Cauchemar

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Une ambulance.
Des pleurs d'enfant.
Des pleurs de femmes
Un corps inconscient, plongé dans un coma artificiel.
Beaucoup d'inquiétude.
Voilà ce qui était en train de ce dérouler ce samedi soir, à l'hôpital.

《Pourquoi papa ne répond pas ? Il n'est pas mort hein ?》 Demanda Jules ,en pleurs, à sa mère qui était dans le même état.
A vrai dire, elle s'en voulait. La dernière fois qu'elle avait parlé à son conjoint, c'était pour lui crier dessus et lui faire des reproches. Et maintenant ? Le voilà allongé sur un lit d'hôpital, branché à des machines toutes plus complexes les unes que les autres.
《 Non mon chéri, il va se réveiller je te le promet》lui répondit-elle en essayant de paraître rassurante.
Aline était dans le couloir, en face de la chambre de Paul. Le souvenir refaisait surface encore et encore sans qu'elle puisse le contrôler

Flashback

Elle venait de fermer la porte. Son amant était parti en lui adressant un magnifique sourire et cela la rendait folle de joie malgré le fait de savoir que son mari rentrait le lendemain.
Elle allait s'installer pour lire un livre quand elle entendit un énorme vacarme au dehors. Elle se rendit à la fenêtre et ce qu'elle vit la figea. Une voiture venait de percuter un piéton et de s'encastrer dans un mur. Un sursaut de panique la prit. Un piéton ? Paul ! Elle appela les secours tout en sortant de chez elle.  Elle donna les indications qu'elle était en mesure de donner et raccrocha. Elle s'approcha un peu plus, les larmes aux yeux et dès qu'elle vit Paul à terre, elle hurla son prénom en espérant qu'il se relève en riant et lui dise que tout allait bien. Le temps semblait s'être arrêté et quand les secours arrivèrent, la seules phrase qu'elle prononça fût:
《 Je vous accompagne》

Fin du flashback

Dans l'ambulance, elle avait appelé Sophie qui était venue en vitesse avec son fils. Maintenant elle était là, à attendre que son amant se réveille sans même pouvoir le voir. Elle ne savait même plus combien de temps était passé depuis qu'elle était arrivée. Elle se morfondait , essayant de se remémorer les bons souvenirs et les rigolades qu'elle avait avec Paul, tout en priant pour qu'il se réveille le plus vite possible. Aline avait besoin de lui, besoin de ses piques, de son humour, de son amour... Soudain, elle sentit une main sur son épaule et prit conscience que des larmes coulaient de ses yeux bleus. Sophie la regarda, les yeux rouges et un sourire qui se voulait rassurant. Elle essayait, elle aussi, de maintenir son apparence. Elle s'assit auprès d'Aline et prit la parole.
《 Merci... merci d'avoir appelé les secours et de m'avoir appelé ensuite. Sans toi, il y serait passé.》
Aline ne prit pas la peine de répondre. Elle lui offrit un maigre sourire pour lui faire comprendre que c'était normal.
Elles restèrent là, assisent sur les chaises inconfortables de l'hôpital, sans qu'aucun mot ne soit échangé. Au bout de quelques minutes, Sophie posa la question qui lui brûlait les lèvres depuis qu'Aline l'avait appelé pour l'informer de l'accident de Paul :
《Pourquoi était-il chez toi ? 》
《 Nous avons travaillé sur le livre toute l'après-midi.》
Quelle autre excuse pouvait-elle donner ? Elle n'allait pas tout avouer à la compagne de son amant alors que celui-ci était dans le coma et que tout le monde était sous pression.
《 Et pourquoi es-tu encore là ? Pourquoi te sens-tu obligée de le voir ou de l'attendre ? 》
' Parce que je l'aime ', pensa-t-elle.
《Je ne sais pas... C'est un collègue et un très bon ami alors je suppose qu'inconsciamment je veux m'assurer qu'il va bien même si je sais que ce n'est pas le cas. Mais si tu veux je peux m'en aller , ma place n'est pas ici...》
Elle commença à se lever avant que Sophie ne la retienne et lui dise qu'elle était désolée, qu'elle était sous tension et que sa présence lui faisait du bien.
Aline resta une bonne partie de la nuit avec Sophie et Jules qui ne voulait pas quitter son père de peur qu'il lui arrive quelque chose dès qu'il partirait. Elle rentra chez elle vers 4h30 et s'affala dans son canapé en pleurant. Elle trouva le sommeil peu de temps après sa crise de larmes.

