Chapitre 7 : 1 mois

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Écailler les daurades, pêchées ce matin même depuis le pont du Joker, puis les vider et les faire sécher. À côté, faire revenir des oignons dans une grande poêle de cuivre. Lorsque les oignons deviennent translucides, ajouter de belles tomates rouge des montagnes de Rabiane coupées en quartiers. Ainsi que quelques épices du Sorhindi comme du poivre et de la coriandre. Enfin, dans un grand plat verser la moitié de la préparation, puis les poissons et le reste de la préparation. Mettre le plat dans un grand four et laisser jusqu'à ce que le poisson commence à s'effriter. Et vous obtenez un "albolla dorim" pour tout l'équipage. C'est un plat traditionnel Rabian que j'ai appris lors de mes dix ans d'esclavage. Je dois bien avouer que l'apprentissage de la cuisine est la seule chose pour laquelle je pourrai être un tant soit peu reconnaissant envers le comte de Brem. Il m'a fait rencontrer les meilleurs cuisiniers du nord du pays pour être sûr de bien manger et depuis je ne peux m'empêcher de prendre du plaisir en cuisinant. Plus qu'une obligation c'est devenu une vrai passion et c'est pourquoi je me suis proposé d'aider le cuisinier de l'équipage, parce que je ne veux pas rester sans rien faire. Lucius, lui, s'occupe en discutant avec Nicky et Riwalenn, il m'a dit qu'il cherchait à en savoir plus sur le "vieux continent" et sur Tribina.

Cela fait déjà presque un mois que nous sommes partis de Sian Ravelio en faisant des pauses de temps en temps sur les côtés Tribinates, qui sont les bienvenues mêmes si nous ne pouvons pas descendre. La semaine dernière nous avons passé le pont de Ravel, qui est en construction depuis plus de cinquante ans et qui devrait être terminé dans une quinzaine d'années. Il était tellement grand qu'on ne voyait aucun des deux bouts. Ensuite nous avons continué de voler vers le nord, devant peu a peu à nous couvrir avec des manteaux de laine, et depuis cinq jours nous avons mis cap vers l'est, dans les terres, afin de rejoindre Northam, la capitale du royaume. Lorsque que l'on regarde le sol, tout est différent de Rabiane : il y a de grandes montagnes dont les sommets sont couverts de neige, parcourues par de nombreuses petites rivières, et au pied de celles-ci il y a une immense forêt de sapins. C'est vraiment excitant de voyager comme ça, je me sens vraiment libre, je me sens enfin en vie. Il ne nous reste que trois jours de voyage mais je suis sûr que cette sensation restera gravé dans ma mémoire pour toujours. Ça ne me dérangerait pas de mener une vie de pirate, à bord du Joker.

Après les remerciements habituels du chef, je rejoins Lucius dans la cabine du capitaine. Depuis le début du voyage il a décidé de me faire subir un apprentissage de l'étiquette tribinate pour que je puisse me faire passer pour quelqu'un de bonne naissance. C'est très dur de tout retenir mais au moins, maintenant, je sais lire sans m'arrêter à chaque mot et je connais les règles de politesses par cœur. Je me suis grandement amélioré en géographie et en calcul aussi, mais l'histoire reste compliquée à assimiler. C'est d'ailleurs un livre d'histoire qu'est en train de lire mon ancien maître.

