TITRE XIV

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On range ses affaires dans la cuisine et elle me présente un siège. Elle est très vieille, je me demande comment sa famille peut la laisser vivre seule dans une aussi grande maison. Elle fouille dans un placard et en sort une boîte de café encore fermée. Elle ne doit pas souvent recevoir des invités chez elle.

                                   Moi
Vous savez... vous n'êtes pas obligés de me faire un café. Je n'en bois pas très souvent alors j'ai peur de le gaspiller.

                                   Elle
Sin problema. J'ai un très bon jus de fruit fait maison dans le frigo, le prendre à la place ne pose pas de problème n'est-ce-pas?

                                   Moi
Non, au contraire. Mais je vais le prendre toute seule et vous, asseyez-vous. Vous semblez être fatiguée.

Elle ne bronche pas et s'assoit docilement.

                               Elle
Vous semblez être une jeune fille très gentille. Je suis señora Dayana Ortiz.

                                    Moi
Mass... je veux dire, Esther Aldini. Je m'appelle Esther Aldini.

Je sors le jus du frigo et le pose sur la table en bois de la cuisine. J'en profite aussi pour lui faire du café et le lui tend. Elle remarque mon alliance.

                                   Elle
Tu es mariée mon enfant?

                                   Moi
Oh oui... recemment. Je suis venue vivre ici avec mon mari.

Il y a un petit moment de silence pendant qu'on avale nos boissons.

                                   Elle
Tu es une nouvelle mariée alors. C'est très beau n'est-ce-pas? De passer le reste de sa vie avec l'homme qu'on aime et se réveiller tous les matins avec lui à nos côtés.

Si par très beau elle veut dire s'ignorer complètement alors qu'on vit dans la même maison, que par se réveiller à ses côtés elle veut dire "de la  porte d'à côté" et qu'au lieu de manger la nourriture de sa femme, il préfère aller manger au resto.... alors oui. On vit le parfait bonheur. Quelle femme n'en rêverait pas?

                                Moi
C'est très beau en effet. Dites madame, vous êtes mexicaine?

                                Elle
Ça se voit tant que ça?

                                Moi
Non pas du tout. C'est juste que votre accent et le fait que vous m'ayez parlé en espagnol tout à l'heure m'ont mis la puce à l'oreille.

                                  Elle
Eh bien oui. Je viens du Mexique, plus précisement de Acapulco. Mais bien sûr, avant que cette ville ne soit ce qu'elle est aujourd'hui.

                                   Moi
Ah... je vois.

                                   Elle
Et toi mon enfant, de quel pays d'Afrique viens-tu?

                                  Moi
Du Cameroun.

Et j'aurais bien voulu y rester....

                                  Elle
Oh il paraît intérressant... je n'y suis jamais allée.

Intérressant? Ah... je ne peux pas savoir. J'ai passé toute mon enfance et une partie de mon adolescence là-bas. Alors, s'il y a des trucs intérressants, ils ont sûrement dû me passer sous le nez. Notre conversation était parfois suivie d'un silence bizarre. On cherchait peut-être chacune des questions à poser à l'autre sans toutefois que cela frise l'indiscrétion. Par contre, le fait qu'elle vive seule me met très mal à l'aise. C'est pas prudent pour elle. Elle doit avoir combien? 100 ans?

CONTRASTE Où les histoires vivent. Découvrez maintenant