Je me réveille subitement dans un des lits de l'infirmerie.
Que s'est-il passé ?Ma mémoire est floue et peine à revenir, perdue dans des brumes plus ou moins épaisses. J'essaye de reconstituer le fil de ma journée et des dernières heures. Sans succès. Rien ne me revient.
Je sais que je suis au lycée, que je m'appelle Oswald et que ce n'est pas normal que je sois ici. Ça, au moins, c'est clair dans mon esprit. Je tente de tendre mes bras vers le plafond de la pièce. J'y parviens assez difficilement. J'ai l'impression qu'ils pèsent des dizaines de kilos chacun. À leur extrémité, je remarque deux extensions avec cinq petites ramifications. Je m'entends murmurer " C'est rigolo ces trucs".
Si l'on me regardait à ce moment, il est sur que je provoquerais l'hilarité générale. Moi, 18 ans, vient de me rendre compte que nous avons des mains au bout des bras. Formidaaaable ...
Ce qui l'est moins, c'est que mes mains à moi sont couvertes d'une substance que je ne saurais pas identifier, probablement sèche au vu de l'effet légèrement étirant qu'elle exerce sur ma peau et de couleur rouge foncé voir brune par endroits. Dans quoi est ce que j'ai mis les mains ? Ça n'est pas très sérieux tout ça. Je rapproche, tant bien que mal, mes mains de mon visage pour essayer de savoir dans quoi j'ai bien pu tremper. Je sens prudemment mes doigts. L'odeur est agressive, ferrugineuse, écœurante. Je connais cette odeur. Je m'entends de nouveau murmurer :
"Du sang"
Immédiatement, comme un coup de poing a l'estomac, des souvenirs me reviennent : le gymnase, le chaos dans le bureau d'EPS, le prof de gym complètement perdu, son hémorragie, son sang sur le boîtier du chronomètre. Ça me revient maintenant. J'ai finis par perdre connaissance. Alors le sang que j'aurais sur les mains ? Ah... AH ! Quelle horreur !! C'est le sang de mon prof de gym sur MES mains ? J'espère de tout cœur que non. Parce que ce ne sont pas de simples éclaboussures, j'ai bien les trois quart de mes mimines imbibées. Ça me donne une profonde nausée. De l'eau. Il me faut de l'eau. J'ai besoin de me laver, de faire disparaître tout ce sang.
Je me lève précipitamment et cherche, dans l'infirmerie, un point d'eau ou quelque chose du genre, qui me permettrait de me débarrasser de cet immondice écarlate. Dans l'annexe de l'infirmerie, on trouve des toilettes et un large lavabo duquel je m'empresse de faire sortir une eau chaude et abondante. Le sang n'est pas tout a fait sec et ce qui l'est ne doit pas l'être depuis longtemps. Le tout s'en va avec une certaine facilité dont je ne suis pas mécontent. Une fois que je suis sûr que tout est partis, je prends bien soin de m'essuyer avec les quelques linges qui sont empilés a côté de la vasque. Ça va mieux maintenant que j'ai les mains propres. Par contre je sens un léger mal de tête poindre a l'arrière de mon crâne. Je suppose qu'avec toutes ces émotions fortes, une aspirine serait la bienvenue ... Je me dis que je pourrais en demander une a l'infirmière. Tiens, d'ailleurs ... où est-elle ?
Je ne l'avais pas remarqué jusqu'à présent, trop concentré sur le sang qui couvrait mes mains, mais l'infirmière n'est nulle part dans la pièce. Ce n'est pas courant de laisser un malade évanoui tout seul, surtout dans l'état dans lequel il est arrivé ... avec tellement de sang sur les mains qu'il aurait très bien pu tuer quelqu'un.
Ce n'est pas normal.
Soit il lui est arrivé quelque chose pour qu'elle ne soit pas présente à son poste, soit elle est allé prévenir la police qu'un élève avait probablement tué quelqu'un. Ah ça ! Non alors ! Je ne suis pas un assassin ! Si vraiment la police est prévenue, il ne faut pas que je reste ici. Je ne sais plus vraiment ce qu'il se passe exactement. J'émet des hypothèses à tout va, un peu extravagantes mais elles me semblent tellement vrais ou tellement logiques ... Je me demande un moment si je ne suis pas en train de rêver ... Revenu dans la pièce principale de l'infirmerie, je balaye l'espace du regard.
Je vois le lit sur lequel j'étais allongé quelques minutes plus tôt, l'armoire à pharmacie entrouverte a l'intérieur de laquelle j'aperçois différents médicaments classiques dans une infirmerie, du mercurochrome, des pansements et autres bandages. Un peu plus sur la droite, il y a le bureau de l'infirmière. Son nom est écrit en lettres d'or sur un petit panneau couleur bronze, l'ensemble du meuble est rangé au millimètre et un petit réveil extravagant vient compléter l'ensemble. Rien de potentiellement intéressant. En dépassant le bureau pour me diriger vers la porte, je remarque un chronomètre en plastique noir, tout ce qu'il y a de plus basique. Je le remarque parce qu'il est posé de travers, en équilibre sur une pile de dossier, eux mêmes alignés dans leur empilement avec une précision rarement atteinte. Ça fait tâche sur ce bureau si bien rangé. Je suppose qu'elle l'a posé là précipitamment et qu'elle n'a pas eut le temps de lui faire acquérir la même rigueur qu'aux autres objets qui trônent dessus.
Je ne m'attarde pas plus et me dirige rapidement vers la sortie, avant qu'éventuellement la police ne vienne me cueillir pour un crime ou une exaction dont je n'ai absolument pas connaissance. Alors que j'ai la poignée dans les mains et que je m'apprête à sortir, je m'arrête net. Je n'ai pas un chronomètre qui traine quelque part dans mes souvenirs ?
Je fais volte-face. Le chronomètre du prof de gym. Comment se fait-il qu'il se trouve là ? Est-ce que je ne l'avait pas entre les mains quand je suis tombé dans les pommes ? Je regarde un instant cet bête compteur de temps sans comprendre. L'explication la plus logique qui me vient à l'esprit, c'est d'ailleurs la seule, est que j'ai dû être amené à l'infirmerie, le chrono toujours dans la main et que l'infirmière a dû me l'enlever quand je suis arrivé ici. Mais ce n'est pas vraiment le moment de théoriser là-dessus. Je vais avoir des problèmes autrement plus grave si je ne me carapate pas d'ici au plus vite.
J'actionne la poignée de la porte et dans ce même mouvement, un flash envahit la mémoire.
" Promet le. Promet que tu garderas le Temps."
Tout s'estompe. Je suis toujours à l'infirmerie, la poignée de la porte dans les mains. Cette dernière grince d'ailleurs de mécontentement, l'air de dire " tu te décides à sortir où je vais devoir faire des heures supp' ?". Je suis désolé pour cette chère poignée, mais je l'abandonne pour filer jusqu'au bureau de l'infirmière. Je m'empare du chronomètre, en me rappelant subitement qu'il était, il n'y a pas si longtemps, couvert de sang. J'ai un réflexe de dégoût et je l'examine furieusement sous tous les angles, en le tenant entre le pouce et l'index, a la recherche de la moindre trace d'hémoglobine. Mais rien. Rien du tout. Si ce chrono à été sanglant fût un temps, il n'en laisse rien paraître.
En revanche, mon examen me révèle une inscription, faîte avec une incroyable précision. Il est ainsi inscrit : "Temps". C'est donc de ce "Temps" là dont parlait mon prof de gym ? C'est ça le bien précieux qu'il faut conserver à tout prix ? Je suis un peu perdu et vexé. Est ce que j'ai une tête de gardien de chrono, moi ? Déjà gardien de chien c'est tout juste, mais alors chrono-sitter... Je jette un nouveau coup d'oeil au compte-temps. Je ne l'ai d'abord pas remarqué, mais les secondes s'égrènent sur l'affichage numérique. Lentement, mais sûrement. Il reste une dizaine de minutes avant que le minuteur ne tombe à zéro. Qu'est ce que ça peut bien vouloir dire ?
Je fais à nouveau volte-face en direction de la porte du couloir. Il me semble avoir entendu quelque chose. Un peu rassuré par l'absence de sang sur le boîtier, je le range lentement le chronomètre dans la poche de ma veste de sport, a l'affût du moindre bruit. Mais je n'entends plus rien. Je pense que j'ai déjà assez traîner ici. Je chercherai plus tard le pourquoi du comment de tout ce cirque. La première des choses à faire, c'est sortir d'ici.
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[REWRITE] Oswald - La Confrérie des changeurs de Temps
Historical FictionJ'ai fait une bêtise. Je m'appelle Oswald Mcmorlann. Ça n'est pas ça la plus grosse boulette de mon existence. J'ai, ne me demandez pas comment, changer accidentellement le cours du Temps, tout simplement. Embarqué, bien malgré moi dans une quête po...