Le lendemain matin, Eddy trouva sa femme encore habillée sur le canapé.  Elle avait l'air fatiguée et il se demanda si elle avait passé sa nuit à travailler. Il se dit qu'elle avait dû être perturbée par l'accident qui semblait avoir eu lieu devant chez eux. Il avait d'ailleurs été étonné de voir une voiture encastrée dans le muret jouxtant sa maison.
Il essaya donc de faire le moins de bruit possible mais Aline, ayant l'ouïe fine, se réveilla.
En voyant son mari, elle sentit la tristesse l'envahir de nouveau. Son amant était dans le coma, son mari était revenu, et par dessus-tout, elle voulait que ce cauchemar s'arrête. Eddy vint donc la prendre dans ses bras en lui murmurant des phrases qui se voulaient réconfortantes.
《Aline, chérie, qu'est-ce-qu'il s'est passé ?》
《C'est Paul... il a été percuté par une voiture hier... juste devant chez nous... oh mon dieu c'est horrible Eddy, il est dans le coma! 》 réussit-elle a répondre
《 Paul ? C'est horrible ! Mais qu'est-ce-qu'il faisait chez nous ?》
Encore et toujours la même question, celle à laquelle elle ne pouvait pas répondre honnêtement.
《On a travaillé sur le livre toute l'après-midi et quand il est parti vers 18h...il...il...》
Eddy comprit et la serra plus fort dans ses bras. Il savait qu'il n'arriverait pas à la réconforter mais il essayait tant bien que mal de lui faire comprendre que ce n'était pas sa faute et que Paul allait sortir de son coma dans peu de temps.

Ce dimanche fût sinistre et pluvieux. Comme si le monde savait qu'un cauchemar berçait la vie d'Aline et se débrouillait pour le lui rappeler. Elle ne parla que pour demander à son mari comment s'était passé sa semaine. Le coeur n'y était pas et Eddy le voyait bien mais il comprenait et essayait de la distraire.
Sophie lui envoyait des messages assez souvent pour lui donner les pronostics des médecins quand ils venaient, mais ils n'étaient ni rassurants ni alarmants. L'état de Paul n'évoluait pas, son coma pouvait donc durer bien plus longtemps que ce qu'elle pensait.

Un seul être vous manque et tout est dépeuplé.
Aline avait toujours trouvé cette citation niaise et inutile. Aujourd'hui, elle prenait pleinement conscience du vide que l'absence de Paul créait. Son mari pouvait faire ce qu'il voulait pour lui changer les idées, ce qu'elle voulait elle c'était Paul, son sourire, ses blagues pas forcément drôles et leurs engueulades qui se finissaient en fous-rire. Elle n'avait même plus la force de pleurer. Elle se fit la réflexion qu'elle avait épuisé son stock d'eau et qu'elle allait bientôt être déshydratée.
Demain, elle allait devoir retourner travailler. Aurait-elle la force de faire cours ? Comment vont réagir les collègues ? Comment allait-elle annoncer cette terrible nouvelle sans s'effondrer ? Il fallait qu'elle se ressaisisse, Paul n'aurait pas aimé la voir comme ça.
Demain, elle allait arriver plus tôt au lycée et annoncer ça  aux CPE, au Directeur et aux collègues. Les élèves seront également mis au courant dans la journée. Elle sentait déjà son mal de tête revenir rien que de penser à la journée suivante.
D'ailleurs, Paul ne lui avait-il pas dit un jour qu'il ne fallait pas penser au lendemain ?

Amour et trahison (Tome 1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant