Chapitre XIII : Amour au balcon

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Une fois changée, j'eus besoin de prendre l'air frais. La nuit commençait à tomber et j'adorais le moment de la transition entre l'astre solaire nitide et l'apaisante planète Lune.
Je passa alors par le salon, ignorant superbement l'homme qui avait rejeté mes sentiments de façon très déroutante. Je pose la main sur la poignée de ma petite baie vitrée et l'enclenche. À peine ceci fait, la fraîcheur du soir me happe et je m'avance vers le vide, comme si rien ne me séparait du ciel. Je restais ainsi longtemps, admirant le lent coucher du soleil, la tête posée sur les bras. Je m'étais assise sur une des chaises de jardin en caoutchouc qui traînait par là et je m'afalais dessus comme une collégienne dans un cours inutile ou ennuyant. 

J'entendis enfin le déclic que j'attendais. Bien que je sois fâchée avec Stephen, j'attend des explications un peu plus poussées dans un dialogue adulte, et puis surtout, je l'aime.

« Magnifique n'est-ce pas...

- Tu parles de moi là ?

- Comment peux-tu arriver à faire de l'humour dans une situation pareille ? »

Je ne pus me retenir de relever l'hésitation de mon interlocuteur avant de me donner sa réponse.

« Comment peux-tu me mettre dans une situation pareille ? »

Mais c'est que j'ai de la répartie moi !

«... Je t'aime.

- Je t'aime.»

Je me tourne vers lui, me lève et il se rapproche tel une panthère vers moi.

« Et je meure d'envie de t'embrasser là, maintenant.

- Je meure d'envie que tu m'embrasse, là, maintenant. »

Il est si près que j'ai pu passer ma main sur son épaule avant de remonter dans sa nuque, puis dans sa chevelure. Il me regarde droit dans les yeux mais ne peut s'empêcher de loucher plus bas, sur mes lèvres.

« Mais je ne peux pas.. »

Pas question de me gâcher ce moment, de laisser passer cette occasion bénie. Et plus, ces arguments sont totalement factice et je n'en comprends pas le sens. Pourquoi s'inflige-t-il une vue d'éternel insensible ? À-t-il peur pour ces proches ? Qu'ils leur arrivent malheur à cause de sa profession ? Je dois lui demander..

« As-tu peur Stephen ?

-... Oui.

- Peur de perdre les gens que tu aimes ?

- Comment,.. comment le sais-tu ?

- J'ai peur moi aussi. Peur de te perdre.. »

Il me regarde comme il ne l'a jamais fait, je pourrais jurer qu'il me regarde comme un mari aimant regarde affectueusement sa femme tout les jours au réveil. Comme un Roméo éprit d'un amour transit pour sa Juliette mourante..

Alors, comme si c'était convenu d'un commun accord, on se pencha mutuellement l'un vers l'autre. Et bientôt, nos bouches dansèrent ensemble devant l'univers. Une danse endiablée accompagnée des gestes de nos mains pour nous rapprocher de plus en plus. Ma poitrine s'écrasant contre son torse encore recouvert de son costume défait, sa barbe chatouillant doucereusement mon visage. On ne se séparait jamais, voulant encore et toujours plus. Il tomba sur mon ancienne chaise et je m'asseila sur ses cuisses pour poursuivre notre contact féerique, j'halètais, traversée de spasmes incontrôlables, d'envies, de besoins nourissant d'avantage toute ma passion. Je le touchais le plus possible, avec la peur, la terreur qu'il disparaisse sans un bruit et lui faisait de même.

Quand nous dûmes reprendre notre souffle effréné, il me parla, la lèvre inférieure chevrotante.

« ... Je-e ne dois pa-as, je ne peux pas me p-permettre ça.

- Je suis tout à fait capable de me défendre seule contre de futurs ennemis.. C'est toi même qui l'a dit, je deviendrais plus forte que toi si je m'entraîne dur. Laisse-moi m'aquitter de cette tâche et te délester de cette idée idiote qui te fait te refuser tout relation..

- Je suis désolé de t'avoir donner tant d'espoir Jennie.. Je-je dois y aller ou je ne pourrais plus me contrôler... »

Je ne comprends rien. Il commence à me pousser gentiment mais je reste statique, incapable de faire le moindre mouvement, et incapable également d'empêcher les larmes ruisseler sur mon visage dépitée.

« Ne pleures pas je t'en prie.. Je-je suis un enfoiré ! Te faire ça à ton anniversaire..

- Je croyais que tu m'aimais ...

- MAIS JE T'AIME ! »

Il avait réussi à se dégager et je le regardais, impuissante, je voyais bien qu'il était au bord de la crise de nerfs et des larmes. Et qu'il s'est voulait affreusement.

« Pou-ourquoi ?..

- Tu es en danger avec moi, désolé Jennie..»

Et ma plus grande peur se produit, il disparut sous mes yeux larmoyant et les étoiles pleurèrent avec moi durant toute la nuit.

J'ai passé une nuit horrible, moi qui d'habitude ne peux veiller au delà de minuit ( si, si, je vous jure..), c'est à peine si j'ai cligné des yeux. Je n'ai pas pleuré, pire, j'ai eu et j'ai toujours cette sensation de vide immense en moi mais les larmes n'ont pas coulées. Qu'est-ce que je voudrais pleurer, pouvoir extérioriser mon malheur, me dire que ce n'était rien, que ce n'est qu'un connard de plus qui ne me mérite pas et aller me saouler avec Lena dans un bar en riant..

Mais non, je suis condamnée à rester, flottante dans les méandres de mon désespoir, et ce jusqu'à ce que je puisse mettre au clair les évènements récents.

Alors, bien que je n'en ai absolument pas l'envie, ni la force, je me décide de voir Stephen. Mais je n'ai vraiment pas assez d'énergie ( nuit blanche pour vous servir ) pour faire le déplacement. Je vais donc opter pour une solution qui relèverait du suicide ; me laisser tomber de mon balcon qui est, je précise, au neuvième étage.

Toujours dans la tenue avec laquelle j'ai embrassé mon bourreau, je rampe jusqu'à pouvoir respirer l'air frais du matin et me hisse, en position assise sur la rembarde. Je joue avec mes jambes pendantes dans le vide et les prends en photo avec mon téléphone pour l'envoyer à mon cher ami accompagné de ce message :

« Rattrape moi »

Quand je vois enfin qu'il a lu le message, je jette mon cellulaire qui se met à retentir dans mon salon et me concentre seulement sur le bruit que fait mon sang, pulsant dans mes tempes. Je suis heureuse d'être enfin préoccupée par quelque chose, l'adrénaline me fait délirer et je ris alors que je les lois de la physique s'exercer sur mon corps.

Et la fatigue, l'adrénaline, l'angoisse, le stress, l'euphorie et le désespoir me font perdre connaissance pendant ma chute.

Mon docteur ce hérosOù les histoires vivent. Découvrez maintenant