Perdue

Chapitre 10

      Quand Kévin entra le lendemain matin dans la chambre de Kristal, les éléments du plateau tintait sous les tremblements incontrôlables de ses mains. Et c'est là qu'il la vit : recroquevillée dans un coin sombre de la pièce évitant son regard, la tête dans ses jambes.

« Je... je t'ai apporté ton repas. Dit-il en le lui posant sur la table de nuit juste à côté d'elle. »

Quand elle leva la tête pour le regarder, il vit ses yeux rouges gonflés ainsi que les cernes et les traînées salées laissées par ses nombreux pleurs. Elle avait l'air tellement fatiguée, abattue.

« Comment ai-je pu la laisser dans cet état en n'écoutant ni ses hurlements déchirants ni le plus petit de ses sanglots. Quel idiot ! S'insulta-t-il intérieurement. J'aurais du être là, comme l'a si bien dit Alexander. J'aurais du la soutenir, la consoler. Maintenant plus question de la laisser surmonter cette épreuve seule et de fuir ! »
Il prit une grande inspiration :

« Kristal, je... commença-t-il hésitant sur les mots à employer.

Ne voyant aucune réaction de sa part, même pas un signe qui prouvait qu'elle l'écoutait il lâcha finalement :

-Je suis désolé. Vraiment. Pour tout. 》

Il tourna le talons et sortit attendre devant la porte qu'elle eut finit son repas.

         Une demi-heure plus tard, il prit le plateau qu'elle avait déposé pile devant la porte et referma derrière lui après un regard désolé qu'elle ne vit pas.

Il marcha vers les cuisines en ruminant des pensées noires. Il ne l'avait pas fait. Son courage lui avait encore une fois fait défaut. C'était encore trop tôt. Quand elle ira mieux. Ça ne devrait plus tarder maintenant.

« Hé ! Hé, hé ! Cria Alexander à côté de lui le tirant de ses sombres pensées. Alors, comment ça s'est passé ? Pas très bien apparemment, dit-il en voyant la tête qu'il tirait.

-Je... je ne lui ai pas dit.

Un instant éberlué, Alexander dit dans un sourire mi résigné :

-C'est pas grave. Ce sera pour la prochaine fois. Comment l'as-tu trouvée ?

-Ben... pas très bien à vrai dire. Elle avait déposé le plateau devant la porte comme si elle ne voulait plus me voir.

-Hum... fit Alexander dubitatif. Tu n'est pas resté dans la pièce durant son repas ?

-Je n'en ai pas eu la force. Bon je vais rapporter ça à la cuisine, fit-il pour éviter son regard et d'autres questions.

-Ouais. »

Kévin était déjà à la fin du couloir quand Alexander le rattrapa haletant suivi de Pierre pas un poil essoufflé.

« As-tu vérifié le contenu du plateau ? Cria-t-il.

-Ben... non. Fit Kévin surpris.

-Vérifie !

Kévin fouilla le plateau des yeux et remarqua :

-Il manque... le couteau. Fit-il choqué.

-Et merde ! » Hurla Alexander en repartant en sens inverse plus vite que jamais.

Kévin, réalisant enfin ce qu'il se passait, laissa tomber le plateau. L'assiette et le verre se brisèrent au contact du sol dans un vacarme assourdissant. Il courut aussi vite qu'il le pouvait pour rejoindre ses compagnons à la cellule de Kristal.

   
         Quand il passa la porte, il s'arrêta net devant la scène qui se déroulait devant lui. Pierre et Alexander étaient mains en avant, avançant avec précaution vers Kristal :

« Kristal réfléchis donc avant de faire quelque chose que tu regretterais ».

C'est à ce moment que Kévin vit le fameux couteau manquant, entre les mains de Kristal, qui, lançant un regard de défi à Alexander et Pierre pour les dissuader de faire un pas de plus en sa direction, se le planta d'une main sûre dans l'estomac.

Kévin tressaillit, il sentait ses jambes trembler sous lui, menaçant de céder à tout instant. Alexander profita de l'instant de faiblesse de Kristal pour avancer encore une dizaines de centimètres.

Mais celle-ci, aussi rapide que le vent, retira d'un coup sec l'arme de son ventre dans un grand giclement de sang et en plaça la pointe à l'emplacement du cœur.

« Approchez encore et vous verrez ! Cria-t-elle.

-De toutes façons, qu'on intervienne ou pas tu compte en finir. Cingla Alexander. Alors autant tenter le tout pour le tout !

-Qu'est-ce que ça peut te faire si je quitte ce monde, je ne suis qu'une inconnue pour toi !

-C'est faux. Et même si c'était le cas, comme je l'ai déjà dit à Kévin, je ne te laisserais pas mourir. »

Elle appuya et la pointe du couteau qui s'enfonça un peu dans la chair laissant dégouliner un filet de sang en plus de la flaque qui commençait à s'étendre à ses pieds de sa blessure au ventre.

Sa main tremblait mais son regard était déterminé.

« Plus rien ne l'arrêtera » pensa Kévin apeuré en pensant au dénouement de cette situation désastreuse.

Quand tout à coup il avança d'une grande enjambée avant de tomber à genoux juste devant ses compagnons.

« Non ! Arrête! Je... Tu est bien plus qu'une inconnue ou qu'une amie à mes yeux ! J'ai compris que les sentiments qui m'animent ne sont pas que de l'amitié. Je... je... je t'aime Kristal. Je n'aurais jamais cru pouvoir vivre ça un jour et encore moins pouvoir l'avouer à celle qui ferait battre mon cœur. Alors je t'en supplie... pour moi... et pour toi... arrête. La supplia-t-il les larmes débordant de ses yeux. »

Kristal, éberluée, arrêta son geste. L'arme blanche s'éloigna doucement de son organe vital. Tout à coup l'étonnement sur son visage laissa place à la douleur. Ses yeux se révulsèrent, sa main lâcha le couteau qui retomba en tintant et elle tituba avant de tomber vers l'arrière.

Ce fut comme si le temps s'arrêtait. Avant que Kristal se fracasse le crâne par terre, Alexander, réagissant au quart de tour, sauta sur ses jambes au moment où ses yeux se fermèrent et la rattrapa de justesse avant que sa tête ne touche le sol : d'une main il attrapa la nuque et de l'autre la taille. C'était fini.