- C'est intéressant ?
- Oh, Esteban, oui c'est très passionnant. Me répond-il. C'est un livre qui explique comment le pays que nous survolons s'est créé.
- Ça à l'air passionnant, dites m'en plus.
- Tu as encore du mal avec le tutoiement. Dit-il en riant.
- Oui, je sais... Désolé... Et donc ce pays ?
- C'est un petit groupe de religieux qui est arrivé en premier, au alentours de 248 après Ravel, sur ce petit bout de terre à peine habité. Dans leurs histoire il y a tout un pan mélangé à une mythologie divine qui a accordé a une élue, venue avec le premier groupe, le pouvoir de créer un pays. Et l'auteur du livre, bien qu'un peu sceptique, avoue que la puissance actuelle du pays pourrait clairement être liée à la forte foi des ses habitants envers leur divinités.
- Ces divinités ça ne serais pas Erath, Ewart et Ria ?
- Oui c'est ça, comment tu le sais ? Je t'en avais déjà parlé ?
- Non, c'est Évangéline qui m'en avait parlé quand j'étais petit. Je me souviens que tout les soirs elle posait des fleurs sur une fenêtre, des orchidées je crois, en guise d'offrande et elle faisait une prière pour que nous restions en paix et en bonne santé.
- Tu vois, tout les habitants de Tribina sont très pieux. Pour en revenir à cette élue, c'est elle qui a fondé le pays et sa descendance le dirige encore. Elle se nommait Greta Tribina et je pense que tu comprends mieux d'où vient le nom du pays maintenant.
- Oui c'est logique.
- Et puisque que c'était une femme et que la succession s'est toujours faite en faveur des héritiers de sexe féminin, la société tribinate a un grand respect pour les femmes. Et donc, contrairement à beaucoup d'autres pays, de nombreuses grandes institutions et de nombreux postes important sont tenues pas ces femmes. Et les lois de ce pays sont les plus paritaire du monde.
- Ah oui ! J'avais déjà vu ça quelque part... Mais je sais plus où.
- Sûrement dans une des lectures que je t'ai donné par le passé.
- Oui, ça doit être ça. Il y a quoi comme loi paritaire ?
- Euh... Il y en a une qui se nomme la loi des aînés.
- Des aînés ?
- Oui tu vas comprendre. À Rabiane tu n'es pas sans savoir que les nobles se marient entre eux pour des raisons politiques et souvent les familles possédant des filles les marient a des hommes fortunés pour qu'elles prennent leur nom de famille et leur richesses afin d'assurer la fierté des parents.
- Oui, d'ailleurs vous deviez vous fiancer à la fin de l'année si je me souviens bien ?
- Ça n'aura pas lieu et c'est mieux comme cela. Mais si je te disais ça c'est parce qu'à Tribina, peux importe fille ou garçon, tout le monde peut transmettre son nom de famille. Du coup pour éviter les problèmes de choix du nom de famille après le mariage, il a été décidé que le nom sera choisi en fonction de l'ordre de naissance.
- L'ordre de naissance ?
- Pour simplifier, si un premier né se marie avec quelqu'un né le troisième dans sa famille, alors c'est le premier né qui donnera son nom à son époux et à ses enfants.
- Je vois, c'est pour ça que cette loi est dite « paritaire »... Mais attendez, que se passe-t-il si deux aînés se marient ?
- J'étais sur que tu me le demanderais. Me dit-il avec un clin d'œil. Pour éviter cette situation, la première reine a décidé qu'un aîné ne pouvait pas en épouser un autre, d'où le nom de loi des aînés.
- Je vais peut-être vous paraître un peu tatillon mais que se passe-t-il lorsque deux deuxième ou deux troisième de marient ?
- Tu es curieux, c'est bien. Dans ce livre il est dit que pour les "mariage de moindre intérêt" le choix du nom de fait par commun accord des deux parties. Ces mariages ci sont souvent des mariages d'amour véritable.
- Je vois, donc dès que ce n'est plus intéressant politiquement ou économiquement, on s'en moque.
- C'est ça.
- Et bien, c'est vraiment étrange comme coutumes. Ce pays est très différent de ce à quoi nous sommes habitués, ça va être dur de s'intégrer... Mais d'ailleurs comment va-t-on faire pour parler avec les habitants ?
- Ne t'en fais pas, j'ai étudié en secret le tribinate grâce à l'immense collection de livres interdits de mon père. Il ne les collectionnait que par avarice, de part la rareté des livres étrangers, mais c'est cette avarice qui m'a permis d'approfondir mes connaissances sur le monde. Et puis Nicky m'a aidé à approfondir mon vocabulaire et mon accent.
- Pourquoi l'avoir fait en secret ?
- Tu le sais bien. Tout ce qui est étranger est interdit, ou du moins très mal vu, à Rabiane, si l'on omet le commerce juteux des pirates.
- Effectivement... J'ai un mauvais souvenir de ce que les Rabians font aux étrangers.

𝕭𝖔𝖞 𝖒𝖆𝖎𝖉 (en Réecriture) Où les histoires vivent. Découvrez maintenant