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22. Nourishment

Prompt : « Désolé de t'avoir raccroché au nez. »

Il n'y avait qu'une seule épicerie qui ouvrait ses portes durant la nuit et elle nécessitait trente minutes de voitures. Murphy détestait conduire, il trouvait ça stressant et ennuyeux, et il haïssait d'autant le plus quand il faisait sombre et qu'il était manifestement ivre. Pourtant il passa la cinquième avec un soupir et accéléra pour entrer dans l'autoroute, avant de rejoindre la départementale et s'enfoncer plus tard dans les ruelles sombres de la banlieue. Quand il arriva à la supérette, il acheta un pack de bière, de la farine, du lait, du sucre et des œufs, incertain de ce qu'il y aurait de disponible dans l'appartement. Il rentra chez lui, s'empêchant de songer à la sieste dont il pourrait se régaler plutôt que de cuisiner comme un forcené. Quand il finit les gaufres, aux alentours des cinq heures du mat', il avait eu le temps de dessaouler de ses buveries au bar où il avait trainé toute la journée et son esprit était un peu plus claire.

Son cœur, lui, battait bien trop vite, s'affolant à la pensée de faire face à une personne plus qu'enragée qu'il devrait convaincre de ses excuses.

Il décida que reprendre la bagnole sobre ne pouvait pas être pire que bourré et roula à nouveau, dix minutes cette fois, les gaufres et les bières sur le siège passager.

Quand il arriva devant l'immeuble, il composa le digicode avec appréhension et monta les escaliers au ralentis, le cœur à mille à l'heure.

Arrivé devant la porte, il composa le numéro, les doigts tremblants, la sonnerie s'écoulant avec une lenteur insupportable.

«Qu'est-ce que tu me veux ?

– Parler.

Va te faire foutre.

– S'il te plaît.

Well bite me Daddy. »

Le silence lui apprit qu'il venait de se faire raccrocher au nez. Il fronça les nez, passablement irrité, et décida qu'il l'avait sûrement cherché. Le dernier truc qu'on attend de son mec quand on lui dit qu'on l'aime est définitivement qu'il réponde « Et moi j'aime les gaufres. » avant de se barrer et disparaître des radars pour le reste de la journée. Sa journée, il l'avait passé à boire, trop, et à penser, pas assez. Bien sûre qu'il l'aimait. Sûrement trop, d'ailleurs. Mais tout ça ? C'était trop facile. Indigne de lui, indigne de sa malchance permanente.

Pourtant, il prit son courage à deux mains et toqua. Il avait les clés, bien évidemment, mais la voix au combiné avait confirmé que l'autre n'avait pas plus dormi que lui et il suspectait un coup de poing bien placé s'il s'introduisait dans son appart après les évènements.

« Rentre chez toi Murphy.

– J'ai apporté des bières. »

C'est ce qu'ils faisaient, à chaque dispute, s'apporter des bières. Ils n'étaient pas du genre à s'excuser. Enfin, la voix s'éleva à nouveau :

« Ça peut pas marcher à tous les coups John.

– J'ai fait des gaufres. »

Un silence s'éternisa, puis le bruit du verrou se fit entendre et la porte s'ouvrit, laissant une Ontari aux traits tirés et un regard meurtrier apparaître face à lui. Elle tendit la main pour s'emparer de la nourriture et mordit dans une gaufre avec fatigue avant d'aller s'asseoir sur le canapé. Murphy hésita quelques secondes avant de la suivre et de fermer derrière lui.

« Je suis désolé, il lâcha, et il le pensait.

– C'est nouveau, elle se contenta de ricaner fadement.

– Vraiment. Et je t'aime. »

Ontari émit un gargouillement inexplicable avant de se mettre à tousser, lui informant qu'elle venait de s'étrangler sur sa bouchée. Il ouvrit une des bières contre la table et lui tendit immédiatement mais la jeune femme refusa d'un signe de la main et se dirigea vers la cuisine pour boire à même le lavabo jusqu'à que la quinte de toux s'apaise.

« Murphy, elle soupira au bord du lavabo. On n'annonce pas ça de but en blanc. »

Elle, elle l'avait bien fait. En plein milieu d'un petit déjeuner, alors qu'il avait encore un quartier d'orange dans la bouche pour la faire rire. Mais il jugea risqué de lui rappeler l'incident et se contenta d'envelopper sa taille de ses bras et d'embrasser sa clavicule.

« Si tu me refais ça je t'étrangle, et je le pense, elle déclara avec de l'orage dans la voix.

– J'aime réellement les gaufres, il se contenta de se justifier, la tête sur son épaule. Juste pas autant que toi. »

Mais Ontari se retourna pour lui faire face :

« Disparaître, elle précisa. Ne plus répondre à mes messages. T'es cassé, moi aussi, on gère ça ensemble. Pas dans les bars, elle rajouta en reniflant sa veste en fronçant le nez. Et tu ne me laisses pas croire que t'as peut-être enfin reçu ta dose de karma en te prenant une bagnole dans la tronche. Tu. Réponds. Claire ? »

Murphy se contenta d'hocher la tête doucement, comprenant à quel point sa petite amie avait été inquiète. Il embrassa son crâne avant de la serrer contre elle.

« Je suis désolé de t'avoir raccroché au nez, renifla Ontari, méprisant le goût des excuses sur sa langue. Et je t'aime aussi. »

Les gaufres étaient froides et les bières chaudes, mais ce fut décidément le meilleur casse-croûte qu'ils ne s'était jamais fait. 

–––

Sooo... Je sais qu'Ontari et Murphy ne sont pas canon, si ce n'est une relation plutôt toxique, mais leur sarcasme et comportement est juste trop similaire pour que je ne les ship pas. Surtout depuis que Richard et Rhiannon ont (plus ou moins) confirmé leur relation et passent leur temps à poster des photos ensemble, i mean, seriously, c'était impossible de me demander de me taire plus longtemps. 

30 days to loveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant