02 | HORS DE PRIX

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Pdv d'Ambrose

« T𝑜𝓊𝓉 𝓃'𝑒𝓈𝓉 𝓅𝒶𝓈
𝓆𝓊𝑒 𝒸𝒾𝓇𝓇𝒽𝑜𝓈𝑒, m𝑒𝒸. »

Nous roulons pendant une petite demi-heure avant d'arriver dans un quartier chic.

— La maison au bout, m'indique Kyrel en pointant la fin de la rue du menton.

Je hoche la tête et me gare dans l'allée menant jusqu'à l'entrée. J'ouvre ma portière et suis son pas assuré. Nous débarquons alors sur une large terrasse cachée entre de multiples arbres et buissons.

Près du barbecue, il y a un saut remplit d'eau, sûrement de la glace quelques heures plus tôt, et à l'intérieur des bouteilles de champagne vide.
Je me penche et en attrape une.

— Ces trucs sont hyper cher, soufflé-je impressionné en reconnaissant vaguement le nom inscrit sur l'étiquette.

— Je suis sûr que mes parents en boivent plus qu'ils ne boivent d'eau, plaisante Kyrel. Pour nous, c'est trois fois rien. Et puis, il paraît que l'alcool c'est l'aspirine de l'âme ! ajoute-t-il hilare.

— De un, je ne sais même pas quel goût ça a, grogné-je en me rembrunissant. Et de deux, tout n'est pas que cirrhose, mec.

Kyrel ne m'écoute déjà plus. Est-ce qu'il se rend compte que ce qu'il dit peut être vexant parfois ? Pourquoi ne pas me gueuler à la figure que je ne suis qu'un gosse pauvre et ignare tant qu'il y est ! Quel imbécile il peut être, ça lui arrive de réfléchir avant d'ouvrir sa grande bouche ?

— Attend moi là, je reviens, fait-il en s'enfonçant dans l'ombre.

Quelques secondes après, nous sommes illuminés et je me rends compte que nous sommes en réalité devant une véranda couvrant un immense piscine éclairée de leds rouges. Je suis bouche bée. Je me sens ridicule ici, comme si ce n'était pas ma place.

Kyrel sort d'une des portes fenêtres ouvertes, une guitare orange fluo et un ampli sous le bras ; il s'assoit sur l'une des chaises longues. Tandis qu'il sort ses partitions, je m'approche d'un autre saut disposé près de lui qui contient des bouteilles encore fermées. J'en attrape une pour regarder le motif plus en détail.

Drop the bottle, drop it. We got that thing from the beginning.

— Quoi ? baraguiné-je en sentant mon visage se réchauffer.

— C'est quand elle chante ça dans la deuxième chanson que je fais des canards... en plus de la chanson d'aujourd'hui. D'où la guitare et non la basse.

— Oh, ok.

D'un coup, je fais sauter le bouchon de la bouteille.
Kyrel se tourne vers moi avec un air étonné.
Je bois quelques gorgées au goulot et lui tend la bouteille.

— Ça t'aidera à apprendre.

Il me sourit et attrape la bouteille en secouant la tête visiblement amusé.

[...]

— Non, soupiré-je pour la énième fois. Pose ton doigt sur le D, pas le E, le D.

Il joue à nouveau l'accord, justement cette fois avant de lâcher brusquement son instrument sur sa chaise longue.

— Oh et puis merde, j'en ai marre, gronde-t-il.

Il se lève d'un coup, s'étire et s'avance sous la véranda. Il commence à se déshabiller.
« Lève les yeux, Ambrose, lève les yeux, pensé-je lorsque je remarque la petite tache noire qui a déteint sur son caleçon bleu. »

Une fois en boxer il plonge dans la piscine, sans voir que j'ai viré au cramoisis.

Je m'avance prudemment à mon tour et m'assois au bord de l'eau, la bouteille de champagne hors de prix presque vide toujours à la main.

Il refait surface et me regarde comme si j'étais idiot.

— Quoi ? demandé-je.

— Bah, t'attend quoi, gros ? À la flotte !

J'écarquille les yeux.

— Oh, non, t'inquiète pas, c'est bon, merci...

Il rit et plaque ses cheveux vert mouillés en arrière.

Il est vachement beau comme ça.

— Allez, fait pas ton gamin ! Viens, l'eau est super bonne en plus.

J'hésite un instant et finis par accepter.

— Bon, d'accord, cédé-je.

Je bois une dernière gorgée et me lève, je me déshabille en vitesse sous son regard inquisiteur et saute dans l'eau.

Ce garçon m'intimide soudainement. C'est la première fois que je me retrouve sur son territoire, et Kyrel est toujours fidèle à lui même, sur de lui, exubérant, extraverti... et puis moi je suis si... si moi, si différent. Il est tout ce que je rêve d'être, tout ce que je ne serais sûrement jamais.

— T'es moins gringalet que t'en as l'air, pouffe Kyrel quand je refais surface.

Je me contente de rougir, gêné.

Pretty boysOù les histoires vivent. Découvrez maintenant