Chapitre 9

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Ridsa – Laisser Couler

[Chicago 2016]

Je n'arrivais pas à croire ce qui était en train de se produire. Ma fille venait d'être prise en otage par ma propre famille qui a le secret espoir - ridicule espoir d'ailleurs - de me faire revenir dans le club. Je ne voulais pas revenir chez les Hell's Riders, je ne voulais pas remettre les pieds en Californie et bien évidemment ... je ne pouvais pas mêler la police à toute cette histoire. D'accord j'avais des problèmes avec eux, mais je ne voulais pas non plus qu'ils finissent dans une prison fédérale pour kidnapping. Accusation qui était, par ailleurs, la plus légère et celle qui ferait le moins de dégât.

L'idée de la peine de prison à vie pour mon père m'avait néanmoins traversé l'esprit et je pouvais l'admettre, cette idée me plaisait bien. Elle me plaisait un peu trop même. Mais je n'étais pas aussi cruelle et puis ce genre de vengeance faisait très impersonnel. Le club allait subir quelque chose de bien pire que la prison à perpétuité.

Mettre les membres du club en prison ne signifiait pas que le club serait dissous. Ce que je cherchais c'était l'anéantissement du club. Sa dissolution totale. Ou même pire. Pour mon père la pire des choses qui pourrait arriver à son club serait ... Ce serait qu'il soit dirigé par une femme. Le cauchemar incarné pour les membres du club qui étaient un peu trop patriarcale. L'idée qu'une femme puisse un jour gouverner les Hell's Riders donnait la nausée à mon père. Il ne l'aurait jamais légué à mon frère Declan qui n'aimait pas assez les femmes. Notre père l'avait découvert le jour où Declan faisait un bain de minuit avec son meilleur ami. Un cliché digne d'un film pour adolescent. Le prochain leader des Hell's Riders n'était sans nul doute que mon très cher et fabuleux ex-mari : Sam. Je le haïssais tellement. La rage que je ressentais à son égard n'était rien comparé à ce que j'allais lui faire endurer.

Je ne comprenais pas. Enfin ... je pense que je ne voulais pas comprendre. Mais je savais que cacher la naissance de Sofia à son père était mal. Je n'avais pas eu le choix à l'époque. Sam était encore beaucoup trop sous l'influence néfaste de mon paternel. Même si je n'avais pas fait de très bons choix de vie jusqu'à la naissance de Sofia, je savais que la cacher de son père était la seule solution.

A l'époque je voyais une vie beaucoup plus facile pour ma fille. Facile dans le sens où elle n'aurait pas eu à souffrir de et pour mes erreurs passées. Et pourtant, aujourd'hui, Sofia était dans l'antre du démon. Démon que j'avais fait rentrer dans sa vie malgré tout ce que je m'étais promis.

Je pris ma voiture en direction de l'aéroport pour prendre le premier avion qui partirait pour la cité des anges. Nom assez ironique quand on savait quel genre de personne habité là-bas.

« Et dire que je ne voulais plus jamais mettre les pieds en Californie, »pensais-je à mon grand désespoir, les fesses posées inconfortablement dans mon siège d'un avion low coast en direction de LAX. Mon temps de trajet était de 3h49. Certes c'était long mais ça aurait été de l'ordre du 35h si j'avais pris la voiture. Et puis, faire trois milles kilomètres en voiture c'était plutôt long. Donc l'avion restait la meilleure option.

J'avais donc presque 4h à tuer. Le temps à bord de l'avion passait à une lenteur phénoménale. Je cru qu'il durait une éternité. Et évidement, sur ce vol low coast, il n'y avait pas de quoi se divertir. Et de plus, comme c'était du dernier moment, je n'avais rien pris pour m'occuper. Je me retrouvais donc en tête à tête avec moi-même, assise à côté d'un homme qui grignotait des chip si bruyamment que les vaches texanes pouvaient l'entendre.

Déjà une heure et demi que j'étais dans cet avion et j'avais passé mon temps à déblatérer avec la vache texane sur les mille et une façons de faire un poulet rôtis correcte. C'était les quatre-vingt-dix minutes les plus exaspérantes de ma vie et j'en avais vécu des minutes exaspérantes dans ma vie mais des comme celle-ci ... jamais.

L'avion venait d'atterrir à Los Angeles. Ce fut à la fois un grand soulagement et un pic d'adrénaline pur : les choses sérieuses allaient enfin commencer. Je n'avais pris aucun bagage alors la sortie aller être rapide. Le plus difficile allait être de trouver un taxi en pleine heure de pointe. Ce que je pouvais détester cette région.

En arrivant sur le parvis de l'aéroport, à ma droite, se trouvait une longue ligne interminable de taxis jaunes et bleus ciel suivit d'une longue et encore plus interminable ligne de touristes armés de valises et de bagage en tout genre prêt à bondir dans un taxi à la moindre occasion tel des mouettes se ruant sur un poisson.

En tournant ma tête vers la gauche, j'aperçue un visage familier. Un visage que je n'aurai jamais cru voir à Los Angeles. Le visage si doux, si pur et pourtant si marqué par la vie : Lana.

« C'est étrange de te voir si loin de New-York ma chère Lana, déclarais-je.

- Je suis là pour t'aider Nora. Pour t'aider à récupérer ta fille qui est aussi ma filleule, expliqua Lana.

- Comment tu as su ? demandais-je alors.

- Et bien, je sais toujours tout ... mais pour faire court ... les Hell's Riders sont très voire trop bruyant.

- Ce sont des hommes ... confirmais-je, ils sont tous bruyant. »

Nous éclatâmes de rire. Cela me faisait un bien fou d'enfin avoir le luxe et le privilège de pouvoir rire aux éclats à nouveau. La dernière fois que j'avais ris comme cela, c'était au côté de ma fille, avec Lana, Kara et Gigi. Ce temps me manquait terriblement. Un temps sans le club, sans mon père. Une époque avec ma famille, ma véritable famille. Les liens du sang n'avaient aucune importance à mes yeux. Les seuls liens qui comptaient été ceux que j'avais construit durant ces dernières années. Pourtant ces dernières années n'auraient rien eus d'extraordinaires sans cette famille.

Pour une fois que ma vie n'était pas basée simplement sur des mensonges ou plus souvent de l'hypocrisie. Je n'avais plus besoin de me cacher, je n'avais plus besoin de fuir. Quand le fondement de la vie se résumait à vivre, à se libérer des pressions, à se libérer de nos chaines, je ne faisais que survivre une fois de plus. Mais cette fois-ci il était hors de question que j'entraine Sofia dans ma chute, ou qui que ce soit d'autre d'ailleurs. 

Cette fois-ci, j'allais me battre pour ma liberté.

Cette fois-ci j'allais me battre pour vivre.

Blooming Thunderstorm (Français)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant