HERMES

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J'ai ruminé de longs jours les paroles d'Hestia, un peu piqué dans mon égo. Je déteste que l'on me remette en place encore plus quand ça touche des sujets aussi sensible. Pour me changer les idées, je descends sur Terre. L'ambiance y est plus paisible en ce moment. Les hommes sont occupés à inventer des choses, changer le monde que j'ai toujours connu. On crée des villes plus grandes, on agrandi nos territoires, on méprise des peuples toujours par soif de conquête et d'argent. On pourrait croire que les dieux sont moins utiles et pourtant, nous sommes toujours là, à observer les hommes agir.

Je marche tranquillement dans les rues pavées d'Athènes, quand on attrape mon bras et que l'on me tire dans une ruelle sombre. Toujours armé, je sors mon épée, prêt à riposter et à paralyser mon adversaire. Je me ravise quand je découvre que un visage assez juvénile, quelques restes de mèches blondes et un sourire espiègle.

— Tu me refais un truc comme ça, Hermès et je te jure que je te plante. Je lui lance un regard noir, qui le fait glousser.

— Toujours de bonne humeur, on dirait.

—  Je déteste Athènes.

— Et pourtant, tu passes ta vie ici.

— Sparte est beaucoup trop blindée en ce moment. Des gens en calèche viennent pour y faire des balades, comme si c'était le lieu.

—  Enfin, je ne suis pas là pour avoir une discussion amicale, de toute façon, avec ton humeur de chien, on peut pas avoir de discussion tout court. Il sort de son casque un papyrus. Tiens, c'est de la part d'Apollon. Une invitation urgente à son palais.

Il fallait bien que je m'attende à une confrontation, un jour ou l'autre. L'histoire avec Ethae n'a sûrement pas dû vraiment lui plaire.

— Il était de quelle humeur quand il t'a filé la lettre ?

— Exécrable ! J'ai discuté avec les Muses et elles m'ont dit qu'il est terrible depuis quelques semaines.

— Génial. Je marmonne.

Hermès s'approche de moi et d'un geste amical, tapote sur mon épaule et me dit :

— J'ai été heureux de te revoir, ça faisait un moment.

— Dégages Hermès.

—  D'accord, à bientôt.

Il disparaît aussi vite qu'il est arrivé me laissant seul avec le papyrus dans les mains. Les lettres sont soignées, très belles mais étrangement, je ressens déjà la froideur de ses mots. D'accord, il est vraiment sur les nerfs encore à cause de cette histoire ridicule. Elle n'est même pas morte cette nymphe ! Elle a juste été maudite, ça aurait pu être pire.
La nuit tombée, je pars le rejoindre. Je ne mets pas très longtemps pour me rendre à Délos, l'île de sa résidence principale. Son palais est... à sa hauteur. Très lumineux et volumineux, entouré de magnifique jardins qui pourraient égaler celui des Hespérides, de nombreux bassins et une belle forêt luxuriante. D'habitude, nos rendez vous se passent à Delphes, étant un peu plus reculés. Être ici, comme une visite officielle, très solennelle, ce qui me pétrifie. J'entre facilement dans le palais sous le regard des Muses qui m'observent du coin de l'oeil. C'est pas vraiment la joie ici...
Quand j'arrive dans la pièce principale, Apollon est dos à moi, face à l'océan. A sa tenue très droite, je vois bien qu'il est de mauvais poil.

— Tiens un revenant. Tu es trop honte pour assumer tes actes ? Il commence tout de suite avec un regard noir.

— S'il te plaît, arrêtons de parler de ça. Elle va bien, elle n'est pas morte.

— Non ! Cette fois ci, je vois dans son regard qu'il est furieux. Tu es d'une jalousie presque maladive comme ta mère, comme Aphrodite et regardes où ça a failli nous mener ! Tu as condamné une femme qui n'a rien fait.

— Elle ne voulait qu'une chose : te mettre dans son lit, mais tu as été beaucoup trop naïf pour remarquer quelque chose. Sors un peu de ton monde, Apollon.

— Et toi, arrêtes d'être cynique et mauvais. On dirait que ton cœur est rempli de haine, de venin. La personne jalouse et froide que j'ai eu devant moi au jardin des Hespérides n'est pas la personne que j'aime et que j'ai connu.

Au fond, ce n'est pas le problème même qui a causé ma jalousie. Je sais que notre relation est compliquée, qui doit restée à jamais cachée et je sais qu'il ne supportera pas indéfiniment cette situation et moi non plus. L'amour que nous nous portons est illégal, interdit par les dieux, par l'ordre des choses. Pour l'instant, on prend ce risque mais qui sait dans 100 ans, dans 1000 ans ? Nous avons des besoins, des pulsions et il se lassera de moi, je le sais. Et c'est ce qui me fait peur parce que je suis amoureux de lui. Que même si les choses changent, que le vent tourne, je sais que rien ne pourra me faire oublier tous ces moments.

— Je t'aime.

Quand ces mots ont franchis mes lèvres, Apollon s'arrête de parler et me fixe. C'est la première fois que je le dis aussi sincèrement. Même à la femme que je suis censé aimé, je ne l'ai jamais dit parce qu'au fond, je n'ai pas connu véritable amour. Je l'ai aimé mais pas comme lui. Il a une place spéciale dans mon cœur et ça ne changera pas. L'animosité qu'il y avait au début est totalement retombée à l'annonce de mes quelques mots qui nous ont totalement chamboulé tous les deux. Nos deux corps se collent l'un contre l'autre dans une étreinte pleine de douceur et de passion, rien de sexuel.

—  Redis le. Il a murmuré de sa voix rauque.

— Je t'aime.

— Encore.

— Je t'aime.

C'est comme un pacte que l'on a signé de par ces mots. Devant Ouranos qui nous a offert son plus beau ciel, on s'est lié par un pacte de corps et ces mots. Je lui ai redis des heures et des heures, embrassant chaque partie de son corps pour lui prouver ce je t'aime. Nous sommes l'un contre l'autre, un simple voile cachant nos corps, les yeux rivés sur les étoiles. Aucun de nous veut parler, nous sommes dans une bulle protectrice qui nous entoure. C'est dans ses bras que je suis le mieux et rien au monde ne me fera changer de place.

-— Tu crois qu'on deviendra des constellations un jour ? Il me demande, le regard vers le ciel.

Je me retourne vers lui, surpris de sa phrase. Les dieux deviennent des étoiles quand ils meurent.

—  On ne sera à jamais des étoiles.
—  Les hommes finiront par disparaître, ou ils nous oublieront.
— Pourquoi, tu es si nostalgique ?

Je n'aimais pas voir que mon petit soleil perdre de son éclat, le voir s'assombrir par quelques nuages.

— Parce qu'on dit que rien n'est éternel.

#QARAfic

Quand Arès rencontre ApollonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant