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29. May flowers

Clarke dévale les rues, essayant vainement de relever sa jupe pour ne pas s'y emmêler les jambes, manquant à plusieurs moments de trébucher et de rouler jusqu'en bas de la pente. Elle s'en moque, ses côtes brûlent, une lame chauffée à blanc poignarde ses reins, elle sent son coeur cogner plus fort que le bruit de ses chaussures sur le béton, et pourtant elle est incapable de réfléchir à autre chose que le train qui vient d'arriver. La douleur est sourde, elle l'ignore. Entre son poing, une lettre froissée qu'elle a dénichée dans un tiroir de Blake, quand elle a comprit qu'il lui cachait quelque chose. Dans l'autre, le brin de muguet, le tout premier de la saison, qu'elle allait mettre en vase quand elle s'est disputé avec lui. Elle n'est même pas maquillée, elle n'avait pas prévue de sortir. Elle n'est pas non plus très bien habillée, sa chemise s'échappe de sa ceinture, la course décoiffant son chignon qu'elle a finit par défaire. Elle puera la transpiration, mais tant pis.

Les commerçants et passants lui jettent des regards éhontés et surprit, elle fait la sourde oreille aux protestation des promeneurs qu'elle bouscule dans son élan. Une larme s'échappe sous sa paupière et part se perdre dans le vent. Elle tente vainement de contenir les larmes ; elle ne veut pas pleurer quand elle la verra. Elle veut être souriante, belle, inchangée malgré le temps. Malgré le temps et les peines, les mensonges et son mariage.

Clarke est mariée. Elle n'avait pas beaucoup de choix. C'était le mariage ou la déportation ; elle avait accepté des fiançailles maussades avec son ami d'enfance qui tenait à lui fournir un alibi et avait fermé les yeux pour oublier que la bouche qu'elle embrassait sous les yeux leurs familles enchantées était celle d'un homme. Bellamy la traite bien, il est doux et attentionné. Ils savent tous les deux qu'il n'y a aucun romantisme dans leur union, juste la notion de survie, et ils le vivent très bien. Elle se demande ce que Lexa en dira, ce que Lexa en pensera, quand elle saura qu'elle a du faire sa vie.

Lexa, Lexa, Lexa.

Lexa qui ne devrait pas être en vie, Lexa que la milice avait embarqué il y a de ça un an et demie, pour avoir aimer la mauvaise personne. La mauvais personne avait été épargnée, à sa grande surprise, son nom étant resté caché, et Clarke n'avait jamais été inquiétée. Ils la pensaient morte. Ils l'espéraient mortes, mortes plutôt que livrée à dieu quel sort qu'ils réservent à ceux qui défient les lois de Dieu.

Sur la lettre que Bellamy lui a caché par peur qu'elle se mette en danger – il ne croit pas à la paix, pas encore – les mots brouillons de celle qu'elle a aimé sa vie toute entière. Quelques phrases, seulement, floues, imprécises. Elle s'est sauvée, dans un train, elle est partie. S'est perdue. Sur son poignet, un tatouage lui empêchant de demander de l'aide, l'exposant à tout instant à être à nouveau enfermée comme une bête dans des wagons plus petits que leur appartement à Paris. Elle a été recueillie, un certain Lincoln, un homme bon et honnête, qui l'a caché, tout ce temps. Elle ne pouvait pas parler avant, elle répète, elle s'excuse, c'était dangereux, pour elle et pour eux. C'est la fin de la guerre, elle déclare, l'Allemagne ne tardera pas à capituler, elle a griffonné. Je rentre, je serais dans le prochain train. Le temps que la lettre arrive, je serait peut-être déjà là, et tout en bas, la date de son arrivée à la gare du centre-ville.

« Si tu y vas, tu mets Lexa et toi-même en danger, il a protesté. Tu la rejoindras quand on sera sûr que vous ne risquez plus rien. »

Bellamy lui a interdit d'y aller. Bellamy peut aller se faire foutre. La gare, à quelques minutes maintenant, elle y coure, elle ne peut pas la louper. Pas maintenant, pas après un an et demi à avoir attendu. Pas après un an et demie de prières silencieuses et d'espoirs douloureux. Sa Lexa est de retour à la maison. Mai 1944, ils sont libres, mais le monde ne l'est pas encore. Lexa est de retour chez elle. Clarke sent son coeur qui tente de s'échapper de sa poitrine, et elle ne sait pas si c'est à cause de sa course ou parce qu'elle sait qu'elle va la revoir. Elle ne veut pas y croire. C'est trop beau, trop facile, si elle s'arrête pour reprendre son souffle, Lexa pourrait bien avoir disparu.

Quand elle arrive à la gare, la foule qui débarque des quais enveloppe la scène d'un brouhaha chaleureux et la chahut des valises et des embrassades couvrent ses appels. Et pourtant, quand une jeune femme aux cheveux rebelles et châtains descends les marches, vêtue d'un pantalon d'homme et d'une ample chemise, Clarke n'a pas besoin de réfléchir plus d'une seconde pour se précipiter vers elle.

« Lexa ! »

La jeune femme se retourne dans sa direction, immédiatement, et leurs regards se croisent. Lexa n'est pas du genre dramatique ou émotionnelle. Elle est forte, indépendante et combat la vie avec acharnement. Elle ne pleure jamais, sourit beaucoup, et ne laisse rien transparaître. Pourtant, là, sur le quai grondant d'activité, alors que ses pieds touchent enfin le sol français – libre – elle se fige, comme statufiée. Et alors que Clarke enjambe les quelques mètres qui les sépare, elle peut voir la lumière du soleil timide qui joue dans les sillons humides qui se creusent sur les joues de celle qu'elle a attendue tout ce temps. Elle n'hésite pas vraiment, elle jette ses bras autours de son cou, plus frêle qu'à son départ, et la tient là, contre elle, alors que le corps qu'elle a toujours connu droit et plus solide que le roc se secoue de milles sanglots qui tombent sur le quai de la gare et se perdent dans la tumulte. Et peut-être est-ce les pleurs de Lexa qui parle pour elle, peut-être est-ce ses lèvres qui ont un goût de sel et d'antan, peut-être est-ce les nuages qui laissent enfin le soleil parler. Sûrement que c'est le muguet qu'elle tient toujours entre ses doigts et qui promet le début des jours heureux, mais Clarke n'a plus de larmes à retenir ; elle sourit. 

–––

Un peu de Clexa, beaucoup de drame, toujours du love.

J'en profite pour un peu d'auto-promotion (hehe), mais je commence une nouvelle fan-fiction qui peut être trouvé sur mon profil, "The dog days [ are over ]" qui sera un Murphamy et un Jonty, pour ceux que ça intéresse. Le prologue est en ligne, j'adorerais vous y retrouver !

Du love <3

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⏰ Dernière mise à jour : Aug 15, 2019 ⏰

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