Cette nouvelle information bouleversa Hanna. À présent, elle avait du mal à croire que le malheur les avait frappés par le plus grand et triste des hasards. Cette plante à laquelle elle avait à peine jeté un furtif regard dans ce magasin de produits de beauté « insolites » où elle s'était rendue pour un de ces articles était impliquée dans la mort d'Ema.  Une personne avait pu les suivre depuis le magasin... Un client ? Un employé peut-être ? Ou Ema s'y était peut-être rendue... Rizwan avait encore une fois eu raison : à présent elle avait une piste à suivre.

Après une nuit de sommeil bien agitée, Hanna se leva pour se préparer à aller au travail. Ces derniers temps, elle s'était quelque peu désintéressée de ce qu'il se passait au bureau. Sans l'aide de Marie, elle aurait sûrement été totalement larguée. Une réunion devait avoir lieu aujourd'hui, et elle voulait y faire bonne figure. Certes elle n'était pas vraiment fan des news people, mais cela restait son travail, pour lequel elle était plutôt bien payée. Ce n'était vraiment pas le moment de risquer de le perdre et de se retrouver au chômage... Elle se promit d'être physiquement et psychologiquement présente aujourd'hui, elle leur devait bien ça. Mais elle n'avait pas pour autant oublié ou mit de côté la journée d'hier et tout ce qu'elle avait appris. Cette histoire de magasin et de Litsooí l'obsédait complètement ! Elle ne voulait pas perdre cette journée et prendre du retard dans ce qui s'annonçait déjà une longue enquête... C'est pourquoi elle eut l'idée de faire encore une fois appel à l'aide de Riz. Il travaillait juste à côté, ce ne serait donc pas difficile pour lui de jouer les éclaireurs. C'est ainsi qu'elle l'appela juste avant d'aller travailler et lui raconta ce qu'elle avait découvert.

— C'est totalement dingue ! Alors tu penses que quelqu'un du magasin là est impliqué ? Quoi ? Le magasin serait une sorte de couverture qui cacherait des disciples de je ne sais quelle force démoniaque ?? demanda Riz sur un ton qui trahissait son inquiétude.

— Je n'en sais strictement rien. Mais ça doit bien partir de là. C'est le seul endroit où j'ai vu cette saloperie de plante... Il faudrait savoir si on en vend ailleurs. Mais ça ne peut pas être un hasard ! répondit Hanna.

— Et en quoi puis-je t'aider ?

— Comme tu bosses à côté, ce serait bien si tu pouvais y faire un tour et tâter le terrain...

— Tu veux que j'aille risquer ma vie chez ces foldingues alors ! Je peux te dire que ça va te coûter cher niveau dédommagement...

Hanna se mit à rire.

— Je te revaudrais ça promis. Ne t'inquiète pas, vas-y détendu. Regarde s'ils ont encore du Litsooí et pose quelques questions l'air de rien. Je t'appellerais en fin d'après-midi et tu me diras ce que tu as pu trouver.

— OK. Je te ferais un rapport à ce moment-là... Si je suis toujours en vie !

— Ne t'inquiètes pas tu es bien trop mignon pour qu'ils songent à te sacrifier, au pire l'une des adeptes te choisira comme compagnon afin de procréer la nouvelle génération de disciples, répondit Hanna en riant.

— Rhooo ! Rizwan se mit à rire. OK merci je garde juste le mignon et j'oublie le reste. A plus !

Hanna était rassurée de savoir Riz sur le coup. Elle pouvait à présent se concentrer sur sa journée et le travail qui l'attendait au bureau.

La réunion qu'elle avait un peu appréhendée se déroula de manière très conviviale. Elle eut le bonheur de constater que malgré ses dernières absences, on était toujours très satisfait de son travail. Elle pouvait compter sur la compréhension et le soutien de ses collègues et de sa boite dans ces moments difficiles, et c'était une vraie chance. Le reste de la journée se déroula sans anicroche, ce qui lui permit de rester concentrée. Mais elle avait toujours dans un coin de sa tête cette histoire de magasin. À l'heure de quitter le navire, elle ramassa ses affaires avec précipitation pour s'en aller. Il lui arrivait souvent de trainer, de finir des articles ou de s'avancer sur quelque chose. Il n'y a pas vraiment d'horaire totalement fixe pour un journaliste. Mais là pas question de rester une minute de plus que celles inscrites sur son contrat ! Elle était bien trop curieuse de savoir comment ça s'était passé pour Rizwan !

Une fois arrivée chez elle, elle balança ses chaussures, prit son téléphone portable de son sac qu'elle jeta sur la table basse, et s'affala sur le canapé. Il était temps d'appeler Riz.

— Alors tu y es allé ?? demanda précipitamment Hanna dès qu'elle l'entendit décrocher, sans aucune sorte de préliminaire.

— Euh... Oui, répondit-il.

— Et ?? Bah vas-y, raconte !!!

— J'y suis allé, j'ai fait un tour dans le magasin. Je n'ai pas vu de Litsooí. Je suis allé questionner une petite vendeuse qui n'arrêtait pas de me mater. J'ai dit que je cherchais quelque chose pour ma sœur, ce qui l'a semble-t-il soulagé. J'ai dit qu'elle m'avait parlé d'un produit qui était à ce qu'il parait pas mal et j'ai lâché le mot Litsooí.

— Comment elle a réagi ? Son visage a changé de couleur ou elle a eu une expression bizarre ?

— Non pas du tout. Elle m'a dit que c'était une plante rare qu'on utilise en masque pour les cheveux ou je ne sais quoi, mais qu'elle ne me la conseillait pas. J'ai demandé s'ils en avaient, elle m'a dit qu'ils en avaient eu dans le magasin et que ça ne se vendait pas, mais qu'une personne était venue et avait acheté tout ce qu'ils avaient en stock...

— Elle t'a dit qui ? Un homme ? Une description ?? demanda Hanna l'air agité.

— Hum... Comment dire... Oui, elle me l'a dit..., répondit Rizwan sur un ton exprimant à la fois la gêne et la peur.

— Vas-y, crache le morceau !!!

— ... C'est...toi.

— QUOI ???!!! hurla Hanna.

— La vendeuse m'a affirmé que tu lui avais dit que tu étais venue une première fois dans ce magasin pour un article, que tu avais bien aimé les produits, et que tu étais revenue pour acheter du Litsooí pour compléter ton article. Et que quelques jours plus tard tu étais revenue acheter le stock complet, et qu'ils avaient été heureux de s'en débarrasser...

— Comment ça MOI ???!! Mais qu'est-ce que c'est que ces conneries bordel ??!!!! Je n'y ai jamais remis les pieds ! Elle t'a vraiment dit que c'était moi cette espèce de folle ?? Qu'est-ce qu'elle t'a dit exactement ?? Hanna était complètement hors d'elle.

— Elle m'a dit Hanna, journaliste, jolie brune...

— Mais ce n'est pas vrai, ce n'est pas moi, je peux te le jurer !!! Elle est complètement folle de mentir comme ça !!!!

— Elle avait l'air sincère...

— Bah moi je te dis qu'elle ne l'était pas !!! Je n'ai jamais acheté cette saloperie de merde j'en avais même oublié l'existence !!!

Rizwan resta silencieux durant un court instant.

—Je veux bien te croire, mais dans ce cas où elle a menti comme tu le penses, et franchement ça m'étonnerait, ou quelqu'un s'est fait passer pour toi...

— Demain toi et moi on va mettre ça au clair.

Après ce coup de téléphone qui l'avait totalement ébranlé, Hanna eut du mal à manger. Elle eut du mal à dormir. Elle eut du mal à se réveiller. Elle eut du mal à aller travailler. Elle eut du mal à se concentrer et à écrire. Elle n'attendait qu'une chose, pouvoir partir et se rendre dans ce foutu magasin ! Elle n'en pouvait plus d'attendre, elle entendait son cœur battre dans ses tempes. Elle demanda donc à Marie de la couvrir et s'éclipsa rapidement du bureau. En chemin elle grilla deux feux rouges, et avait pris le risque de perdre des points sur son permis de conduire. Mais c'était ses points ou sa raison, elle avait vite fait le choix.

Beauté EmpoisonnéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant