2

388 20 1
                                    

Langage un peu cru, désolé. Donc oreilles chastes, euh, bouchez vous les yeux. 

–––

2 . April shower

Prompt : « Tu seras celui qu'on blâmera pour ça. »

Fumée toxique dans le ciel bleu, le gris de son souffle et de son humeur fait tâche dans l'azur du moment. Il voudrait crier de rage, il voudrait que le temps cesse de mentir. Ça le rend fou, ce soleil qui le nargue et le prend de haut. S'il pouvait, il le ramènerait sur terre, il le piétinerait comme d'autres piétinent sa dignité.

Il inspire, espère laisser une marque indélébile dans ses poumons, recrache avec hargne. Il sait pas pourquoi ça le touche. Il sait pas pourquoi il ne s'en fout pas, il se fout de tout. Mais ça bout dans ses entrailles, ça lui donne les pulsions furieuses de frapper les murs et les os qui entravent son chemin.

La blessure bave et cradasse tout son être. Qui est-il pour lui ouvrir la chaire ? Qui est-il pour se permettre de le faire crever de jalousie et de peine chaque jour ?

Toutes ces meufs, toutes ces poufiasses qui visitent son lit, il ne le cache même pas, il s'en vante, derrière son dos et devant ses yeux. Mais quand il s'agit d'admettre qu'il saute John Murphy, sa langue est moins bravache. Il peut le voir, dans ses pupilles, la culpabilité, la honte, le regret. Il peut lire les ribambelles de remords qui font la ronde dans son être à chaque fois qu'il l'embrasse, à chaque fois qu'il le touche, à chaque fois qu'il le baise contre un mur, discrètement, pour que personne ne sache, que personne ne sache, c'est ça le deal.

Il est pathétique. John Murphy ne couche pas entre deux discussions contre la promesse de ne pas laisser de trace. John Murphy n'accepte pas les baisers passionnés d'une flamme qui préférerait s'éteindre. John Murphy a de l'honneur et il ne peut même pas le griffer ou le mordre de colère. Il ne peut crier son nom que pour l'insulter au détour d'un couloir et ne peut le toucher en public que pour un coup de poing bien placé. Il ne l'a jamais fait. Pas encore. Il devrait. Ça remettrait quelques idées en place. A la place il gémit en silence et il se contente de caresses un peu trop rudes et de respirations sifflantes qui ne disent jamais plus que « Je te hais. ».

Il le hait aussi, pour ce que ça vaut. Il l'a toujours haï, toujours désiré, et maintenant il se retrouve piégé dans ses propres passions torpillées.

Il fait toujours beau, il porte la clope à ses lèvres pour quelques secondes de grisaille. Il faudrait qu'il pleuve, qu'il gronde, pour qu'on s'accorde enfin à son humeur meurtrière. Mais une main s'empare de la cigarette et la laisse tomber à terre.

« J'embrasse pas les mecs qui fument Murph'. »

T'embrasse pas les mecs tout court, il a envie de répliquer, mais il se contente d'un regard meurtrier.

« Va te faire foutre Blake.

– Je pensais qu'on pourrait faire l'inverse. »

Il regarde son sourire moqueur et ses taches de rousseurs qui dansent sur sa peau. Son nez un peu retroussé par ses commissures qui le narguent et ses yeux qui le désirent. Il dirait bien oui. Mais il n'est pas d'humeur à s'écraser.

« Tu diras ça à la blondasse que tu galochais y a dix minutes. »

Bellamy détourne le regard. Ils ne parlent pas de ça habituellement. Ils ne parlent pas tout court, d'ailleurs, si ce n'est pour se provoquer ou s'envoyer chier, pour ce que ça compte.

« On n'est pas exclusif. »

C'est vrai. Il se sent con. Quelques nuages s'invitent à la fête, il se dit qu'ils arrivent un peu tard. Dans quelques minutes il cédera et il sera trop tard pour les cris et la rage.

Mais déjà Blake plonge sur ses lèvres et il se laisse avoir. Il y a quelque chose d'affamé et de coléreux dans leurs baisers, une bataille silencieuse de qui prendra le dessus. Murphy en est sûr, le brun n'embrasse personne comme ça. Mais déjà Bellamy se sépare de lui, à regret, et jette un regard à la ronde. Quand il revient à son amant, celui-ci s'est reculé et esquive le baiser de son ennemi. Aujourd'hui, il se veut intraitable. Pour quelques secondes, puis il abandonnera de nouveau.

« Putain c'est quoi ton problème Murph' ?!

– Mon problème c'est toi merde ! »

Ils n'ont pas crié, il ne faut jamais crier ou on les entendrait. Ils n'ont même pas remarqué que le ciel est devenu noire, il n'y a que l'autre pour attirer leurs foudres. L'ainé enjambe la distance qui les sépare en quelque pas et empoigne son col avec rage :

« Tu fais chier John, il siffle. A dernière nouvelle, ça t'as jamais gêné que j'embrasse des blondes.

– De là à venir te la racler sous mon nez ! cracha le plus jeune. Baise-les tes putes, mais moi j'ai fini d'être ton expérience sur le côté. »

Blake le relâche avec véhémence, pourtant définitivement déstabilisé.

« Je sais pas ce que t'imagine, il déclare avec colère, mais t'as rien d'une expérience. Et à moins que tu te considères comme une putain, je vois pas qui je me taperais d'autre étant donné que ça fait bien un mois que j'ai arrêté de coucher avec d'autres personnes. »

Ça c'était inattendu.

« Mais ça te prend de temps à autres d'en embrasser quand elles passent, pour t'occuper ? »

Blake passa une main dans ses cheveux.

« C'est une longue histoire qui se résume par moi qui fait le con. »

L'histoire de ta vie, mais il ravale son fiel.

« Je peux plus être ton secret Blake. Je me respecte.

– Je sais. Je vais faire un effort. Donne-moi du temps.

– Je te hais, il déclare, et c'est pas totalement vrai, mais il faut qu'il compense son cœur qui s'accélère bêtement.

– Moi aussi. » et dans leur langue, ça veut tout dire.

C'est le moment que le ciel choisit pour déverser ses flots sur le goudron, avec la même violence et la soudaineté que Blake qui fond sur ses lèvres, encore. La pluie tambourine contre le sol avec joie mais ils sont trop occupés à retrouver leur respiration entre deux baisers pour écouter la mélodie. Leurs langues se retrouvent, comme à chaque fois, mais Murphy mord la lèvre du brun avec moins de hargne qu'à son habitude. La main de son aîné retrace son dos, familière mais assoiffée, leurs hanches s'entrechoquent avec enthousiasme. Ils se retrouvent très rapidement trempés mais ils s'en foutent. Le temps n'a vraiment aucun sens du timing.

Les baisers de Bellamy descendent jusqu'à sa nuque tandis que la main de Murphy se perd dans ses boucles. Il se sent vaciller quand son fichu ennemi entreprend de sucer sa clavicule sans hésitation. Il l'oblige à relever la tête et plante son regard glacial dans ses yeux plus noirs que les nuages qui les survolent.

« Si on me demande, il prévient, je mentirais pas Blake. Tu seras le seul à blâmer pour cette saloperie. »

Mais son amant se contente de sourire, putain de sourire désarmant, et l'embrasse, un peu plus tendrement qu'il ne l'embrasse d'habitude avant de reprendre son travail.

Murphy n'est pas dupe, c'est beaucoup de promesses pour un futur incertain. Il sait que ce sera long, chiant. Il sait que ce sont des mots qui sont tombés au sol avec le reste des gouttes d'eau et qu'ils seront lavés par les flots. Peut-être même qu'ils finiront dans le caniveau. Il sait que ce ne sont rien d'autres que des phrases qui ne seront peut-être jamais prouvées. Mais il sait aussi que ces promesses à la con, des mots que sa langue a formulés jusqu'à sa bouche marque sa peau, ce connard de Bellamy les pense.

Un baiser, encore.

« Tu fais chier Blake, il souffle contre ses lèvres.

– Menteur. »

Et pour une fois, il ne le contredit pas. 

30 days to loveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant