7 mai 2019.
- Tu prends bien ton traitement, Rex ?
- Oui.
- Comment tu te sens, avec ?
- Inchangé.
- C'est à dire ? Tu peux me décrire ce que tu ressens ?
- Je suis pas sûr qu'il serve à quel chose.
Le médecin sort un stylo de sa blouse blanche caractéristique, et note quelques mots sur le dossier de son patient. Il lui pose ensuite plusieurs questions, auxquelles Rex a du mal à répondre. Il a honte, en vérité, et pense que c'est de sa faute si le traitement ne fonctionne pas.
- Tu as toujours des boucles, comme tu dis ?
- Oui.
- Et des absences ?
- Oui.
- Tu manges bien, tu as de l'appétit ?
Encore une fois, le jeune homme répond par l'affirmative. Il se sent comme un robot, parce qu'il ne dit que le même mot depuis le début. Il n'aime pas être ici. Il n'aime pas parler de lui. Tout ça, ce sont des mensonges. Un moyen de le contrôler. Il serre les poings mais tente malgré tout d'afficher un visage détendu. Sauf qu'il ne trompe pas le médecin, Rex le sait. Il entend son stylo courir sur la feuille, il capte son regard derrière ses lunettes rondes.
- Ces troubles digestifs dont tu parlais l'autre jour, tu en souffres toujours ?
- Ça dépend.
- De quoi, ça dépend ? Tu les as remarqués à des moments précis ? Lorsque tu ressens certaines émotions ?
Il ne veut pas en parler. Il ne veut pas aborder le sujet et l'homme n'insiste pas, même si son front est barré par une ride contrariée. Rex doit se livrer lui-même, et ce n'est pas toujours chose facile. Or, il ne peut pas l'obliger à parler. Alors il change de sujet. Il ne tourne pas autour du pot. Même si son patient le fait fréquemment, il doit venir droit au but.
- Tu bois toujours ?
- Pas seul.
- En soirée, avec des amis ?
- Voilà.
- Tu as des pertes de mémoire suite à ces sorties ?
- Parfois.
La discussion est difficile, l'atmosphère est tendue. Rex serre toujours les poings. Il continue de fixer le dessin punaisé au mur. Un soleil, avec des enfants qui font une ronde autour. Ça n'a aucun sens. Il penche la tête, le regarde un peu mieux. Il essaie de comprendre la signification. Ce n'est qu'en entendant la grosse voix du médecin qu'il revient à l'instant présent. Même s'il peut lire l'agacement, et un peu de déception, sur le visage de ce dernier, il ne change pas. Il ne veut pas parler, il ne veut pas être ici. Alastair l'attend, sans doute. Ils ont dit qu'ils iraient au club de débat, ce soir. Rex veut reprendre la route, se dépêcher de retourner à Cambridge.
- Des relations sexuelles ?
- Non.
- Un nouveau tatouage ?
- Oui.
- Tu veux bien me le montrer ?
Et voilà. Il prend encore une fois un ton condescendant. Rex se sent rabaissé, humilié. Il déteste qu'on le prenne pour un enfant. Il hausse les épaules et relève le bas de son pantalon.
- Tu peux me le décrire ?
- C'est un masque qui sourit qui cache à moitié un masque qui pleure. C'est un emoji. Vous avez un iPhone, vous l'avez dessus.
- Quand est-ce que tu l'as fait ?
- Le lendemain de la lettre.
- C'est à dire ?
- Fin mars. Je sais plus le jour.
- Pourquoi elle était si importante, cette lettre ? Qui t'a écrit ?
Le médecin connaît toutes les réponses. Mais il a besoin que Rex les lui dise. Que les mots sortent de sa bouche. Il a eu une longue conversation avec Malia et Elsie. Ce sont elles qui ont décidé qu'il continuerait à suivre Rex, parce qu'il est le seul à connaître son cas. Même si son jeune patient n'a jamais voulu lui raconter les éléments clés qui leur permettraient d'avancer. Rex se referme vite sur lui, et il a remarqué que les progrès étaient en dents de scie. Avant la lettre, il était plus ouvert. Après, il s'est refermé. Peu de temps après il a commencé à s'ouvrir à nouveau. Et maintenant, il est de nouveau renfermé.
- C'étaient les résultats. C'était Matthew qui les avait envoyés.
- Tu l'as appelé, après ça ?
- Non. Je filtre ses appels.
- Tu le tiens pour responsable du diagnostic ?
- Non. C'est moi le problème. Ça l'a toujours été.
Quelques notes supplémentaires avant de changer de feuille, et de sujet. Rex a avoué quelque chose d'intéressant. Le même problème qui revient de façon incessante.
- Tu sais bien que non. Tu n'es pas une tare comme tu as l'air de le penser.
Mais le jeune homme ne répond pas, et le médecin change alors de sujet.
- Tes partiels sont pour bientôt, je me trompe ?
- Ils commencent la semaine prochaine.
- Comment tu les sens ?
- Je sais pas.
- Et tes examens blancs ? Il me semble que tu les as tous réussis.
- Oui, mais ils étaient blancs. Ils ne comptaient pas.
- Ils sont malgré tout à la hauteur, voire plus durs que les vrais. Tu es un excellent élève, ce n'est qu'une formalité, pour toi.
- Si vous le dites.
Rex est absent de la conversation. Il est passif. Pas agressif. Pas encore. Le médecin sait qu'il pourrait le devenir s'il approfondissait un peu plus certains sujets. Comme celui de ce garçon qu'il peint.
- Tu as terminé le portrait ?
- Pas encore. Il n'est pas parfait.
Il se crispe sur son fauteuil. Le médecin le remarque. Malia l'a appelé il y a quelques jours. Rex a mis sans-dessus-dessous l'atelier qu'elles ont aménagé avec Elsie. Il a déchiré tous les croquis et les esquisses de sa muse. Alastair. L'homme n'insiste pas.
L'entretien se termine, et Rex quitte précipitamment l'hôpital. Les larmes qu'il a retenues coulent sur ses joues. Ilse sent une fois de plus confronté à l'échec ambulant qu'il pense être. Arrivé devant sa voiture sportive, il ouvre violemment la portière, et commence à taper de toutes ses forces sur le volant. Deux infirmiers accourent, et l'obligent à revenir. Vérification de ses mains. Il n'a rien. Une fois apaisé, il a le droit de repartir. Alors il fonce sur l'asphalte.
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Hello ! Un petit "entre-chapitre" qui raconte quelque chose de personnel sur Rex aha. Bon il faut que je le reprenne aussi, comme tout le reste de l'histoire. Pour l'instant je n'ai fait que les chapitres 1 et 2, les partiels arrivent en force et bon, j'ai bcp moins de temps ahaha.
RDV mercredi pour le prochain chapitre :3
Je vais essayer de poster davantage durant les semaines qui arrivent, afin de terminer la publication du tome 1 et vous poster le tome 2 ! :)
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Apprivoisable (Tome 1 - AVIFic - BxB)
Romantik- Ça te dit de jouer à un jeu ? - Pourquoi tu ne me dis pas tout maintenant ? - Parce que la vérité a un prix. Tout se paie dans la vie. Et que chaque acte a des conséquences. La complexité de l'être humain réside principalement dans son mode de pe...
