Hanna ne reconnaissait absolument pas Karina. Elle ne voyait pas devant elle celle qu'Ema et elle avaient tendrement surnommée Rina. La mignonne fausse blonde, maitre dans l'art du maquillage. La douce jeune femme, toujours disponible, prête à rendre n'importe quel service, et qui avait toujours les bons mots pour vous remonter le moral. Comment une personne qui paraissait tellement douce pouvait être en réalité totalement machiavélique ?!

Celle qu'elle avait devant elle n'avait plus rien d'humain. Ses cheveux bruns aériens, son look sensuel, son visage rayonnant flirtant avec la perfection... Tout ce qui agissait comme de la poudre aux yeux n'arrivait plus à aveugler Hanna, à masquer la réalité concernant la valeur de l'âme enfouit dans cette enveloppe corporelle présumant la sainteté. Hanna avait ouvert les yeux de force et avec douleur. C'était comme les lui avoir ouverts d'une incision à vif. Se rendre compte de tout ce qui jusqu'à présent lui avait échappé était un mal pour un bien : elle souffrait, mais elle ne vivait plus dans l'illusion.

Les apparences sont trompeuses, s'entend-on dire continuellement. Ce refrain sempiternel est gravé dans l'esprit de tout un chacun, et ce dès le plus jeune âge. Mais s'entend-on nous dire avec la même fréquence que les sentiments peuvent être également trompeurs ? Est-on averti que, au même titre que la beauté extérieure, la beauté intérieure peut être feinte ? Certains bons sentiments n'ont de bon que le nom par lesquels on les qualifie. Ils ne sont exprimés qu'afin de servir de vils desseins. La loyauté par exemple, cette qualité morale noble et pure, définit comme étant le dévouement envers une personne : elle est dite comme essentielle dans toute véritable amitié. On la cherche donc chez les autres, mais on ne nous prévient pas que certaines personnes ne nous sont pas loyales, elles sont loyales à leurs besoins qu'elles puisent en nous. Cette preuve d'attachement à l'autre ne devient alors qu'un acte purement égoïste... Tout ce qu'Hanna avait pris pour des marques d'amitiés venant de Karina n'était en réalité que des leurres.

Karina devait réfléchir à ce qu'elle allait faire. Elle avait deux personnes à éliminer afin de protéger son secret. Mais il lui fallait procéder avec minutie, afin que l'on ne puisse arriver jusqu'à elle. Il lui fallait du temps pour réfléchir, mais ça, Hanna, toujours sur le lit d'Ema, ne devait pas le sentir. Elle devait rester maitre de la situation.

Hanna sentait la nervosité de Karina monter crescendo. Elle la considérait désormais comme mentalement instable, comme tout psychopathe, et capable de tout : surtout du pire. Il lui fallait trouver quelque chose, une idée, un stratagème, afin de l'éloigner de Rizwan et de s'éviter à elle-même de mourir étouffé, avec du Litsooí enfoui dans la gorge. Maudit soit le jour où elle était entrée dans cette satanée boutique avec Karina pour un stupide article beauté se dit-elle ! Il lui fallait du temps pour réfléchir, et vite, sans montrer un quelconque signe de peur. Elle devait rester maitre de ses émotions.

— Pourquoi ? Pourquoi est-ce qu'on en est arrivé là ? demanda Hanna.

— Pourquoi ? Karina fixa Hanna du regard. Puis elle regarda au sol. Elle jeta un coup d'œil aux armes qu'elle avait en mains. Elle fixa de nouveau Hanna, avec un petit sourire démoniaque. EH BIEN PARCE QUE ! hurla-t-elle.

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             Karina s'était toujours abstenue d'exprimer sa véritable pensée, de peur de perdre l'amitié d'Hanna et Ema. Elle faisait toujours en sorte d'aller dans leur sens, de ne pas les contredire, de les encourager dans certaines voies même si c'était contraire à ce en quoi elle croyait. Tout était bon pour rester dans le groupe. Elle pensait que c'était ce que les filles attendaient d'elle. Hanna et Ema se connaissaient depuis bien plus longtemps, elle n'était qu'un élément ajouté se disait-elle. C'est pourquoi elle s'était construit un personnage de femme lisse, douce et conciliante, réprimant sa véritable nature. Un personnage qui aurait l'approbation de tous. Mais il est bien connu que l'on ne peut plaire à tous ni être aimer de tous... À vouloir plaire aux masses on se perd soi-même.

Beauté EmpoisonnéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant