Hybride

Chapitre 38

On continue notre avancée dans ce qui me paraît actuellement être l'endroit le plus sale du monde. Parce que oui, dans les films, quand les beaux acteurs rampent dans les bouches d'aération, t'as juste envie de les rejoindre pour mater leur joli fessier mais dans la réalité je ne sais pas si vous imaginez à quel point la poussière est omniprésente. Je ne préfère pas regarder la couleur de mes mains parce que je vais faire une crise cardiaque. Sans parler de mes vêtements qui doivent être dans un état lamentable. Je ne suis pas une maniaque du ménage ou quelque chose comme ça mais il y a une limite à la saleté. Bref, on continue d'avancer tranquillement. De toute façon, on a le temps, d'après le plan on doit attendre de voir si Aaron se réveille dans l'heure sinon ça va être la panique. Ça fait une quinzaine de minutes qu'ils l'ont attrapé donc ils ne devraient pas tarder à arriver ici. À partir de là, on aura environ quarante minutes pour le trouver ainsi que Maëlle. Je suis devant, et Kelly me suit de près. Je me dirige selon ce que j'entends mais j'ai l'impression que nous ne sommes pas au bon étage. Il n'y a que des bureaux, rien d'étrange ou qui laisserait penser qu'il se passe des choses pas nettes dans ce bâtiment. On va devoir descendre par l'intérieur mais heureusement pour nous, le bâtiment ne semble pas très rempli à cet étage. Les bouches d'aération finissent par nous mener à une petite pièce qui sert d'entrepôt. On descend -enfin- du conduit tout en essayant d'enlever toute la poussière collée à nos vêtements. On reste attentives au moindre bruit mais personne ne semble se diriger vers nous. C'est très étrange, je suppose qu'il y a des étages au-dessus et en-dessous de nous mais il n'y a vraiment personne au rez-de-chaussée. J'ouvre précautionneusement la porte et passe ma tête dans l'entrebâillement de celle-ci. Je tombe sur un couloir plongé dans le noir. Malgré la pénombre je vois clairement d'autres portes et des escaliers au fond de l'allée. Je fais signe à Kelly pour qu'elle me suive et on s'avance prudemment. Le parquet siffle, c'est mauvais pour nous. C'était un moyen autrefois utilisé dans les châteaux d'Asie de l'Est pour entendre si des personnes mal intentionnées voulaient s'introduire dans le bâtiment. C'est très peu utilisé en Europe car méconnu, mais pour les loups et leur ouïe hyper sensible, c'est particulièrement efficace. Et croyez-moi, on peut faire tous les efforts du monde pour marcher doucement que ce parquet sifflera constamment. Alors, au lieu de prendre notre temps, on s'est mises à marcher le plus vite possible sans alerter les autres personnes de l'étage. L'escalier n'est plus qu'à quelques mètres devant nous quand j'entends des voix venir de notre gauche. Sans perdre une minute, j'attrape Kelly par le bras et l'attire dans une pièce au hasard, m'assurant tout de même qu'il n'y ait personne dedans. C'est un bureau comme les autres, éclairé par une petite fenêtre d'où l'on peut apercevoir la lune. Elle est étonnamment grosse ce soir, ce doit être bientôt la pleine lune c'est sans doute ça que le père d'Aaron avait à régler avant de nous rejoindre. Pour une meute c'est important de bien se préparer surtout quand il y a des jeunes transformés comme Kelly par exemple. Je délaisse ma contemplation de la lune pour me concentrer sur les bruits autour de nous. Des pas, trois personnes, deux hommes et une femme. Ils parlent, l'un d'eux demande aux deux autres s'ils ont entendu les sifflements du parquet et ils lui répondent que non. Il a l'air découragé par le calme de ses acolytes et souffle bruyamment avant de faire demi-tour suivi par les deux autres. Kelly et moi restons cachées le temps d'être sûres qu'ils soient partis. On se décide à sortir tout en courant, plus ou moins discrètement vers les escaliers. De toute façon, qu'on prenne notre temps ou pas, le parquet fera du bruit, alors autant se dépêcher. Et puis le temps passe vite et d'après Kelly, l'arrivée d'Aaron est pour bientôt. Autrement dit, il faut qu'on trouve Maëlle, et dès maintenant. Les escaliers sont sombres comme le reste du bâtiment mais on ne prend pas le temps d'admirer l'architecture. On arrive vite en bas faisant tout de même attention pour ne pas être découvertes. Le sous-sol est complètement différent de l'étage. Les bureaux en haut était assez chaleureux, avec leurs tables en bois massif, les petites bibliothèques et les fenêtres donnant sur l'extérieur. En bas, il n'y a aucune lumière naturelle, les murs sont en pierre taillée, donnant l'impression d'être dans un cachot. Ce qui n'est peut-être pas si faux que ça. Je frissonne mais continue d'avancer, il fait relativement froid pour une raison que j'ignore. J'entends un bon nombre de voix ce qui fait battre mon cœur plus vite. Ma respiration est rapide, le stress me prend et je manque de sauter au plafond quand Kelly pose sa main sur mon bras en signe de réconfort. Elle a raison, je suis trop tendue mais je suppose qu'elle n'entend pas toutes les voix et ne se doute pas du nombre de personnes qui nous entourent. Chaque porte, chaque faille, laisse échapper le bruit des conversations qui se tiennent à l'intérieur. Pourquoi sommes-nous descendues déjà ? Moi qui trouvais bizarre qu'il n'y ait personne en haut, je comprends pourquoi. J'entends un homme qui parle plus fort que les autres, je me concentre pour entendre ce qu'il dit.