CHAPITRE QUATORZE.

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PDV REX.

Ce toit aurait dû être un endroit de peine, un mémorial. Au final, il s'est transformé en un repaire pour moi. Repaire et repère, d'ailleurs. C'est Alastair qui m'a proposé de l'y rejoindre, aujourd'hui. Il est assis à la place que j'occupe normalement, mais ses jambes sont croisées sous ses fesses. Il se cramponne à la barrière tout en gardant les yeux rivés vers l'horizon. Aujourd'hui il ne fait pas nuit. Le soleil se couche plus tard, maintenant. Les deux astres se partagent le ciel, la puissance de l'un s'effaçant pour permettre à l'autre de briller. Je ne sais pas pourquoi, mais cette pensée m'apaise. Quelque part, elle me rappelle la citation qu'il a collé sur mon mur. Je n'ai rien trouvé sur internet, je suppose donc que cette phrase est sa création. C'est peut-être pour cela que je l'aime encore plus. La phrase, hein.

On n'a pas reparlé du moment en classe. Alastair n'aime pas trop revenir sur les choses, et moi non plus. Ça nous fait un point commun. J'ai toujours peur de m'emmêler, et surtout de tomber dans une boucle. Du coup, je ne pense pas vraiment à ce qui se passe, j'essaie de me concentrer sur le reste, sur l'avenir, sur mes études. Sur tout, sauf sur Alastair.

Lorsque je m'assoie à côté de lui, je prends sa main dans les miennes, et je laisse mes doigts parcourir sa peau. A chaque fois, je suis ébloui et surpris par sa douceur. Je ne me lasse pas de sentir cette texture duveteuse. En relevant le visage vers lui, j'ai l'impression d'être un ado devant son idole, un enfant devant son plus beau jouet. Je perds ma contenance, parce que je me rends compte qu'il me plait, oui. J'ai refusé de l'admettre, tout en ayant l'attitude d'un dragueur qui ne sait pas s'y prendre. Je pensais que ça passerait, que ça ferait comme les derniers. Il me plairait un temps, puis je passerais au suivant. Sauf que ça n'a pas été ça. Du tout. Au lieu de me mépriser et de me rejeter, il s'est accroché. Alors qu'il ne connaît rien de moi, et qu'il voudra sans doute me fuir comme la peste ensuite. Et pourtant, pour l'instant, il me regarde avec délicatesse.

Sans même m'en rendre compte sur le moment, mes mains sont sur ses joues, nos lèvres sont scellées. Nos jambes se touchent et malgré les vêtements entre nous, je sens l'électricité qui me parcourt. J'ai des frissons sur tout le corps. Il attrape le bas de mon pull, joue avec, avant d'effleurer ma cuisse du bout des doigts.

Avant qu'il ne se sépare de moi pour que l'on s'assoie face à face, je capte son regard, et son sourire plein de timidité. Le bout de nez et ses joues ont pris une couleur rosée, il se mord encore la lèvre, et je vois la pointe de sa langue dépasser. Encore une fois ma peau me picote. Nos rares baisers ont toujours été très chastes, et je ne veux pas le brusquer. J'attrape un chewing-gum dans ma poche et lui en propose un.

- J'aime pas l'eucalyptus. Ça pique.

Il hausse les épaules comme un enfant et ça me fait rire. Ça me donne envie de l'embrasser à nouveau, mais je me retiens. Je change de position, sentant que j'ai commencé à me cambrer sans m'en apercevoir. C'est tout de même problématique, de faire des choses et de s'en rendre compte après.

- Ma dernière mission est réussie, non ?

- C'était quoi, déjà ?

- Genre t'as oublié. On devait s'inscrire au club de débats.

- Et monsieur, je te signale que c'est toujours pas fait !

- Certes mais bon, on était parti pour.

Et après trois ou quatre minutes de discussion, je finis par envoyer un autre message à Abby pour lui demander de nous inscrire, et la date de la prochaine réunion.

- T'as de la chance, je rigole en lisant la réponse, il y a une soirée chez ... je sais pas comment ça se dit.

« Hjördis » non mais vraiment, c'est quoi ce prénom ? C'est sûr que je ne peux pas trop parler à ce sujet, mais j'ai au moins l'avantage d'avoir un alignement de trois lettres qui veulent dire quelque chose. C'est facile à prononcer. Alastair essaie plusieurs fois, sans qu'on ne tombe d'accord.

Apprivoisable (Tome 1 - AVIFic - BxB)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant