Chapitre 51 : La marque divine

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[On passe à la coloration : d'abord avec Aaron qui reprend quelques couleurs en exclusivité]


Une plainte s'éleva dans le silence étouffant de la pièce sans que personne ne sache qui en était l'auteur.

Jo !

L'espion possédait désormais un nom, un visage, une identité. Le coupable se dessinait devant leurs yeux et s'en cacher n'était plus envisageable. Il fallait à tout prix l'arrêter, bien que le courage leur fasse soudain défaut. Paralysé, Eole luttait contre les méandres sinueux de son propre esprit. À ses côtés, Aaron laissait le choc ressenti le submerger, Déméter tremblait sans prononcer un mot et Delkateï sentait la rage monter en lui, par vague successive. Seul Jyn ne manifestait aucune émotion de ce type, songeant calmement à ce que le futur leur réservait, envisageant chacune des possibilités s'offrant à eux. C'était là son plus grand privilège.

—Ça peut pas être lui ! Jo n'est pas comme ça, je le connais ! C'est un type bien ! C'est pas possible ! s'exclama l'Australien, refusant encore d'y croire.

—Kristal ne nous mentirait pas, avança le Finlandais, cela se révélerait trop dangereux pour lui. Il risquerait d'y perdre la vie et il y est trop attaché pour l'abandonner dans un jeu où il pourrait finir perdant.

Le démon se manifesta plus vivement, comme en accord direct avec les propos de l'adolescent. Eole ferma les yeux pour chasser cette sensation désagréable qui ébranla son corps et sentit des bras se refermer autour de lui dans une étreinte rassurante. Déméter percevait le trouble de son ami et savait qu'il ne serait pas bon de le négliger. Il lui intima de rester fort, lui jurant que tout cela serait bientôt fini. Il lui tendit un mouchoir pour nettoyer la plaie de son index, soucieux de la pâleur effrayante du Russe. Une brève parenthèse qui ne tarda pas à prendre fin.

Delkateï se laissa choir sur son lit, les prémices d'une migraine battant ses dernières défenses pour instaurer une douleur crue en lui. Il reprit la parole :

—Qu'est-ce qu'on fait maintenant ? C'est bien beau de savoir que c'est Jo l'espion, mais il est capable de buter les gens à distance et comme ça le chante. Alors on fait quoi exactement ? On attend de voir qui il descend en premier ? Ça l'amuserait bien de nous voir crever un à un !

Personne ne répondit. Amèrement, ils venaient à regretter l'instant où la menace leur paraissait encore vague, indistincte. Il n'était plus question de l'ignorer à présent, de jouer les sourds et de fermer les yeux sur la réalité. Il n'y avait plus de choix qui tienne désormais.

—On prévient Kourrage ? s'enquit Aaron au bout de longues secondes.

—Et qu'est-ce qu'il fera ? railla l'Italien, comme une injure. Voler à notre secours ? Sortir sa cape de parfait justifier ?

—On ne peut pas s'en occuper seul de toute façon, on a besoin d'Andrew, ajouta Déméter. On a besoin de renforts !

Cette conversation leur sembla surnaturelle, bien plus que les précédentes. Le cœur battant, l'adrénaline ne rencontra rien de plus qu'un corps inactif, figé par la peur. Les connexions nerveuses s'enchaînaient, mais les muscles ne répondaient pas à leurs sollicitations. Un résultat affligeant alors que l'avenir de l'école se jouait peut-être en cet instant.

—Et on le trouve où déjà. On a que dalle, ni plan d'action à la con ni rien d'autre. On se pointe devant sa chambre et on joue les héros ? Ça se passe comme ça dans les films et encore ! Une chance sur deux pour que ça plante !

INSTINCTS   Tome  1. L'école qui n'existe pasOù les histoires vivent. Découvrez maintenant