Une autre vie : Tome 1

Chapitre I - Le voyage

« - Allez Lara, debout ! ».

Avoir des amis n'est pas toujours une chance incroyable comme on pourrait le croire. Eléa était venue me chercher pour disait-elle « visiter ce magnifique château et cette architecture d'un autre temps ».

« - Eléa, tu abuses ! Je n'ai vraiment pas envie de me lever ce matin.

- C'est trop tard, tu m'as promis de venir avec moi. Tu sais que si nous arrivons en retard, je t'en tiendrai pour personnellement responsable.

- Oui, je sais surtout pourquoi, toi, tu veux y aller !

- Ne fait pas ta rabat-joie, lèves-toi, ça va être top ! »

La véritable raison qui poussait Eléa à me lever à six heures aujourd'hui mesurait en réalité 1m90 et se prénommait Joshua. Elle était folle de lui et le suivait partout. Il était élève en dernière année d'architecture; alors pour lui la visite d'un château vieux comme le monde, c'était mieux que le Graal.

Je me levai donc sans trop de conviction pour faire plaisir à ma meilleure amie. Même si elle avait un goût trop prononcé pour les hommes et les vêtements flashy, c'était l'une des personnes que j'aimais le plus dans ce monde. J'ai toujours été plutôt renfermée. Mon frère, Julian, a longtemps été mon seul ami. Il faut dire qu'avec la disparition de maman lorsque j'avais quatre ans, mon père et mon frère étaient très protecteurs. Je n'aime pas beaucoup repenser à tout cela, ça me rend encore triste après toutes ces années.

La voix d'Eléa me sortit de mes rêveries : « - Enfile vite tes vêtements, le car part dans quinze minutes ! ».

Je m'exécutais, j'enfilais donc un jean, un pull en laine et mon manteau bleu marine, une paire de chaussure et essayais tan bien que mal de donner un sens à cette chevelure brune qui partait dans tous les sens. J'eus à peine le temps d'attraper un croissant qui trainait sur la table de la petite chambre que nous avions sur le campus, que nous avions déjà filé en direction du bus.

Arrivé au lieu de rencontre, j'étais un peu perplexe. Quel idée de visiter un château au mois de novembre. On allait certainement geler dans ses vieilles pierres. Il faut dire que je ne suis pas aussi enthousiaste que ma chère amie. Elle a aussi pris une spécialisation Architecture dans son cursus, on se demande pourquoi ? Moi, je suis des cours de sociologie et de psychologie. J'adore analyser les situations, essayer de comprendre ce que les gens ressentent et trouver des solutions pour aider chacun.

Mon père me dit souvent que j'ai trop d'empathie et que je suis trop gentille avec tout le monde.

Les psychologues que j'ai rencontré, après la disparition de ma mère,  m'ont surtout diagnostiqués un sérieux syndrome du « sauveur », c'est un besoin irrépressible de sauver tout ce qui m'entoure et j'ai aussi une légère tendance à tout contrôler.

Peut-être que c'était dû au fait que je n'avais pas reçu d'amour maternel.

« - Salut, Lara ! Toujours aussi jolie ! »

Quel adorable baratineur cet Aaron. Avec lui, nous formions un trio de choc. Il suivait le même cursus que moi. Nous avions sympathisé les premières semaines car nous étions aussi solitaires l'un que l'autre donc le professeur nous avait placé côte- à-côte.

« Salut, Aaron ! Je vois que tu es d'une forme olympique ce matin !

- C'est que je suis tellement enthousiaste de visiter de vieilles ruines en compagnie de mes deux meilleures amies !

- Je suis contente que tu dises ça, intervint Eléa. Parce que la visite est prévue en deux temps. L'extérieur et ces alentours ce matin et l'intérieur cette après-midi.

- Eléa, Eléa, que ferions de nos journées sans toi, lui répondit Aaron.

- Allez, on monte dans le bus et on arrête les chamailleries les enfants, dis-je en riant. »

Nous nous regardâmes un instant et nous partîmes tous les 3 trois dans un énorme fou rire.

La visite des extérieurs se déroulait de façon très ordonnée et notre guide avait une simplicité à expliquer les choses, s'en était presque déconcertant. J'analysais chacun de ces gestes et ces paroles ; il devait travailler ici depuis bien longtemps. Il avait une anecdote pour chacun des recoins du château ou de ces jardins.

Je dois avouer que bien que je n'étais pas très contente à l'idée de venir, cette visite était passionnante.

« - On raconte que dans ces jardins, Un roi fut une grande déclaration d'amour à une femme qui venait d'une autre contrée et d'un autre temps. » expliqua-t-il.

Étrange, une autre contrée et un autre temps, comment cela serait-il possible. Je n'y prêtais pas plus attention. Je regardais autour de moi, tous les élèves l'écoutaient attentivement. Eléa était collée à Joshua qui lui expliquait quels matériaux et quelles techniques, ils avaient utilisés pour construire tout cela. Aaron était plongé dans son cahier de croquis. Il adorait dessiner tout ce qui l'entourait.

L'après-midi, nous sommes enfin entrés dans ce fameux château. L'intérieur n'avait rien à envié au reste. Cet édifice était vraiment magnifique. Chaque pièce avait été conçue pour qu'on  puisse y accéder très facilement. Ils devaient pouvoir se déplacer vite en ces temps là pour échapper à leurs ennemis.

Je marchais de droite à gauche en admirant les tapisseries et les peintures. L'une d'elle attira mon attention. C'était le portait d'une femme qui semblait me fixer. Ce qui était encore plus invraisemblable, c'est qu'on aurait dit qu'elle me ressemblait.

Tout à coup, le guide s'approcha de moi.

« - Fascinant toutes ces pièces si bien ajustées, on dirait qu'elles s'emboitent les unes dans les autres.

- Je suis désolée, pour être tout à fait franche, je n'ai pas vraiment beaucoup de notions dans l'architecture, répondis-je. Mais ce château est vraiment magnifique.

- C'est vrai ! Il a beaucoup d'histoires cachées que seules certaines personnes sont aptes à découvrir.

- A oui, que voulez-vous dire par là ?

- Simplement que vous avez l'air d'une personne qui s'intéresse vraiment à ce qui l'entoure. Il est rare de nos jours de rencontrer des personnes comme vous. »

Ce guide commençait vraiment à me faire peur. Il semblait me connaitre mais ce n'était pas le cas. En plus, il parlait d'une façon très énigmatique.

« - Je devrais certainement rejoindre le groupe.

- N'oubliez pas mademoiselle, que seule votre cœur vous mènera là ou vous voulez vraiment aller. L'époque dans laquelle vous évoluez n'est pas importante, ce qui compte c'est ce que vous pouvez accomplir si vous vous en donner les moyens. »

Il disparut derrière une porte qui se tenait à ma droite. Je ne l'avais même pas remarqué avant qu'il ne s'y engouffre. Je reste une minute abasourdie par son discours. Il était vraiment étrange.

Lorsque je réalisai que j'avais perdu le reste du groupe, je m'empressai de passer la porte pour essayer de les rattraper. A ce moment, j'eus une drôle de sensation. Ma tête se mit à tourner, je perdis connaissance durant quelques instants.

Lorsque je revins à moi, je réalisai que je m'étais évanouie au beau milieu de ce château. Je ne sais pas comment je m'étais retrouvé là mais j'étais au milieu d'une petite salle qui m'étais totalement inconnue. Je devais vite me relever et rattraper le groupe avant qu'il ne parte sans moi. Mais combien de temps étais-je restée inconsciente ? Personne n'avait remarqué mon absence ?

« - Tu comptes rester par terre encore longtemps ? » me dit une voix que je ne connaissais pas.

J'essayais de regagner mes esprits, lorsque je réalisai qu'une femme se tenait devant moi et me fixait d'un air inquiet.

« - Ne t'inquiètes pas, ça m'a fait ça moi aussi quand je me suis retrouvée ici, l'année dernière. »

Mais de quoi parlait-elle, et surtout pourquoi portait-elle des vêtements d'époque.