Chapitre 35 : Charges et devoirs

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[Un Eole emballé (à offrir à qui vous voulez) spécialement pour les fêtes. J'ai un peu de retard mais je l'avais fait pour Noël donc l'intention reste x)]


Un silence épais et lourd de signification accueillit les paroles d'Andrew. Il rejoint sa place et couvrit la main de Ludo de la sienne. Jyn étudiait les réactions des deux garçons avec suspicion, le nez plissé d'un dur mépris pour son cadet.

Kourrage n'ajouta rien, laissant à ses élèves le temps de digérer l'information. Si beaucoup se doutaient de leur différence, en avoir la preuve concrète était semblable à recevoir une gifle en pleine figure. Comme si le froid polaire de l'extérieur frappait de plein fouet les étudiants.

Delkateï ferma les yeux une seconde, pour les rouvrir sur un moment de lucidité. Le bureau du directeur s'offrit à lui sous un tout nouveau jour. Comme s'il était enfin capable de percevoir la magie qui hantait chaque centimètre de la pièce. Des volutes de toutes les couleurs qui recouvraient les imposants tas de documents qui s'élevaient sur le meuble. Derrière, les armoires étaient remplies de classeurs et d'ouvrages divers. Sur l'angle de l'un d'eux, le plus grand de tous, avait été sculpté la demi-déesse Olympe. Ses ailes finement taillées la rendaient reconnaissable entre tous et elle figurait dans une position singulière. Le genou à terre, elle était représentée au service des Dieux comme des humains. Intermédiaire fidèle entre ces deux mondes. Elle-même gagnée par les incantations, soufflant une parole de réconfort à celui qui portait une oreille ici-bas :

—Courage, Delkateï. C'est ici que tes alliés vont se révéler. Sois-y attentif.

De tous ses camarades, Eole fut le premier à réagir véritablement. La voix chevrotante, il regrettait de se sentir concerné à ce point :

—Vous voulez que l'on expose toute notre vie devant vous ?

Il n'y avait rien d'accusatif dans sa voix, seulement un abandon définitif et las. Delkateï ne pouvait le comprendre, spectateur de la situation sans parvenir à rester parfaitement inactif.

—Non, ce n'est pas exactement ce que je vous demande, rectifia le directeur, d'une voix suave.

Outre la dimension purement surnaturelle, l'Italien avait envie de soulever l'impuissance de cet homme, d'en exploiter la souffrance qu'elle pouvait éveiller. Lui qui ne connaissait rien de cet endroit et qui avait dû accepter la présence des Dieux pourtant incroyable, chaque affront lui semblait douloureux. Le directeur ne pouvait rien faire de plus, contraint à quémander de l'aide chez ses élèves, ce pathétique constat alimenta les pensées de Delkateï à ce sujet.

—Je vous demande juste de l'accepter. Mettre des mots sur soi est difficile pour tout le monde et je vous en demande déjà énormément. Je vous supplie simplement de ne plus cacher d'informations qui nous seraient primordiales, et de tout faire pour que Diolyde soit débarrassé de l'espion. Garder votre... différence... secrète sera difficile et il faudra un jour accepter qu'elle soit révélée.

—Vous ignorez ce que cela va nous coûter, avança Jyn d'une voix forte.

—Il fallait bien que ça arrive un jour, intervint soudainement Aaron, haussant le ton à son tour.

Tous les regards se braquèrent sur l'Australien qui n'eut pas le bon sens de rougir. Son éternel sourire n'ornait plus ses lèvres et la fatigue de ses mésaventures le rendait étrangement sérieux. À moins que cela soit le devoir matérialisé par l'oeillade encourageante de son ainé. Il en sentit la brûlure alors que Delkateï se mordait l'intérieur de la bouche pour ne pas lui hurler de se taire.

INSTINCTS   Tome  1. L'école qui n'existe pasOù les histoires vivent. Découvrez maintenant