10

178 9 2
                                    

10. Feminity

Prompt : « Tu n'aurais pas dû entendre ça. »

Le truc, c'est qu'il aimait les femmes.

Il aimait leurs courbes et leurs formes, il aimait leur poitrine qui se bombait fièrement, il aimait regarder leur démarche paresseuse et leurs hanches qui se déhanchaient lascivement quand elles marchaient ou dansaient contre lui.

Il aimait glisser ses mains dans leur longue chevelure et peigner leur nuque jusqu'à s'égarer dans le creux de leurs reins. Il aimait emmêler leur soigneuse coiffure quand il les aimait pendant une nuit. Il aimait les voir les remonter en chignon ou en queue de cheval avec dextérité, tout comme il adorait quand elles enlevaient leur élastique et que leurs cheveux cascadaient sur leur épaule avec détachement avant de l'embrasser.

Il aimait leurs jambes longues et galbés et celles qui l'étaient moins, il aimait leur ventre doux et soyeux et il aimait le fait que leurs joues étaient toujours rouge.

Il aimait l'ondulation de leur cambrure qui s'emboitait toujours à la perfection avec lui et il aimait leur voix suaves et aigus qui gémissait avec sensualité, la mélodie de leur plaisir qui flattait ces oreilles était quelque chose qu'il ne pouvait s'imaginer un jour se priver.

Oui mais alors, pourquoi donc est-ce que son cœur faisait la valse à mille temps quand il apercevait le regard glacial de Murphy ? Pourquoi donc est-ce qu'il se sentait les jambes faibles et l'âme au précipice quand le sale gamin déhanchait sur la piste de danse des hanches qui n'avaient rien de la rondeur des femmes qu'il aimait tant ? Pourquoi donc avait-il envie d'emboîter son corps contre le sien pour l'embrasser mais pas que, alors qu'il n'avait rien des formes poétiques de celles qu'il étreignait la nuit ?

Bellamy n'en avait aucune idée, et ça lui bouffait les entrailles et ça lui crevait les poumons, lourd comme du plomb dans le crâne. Alors un soir que Murphy dormait et que Bellamy ne pouvait pas en faire de même, il laissa échapper quelques mots, pas très romantiques et pas très bien dit, mais quelques mots, courts et rapide, qui résonnèrent un peu comme une déclaration mais pas totalement. Parce qu'amoureux, il ne l'était pas, d'ailleurs il ne l'avait jamais été. Attiré, ce n'était pas le terme, ce qui l'attirait c'était les seins et les fesses d'une jolie fille qui savait répondre à son sourire. Non, il n'était ni amoureux ni attiré, il était obsédé, il était avide de lui, il était un peu fou, mais pas d'une manière aussi romantique qu'il aurait voulu que ça sonne. Et c'était stupide, parce que leur amour pour les femmes, voilà bien une seule des choses que Murphy et lui partageait.

Le feu s'était éteint après les mots et Bellamy était parti, vertigineux d'avoir prononcé ainsi des syllabes que même son esprit n'avait pas réussi à trouver avant. Il avait le tournis de ressentir, le tournis d'aimer mais pas de cette manière si romantique et si parfaite que les livres lui apprenaient, le tournis de découvrir une nouvelle manière de chérir.

Le tournis de vouloir embrasser un ventre qui serait sûrement rugueux et dur.

Et parce que les mots qu'il avait contés sans réfléchir faisaient le manège dans ses pensées, il avait tendu une main le lendemain, autour du feu où l'on jouait un peu de musique pour réchauffer les âmes et les cœurs. Et parce que les mots qu'il avait contés sans réfléchir s'étaient frayés jusqu'aux tympans de Murphy, il avait accepté la paume et comme les deux imbéciles amoureux des femmes qu'ils étaient, ils s'étaient laissés bercé par une valse maladroite. Ils avaient ignoré les yeux ronds et les remarques graveleuses, esquivant sans mal les mots et l'étonnements, un, deux, trois, sans pour autant perdre les pédales, pédales qu'ils n'étaient pas. C'était tortueux, et Bellamy finit par doucement murmurer dans son oreille qu'il fallait qu'il le laisse mener. Et pourquoi c'est toi qui mènerais, avait chuchoté Murphy, pas trop sûr de pourquoi il chuchotait, et c'était évident ; c'est parce qu'il était plus grand, mais le plus jeune n'était pas d'accord. Une lutte silencieuse et rythmé autours du feu, la chanson était passée et la piste de danse avait été désertée pour profiter du spectacle, mais leurs pieds tentaient tout de même de reprendre le contrôle sans jamais briser leur harmonie flageolante. Et parce que la musique n'était pas adaptée au contexte, parce qu'ils avaient l'air ridicule dans cette valse bordélique et que ce n'était absolument pas le moment pour les dire, Murphy répéta les mots, sûrement parce qu'il n'y avait rien de romantique et de magnifique dans leur signification. Tu n'étais pas censé entendre ça, avait simplement répondu Bellamy et Murphy avait répondu qu'il n'aurait pas dû les dire dans ce cas.

Il n'y avait rien à rajouter et il sembla que le monde n'avait jamais semblé aussi naturel que contre l'autre, et c'était stupide car ce qu'ils aimaient, c'était les femmes. Ils étaient fous, définitivement fous, mais il semblait que la folie n'avait été créé qu'en l'honneur des tournis qu'ils avaient à force de valser autours du feu et Bellamy décida qu'ils pouvaient aimer les femmes et s'étourdir avec Murphy. 

–––

La chanson a changé à la dernière minute, mais Billie Holiday aura son moment de gloire. 

30 days to loveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant