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Il faisait presque aussi froid dans son appartement que dans les rues. Baekhyun conserva son manteau sur ses épaules et ses mitaines aux mains.

Soudain, la pièce fut plongée dans l'obscurité. Baekhyun grimpa sur son lit et regarda par la verrière. Le quartier tout entier était dans le noir. Les coupures de courant fréquentes duraient souvent jusqu'au petit matin. Baekhyun se mit à la recherche d'une bougie ; à côté du lavabo, un petit monticule de cire brune lui rappela qu'il avait utilisé la dernière la semaine précédente.

Il tenta en vain d'en rallumer la courte mèche, la flamme vacilla, crépita et finit par s'éteindre.

Ce soir-là, Baekhyun voulait écrire, poser sur le papier des notes d'eau salée. Ce soir-là, plongé dans la nuit noire, Baekhyun ne trouverait pas le sommeil. Il avança alors jusqu'à sa porte, hésita et, soupirant, se résigna à traverser le palier pour demander une fois de plus de l'aide à son voisin.

Chanyeol lui ouvrit sa porte, une bougie à la main. Il portait un bas de pyjama en coton et un pull à col roulé. La lueur de la bougie donnait une drôle de teinte à son visage.

— Je vous attendais, monsieur Byun.

— Vous m'attendiez ? répondit-il, surpris.

— Depuis que le courant a été coupé. Tenez, voilà ce que vous alliez me demander ! dit-il en sortant une bougie de sa poche. C'est bien ce que vous êtes venu chercher, n'est-ce pas ?

— Je suis désolé, dit-il en baissant la tête, je vais vraiment penser à en racheter.

— Je n'y crois plus beaucoup, monsieur.

— Vous pouvez m'appeler Baekhyun, vous savez.

— Bonne nuit, monsieur Baekhyun.

Chanyeol referma sa porte, Baekhyun rentra chez lui. Mais, quelques instants plus tard, Baekhyun entendit frapper. Il ouvrit, Chanyeol se tenait devant lui, une boîte d'allumettes à la main.

— Je suppose que cela aussi vous manquait ? Les bougies sont bien plus utiles allumées. Ne me regardez pas comme ça, je ne suis pas devin. La dernière fois, vous n'aviez pas non plus d'allumettes et, comme je voudrais vraiment me coucher, j'ai préféré prendre les devants.

Baekhyun se garda bien d'avouer à son voisin qu'il avait craqué sa dernière allumette pour se préparer une tisane. Chanyeol alluma la mèche et sembla satisfait quand la flamme mordit la cire.

— J'ai dit quelque chose qui vous a fâché ? demanda Chanyeol.

— Pourquoi ça ? répondit Baekhyun.

— Vous avez l'air bien sombre tout à coup.

— Nous sommes dans la pénombre, monsieur Park.

— Si je dois vous appeler Baekhyun, il faudra aussi m'appeler par mon prénom, Chanyeol.

— Très bien, je vous appellerai Chanyeol, répliqua Baekhyun en souriant à son voisin.

— Mais, quoi que vous en disiez, vous avez quand même l'air contrarié.

— Je suis juste fatigué.

— Alors, je vous laisse. Bonne nuit, monsieur Baekhyun.

— Bonne nuit, monsieur Chanyeol.

Dimanche 24 décembre 1950

Baekhyun sortit faire quelques courses. Il s'arrêta chez l'épicier, décidé à s'acheter tout ce qui serait nécessaire pour un vrai repas de fête. Il choisit trois beaux œufs et oublia sa résolution de faire des économies devant deux tranches de bacon. Un peu plus loin, un boulanger proposait de merveilleux gâteaux, il s'offrit une brioche aux fruits confits et un petit pot de miel.

Ce soir, il dînerait dans son lit en compagnie d'un bon livre. Une longue nuit et, le lendemain, il aurait retrouvé sa joie de vivre. Quand il manquait de sommeil, Baekhyun était d'humeur maussade, et il avait passé bien trop de temps à la table de son atelier ces dernières semaines. Un bouquet de roses disposé dans la vitrine du fleuriste attira son attention. Ce n'était pas très raisonnable, mais, après tout, c'était Noël. Et puis, une fois séchées, il en utiliserait les pétales. Il poursuivit sa promenade et fit une nouvelle halte devant la parfumerie. Un panneau « fermé » pendait à la poignée de la porte du magasin. Baekhyun approcha son visage de la vitrine et reconnu parmi les flacons l'une de ses créations. Il la salua, comme on salue un proche, et reprit sa course.

De retour chez lui, il rangea ses achats, mit les fleurs dans un vase et décida d'aller se promener au parc. Il croisa son voisin au bas des escaliers, lui aussi semblait revenir du marché.

— Noël, que voulez-vous... ! dit-il un peu gêné devant l'abondance de son sac.

— Noël, en effet, répondit Baekhyun. Vous recevez ce soir ? demanda-t-il.

— Grand Dieu, non ! J'ai horreur des festivités dit-il en chuchotant, conscient de l'indécence de sa confidence.

— Vous aussi ?

— Et ne me parlez pas du jour de l'an, je crois que c'est encore pire ! Comment décider à l'avance de ce qui sera ou non un jour de fête ? Qui peut savoir avant de se lever s'il sera dans de bonnes dispositions ? Se forcer à être heureux, je trouve ça passablement hypocrite.

— Mais il y a les enfants...

— Je n'en ai pas, raison de plus pour ne pas faire semblant. Et puis cette obsession de leur faire coire au Père Noël... On pourra dire ce qu'on veut, moi, je trouve ça moche. Il faut bien finir un jour par leur avouer la vérité, alors à quoi bon ? Je trouve même cela un peu sadique. Et vous, vous recevez votre famille ?

— Non.

— Ah ?

— C'est que je n'ai plus de famille. monsieur Park.

— C'est en effet une bonne raison de ne pas les recevoir.

Baekhyun regarda son voisin et éclata de rire. Les joues de Chanyeol s'empourprèrent.

— Ce que je viens de dire est horriblement maladroit, n'est-ce pas ?

— Mais plein de bon sens.

— Moi, j'ai une famille, enfin je veux dire, un père, une mère, un frère, une sœur, d'affreux neveux.

— Et vous ne passez pas la veillée de Noël en leur compagnie ?

— Non, plus depuis des années. Je ne m'entends pas avec eux et ils me le rendent bien.

— C'est aussi une bonne raison de rester chez vous.

— J'ai fait tous les efforts du monde, mais chaque réunion familiale fut un désastre. Mon père et moi ne sommes d'accord sur rien, il trouve mon métier grotesque, moi le sien terriblement ennuyeux, bref, nous ne nous supportons pas. Vous avez pris votre petit déjeuner ?

— Quel rapport entre mon petit déjeuner et votre père, monsieur Park ?

— Strictement aucun.

— Je n'ai pas pris mon petit déjeuner, sourit Baekhyun.

— Le pub à l'angle de notre rue sert un délicieux porridge, si vous me laissez le temps de déposer chez moi ce cabas* qui n'est pas très masculin, je vous l'accorde, mais cependant fort pratique, je vous y emmène.
*un genre de sac à main

Je m'apprêtais à aller au parc, répondit Baekhyun.

— L'estomac vide ? C'est une très mauvaise idée. Allons manger, nous volerons un peu de pain à table et nous irons ensuite nourrir les canards du parc. L'avantage avec les canards c'est que l'on n'a pas besoin de se déguiser en Père Noël pour leur faire plaisir.

Baekhyun sourit.

— Montez donc vos affaires, je vous attendrai ici, nous dégusterons votre porridge et irons fêter ensemble le Noël des canards.

— Merveilleux, répondit Chanyeol en grimpant les escaliers. J'en ai pour une minute.

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Le VoisinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant