-ci la prit, hésitant, et comme Bilbon ne lui disait rien, il comprit qu'il devait la lire. Il commença alors sa lecture :

Mon cher Bilbon,

Si tu lis ceci, c'est que je ne suis probablement plus de ce monde. Et cela veut aussi dire que tu es en grand danger. Ton père ne voudrait sûrement pas que je t'écrive cette lettre, car nous avons juré de ne rien dire, ni à toi, ni à personne. Cependant je ne peux pas laisser mon fils dans l'ignorance. Tu es en danger Bilbon. Des personnes te veulent du mal. Tu ne peux pas rester dans la Comté. Nous avons juré de te protéger, et c'est ce que je vais faire. Je vais te révéler certaines choses que je n'aurais jamais dû te dire. Je suis tellement désolée mais tu as été adopté lorsque tu avais quatre ans. Tu avais été victime d'un sommeil appelé Murmë, qui a modifié tes souvenirs afin que tu ne te souviennes plus de ta vie antérieure.
On a aussi modifié ton apparence afin que tu ressembles à un hobbit.
Je ne peux cependant pas te révéler ta véritable identité, car si cette lettre tombait entre de mauvaises mains, cela pourrait avoir des conséquences désastreuses. Ce que je peux te dire, c'est qu'il ne faut surtout pas qu'ils te trouvent. Tu dois fuir. Trouve Gandalf, il pourra t'aider.
Il faut que tu saches, que tout ce que j'ai fait, je l'ai fait pour toi, pour te protéger. Je t'ai toujours considéré comme mon enfant. J'espère de tout mon cœur qu'il ne t'arriveras rien. De grands dangers t'attendent mais je sais que tu seras assez fort pour les surmonter.
Je me doute bien que tu dois me détester à présent. Je n'ose imaginer la peine que tu dois ressentir en cet instant. C'est pourquoi pour la surmonter j'ai mis dans ce paquet des souvenirs qui j'espère te rappelleront les bons moments que nous avons passé ensemble.
Je voudrais te dire que je suis désolée de t'avoir menti pendant tout ce temps.
Je t'aime mon fils, ne l'oublie jamais surtout.
Que les Valar me pardonnent et prennent soin de toi.

Ta mère

Thorin replia la lettre et jeta un coup d'œil à Bilbon. Il n'avait pas bougé d'un pouce. Ainsi, il n'était pas un simple hobbit. Qui sait, il avait peut-être des dons d'une puissance incroyable. En tout cas, cela n'avait pas vraiment l'air de l'enchanter... C'est normal après tout, découvrir que l'on a été adopté, que l'on nous a menti toute notre vie, et voir son monde s'écrouler autour de soi, ce n'est pas vraiment une partie de plaisir.
Et soudain il se rendit compte d'une chose : Bilbon lui faisait penser à son frère. Lui non plus n'était pas enchanté d'avoir des pouvoirs. Il n'avait rien demandé à personne. C'était juste un gamin un peu spécial qu'on avait envoyé pour éradiquer les ténèbres.
Il se souvenait du jour où il était venu le voir dans la salle des gardes. En principe il n'avait pas le droit d'être là, mais il se fichait pas mal des règles. Thorin lui avait alors demandé pourquoi il était venu, ce à quoi son frère lui avait répondu qu'il ne voulait pas devenir roi lorsqu'il serait plus grand, qu'il ne voulait plus avoir de pouvoirs, qu'il voulait juste être normal. Cela avait beaucoup touché le prince nain. Malheureusement, il n'avait rien pu faire pour lui. Son destin était déjà scellé.

Il revint brusquement à la réalité, et posa une main sur l'épaule du hobbit (si on pouvait encore l'appeler comme ça). Celui-ci le regarda enfin dans les yeux. Ceux du semi-homme étaient remplis de tristesse et de colère. Il devait se sentir trahi. Le nain lui offrit un regard de compassion et s'apprêta à lui dire qu'il était désolé. Mais à peine avait-il ouvert la bouche que Bilbon l'interrompit.

« Non, ne dis rien s'il te plaît. Je ne veux pas t'entendre dire que tu es désolé. »

Thorin referma donc la bouche et resta assis patiemment sans rien dire.
Un long silence s'installa entre eux. Le nain ne disait rien, il savait que Bilbon parlerait de lui-même, ou qu'il lui aurait déjà dit de sortir s'il l'avait voulu. Au bout d'un moment, le hobbit brisa enfin le silence d'une petite voix.

« Ça ne te gêne pas toi ?

- Quoi donc ?

- De ne pas savoir comment je m'appelle ni... à quoi je ressemble...
De ne même pas savoir ce que je
suis... »

Il leva à nouveau les yeux vers Thorin. Cette fois-ci ils étaient remplis de larmes. Il allait craquer d'un moment à l'autre. Thorin se déplaça pour se mettre face à lui. Du bout des doigts, il écarta les quelques mèches bouclées qui descendaient sur le visage du plus jeune, et essuya une larme qui perlait discrètement au coin de son œil. Il lui prit le menton et plongea son regard dans le sien.

« Écoute-moi bien. Peu importe ton nom, peu importe tes origines ou ton apparence. Tu seras toujours mon ami et jamais je ne t'abandonnerai. Je t'aiderai du mieux que je pourrai, je te le promets. Je sais que tu es fort, Bilbon. Il faut que tu sois courageux parce que ce ne sera pas facile. Et souviens toi, ce ne sont pas tes origines qui font de toi ce que tu es. Et surtout, il ne faut jamais que tu aies peur de ce que tu es. C'est bien compris ? »

Bilbon fit oui de la tête. Et il craqua. Thorin le serra alors contre lui, et il restèrent un long moment assis sur le sol, le jeune hobbit sanglotant dans les bras du roi nain.

Au bout d'un moment, ses pleurs se calmèrent peu à peu. Sa respiration se fit lente et régulière : il s'était endormi.
Thorin le souleva doucement et le ramena sur le lit. Puis il quitta discrètement la pièce.

The Silver Swan Le secret [en réécriture]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant