Chapitre 14

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— Lahna ! crie Amaralia en sautant dans ses bras.

Même pas une seconde qu'ils viennent tout juste d'arriver, et l'accueil quand on offre à Lahna est tout aussi chaleureux. Elle rigole légèrement en caressant les cheveux de sa petite sœur et part dire bonjour aux autres membres de la famille, exceptée sa mère.

Elle revient à côté de Kader et le roi s'exprime de bon cœur :

— Tu me sembles de bonne humeur, Lahna ! Enfin, il y a un truc qui a changé sur toi.

Elle se met à tourner sur elle-même avec un sourire rayonnant.

— Je pense que retrouver la chaleur aride m'a énormément manqué, et cela grâce à Kader, répond-t-elle.

Elle touche le bras du sorcier et ignore la décharge que cela lui a procuré.

Après quelques minutes, elle suit sa mère et ses sœurs dans le jardin d'hiver. Un courant d'air lui fait rappeler l'ancienne vie qu'elle menait ici, c'est-à-dire dans le froid, dans la tristesse et dans la solitude. Elle se frotte le bras pour se réchauffer et s'assoit sur une chaise en face de sa mère.

Sans demander la permission, elle se sert des petits biscuits et d'un thé chaud. Son regard ne s'attarde pas sur le bureau du roi, où elle peut voir les silhouettes de son beau-père et celle de Kader. À cet instant même, elle veut savoir ce qu'il se passe entre les deux hommes. Que parlent-ils ? Cachent-ils un secret ?

— Kader, m'a tout raconté. Pourquoi ne m'avoir pas dit que tu avais perdu tes pouvoirs pendant presque dix ans ?

Elle reporte son attention sur sa mère.

Kader a tout raconté, sans l'avoir prévenu ?

Bizarrement, elle n'est pas surprise et mange en entier un biscuit devant la mine ahurie de Lysandra.

— Parce que je sais que vous allez me critiquer du genre « ma de fille est devenue une sorcière déchue » ou « j'ai honte d'avoir mis au monde une fille humaine ». Mais je vous assure, je ne suis plus humaine, j'ai retrouvé la capacité de mes pouvoirs !

Pour prouver ses propos, elle lance un sort et fait exploser la théière au centre de la table. Ses sœurs reculent de stupéfaction.

Lahna, avec une mine impassible continue de manger ses friandises.

Sa mère pousse un soupir et fait réparer la théière avec un sortilège.

– Lahna, il fallait me le dire plutôt. Je pourrai t'aider. Une sorcière ne peut pas perdre ses pouvoirs ainsi...

– Maintenant vous voulez faire ça avec moi ? coupe-t-elle avec un sourcil haussé.

Bouillante de rage, elle écrase dans sa main le biscuit et foudroie du regard sa mère.

– Ne me croyez pas si bête à ce point. Après des années de tensions entre nous, vous voulez jouer au gentille maman attentionnée avec moi ?

– Lahna...

Elle rit jaune et se redresse sur sa chaise. Elle fait signe à ses sœurs de partir. Une fois qu'elles sont seules, elle crache :

– Je n'aime pas les gens hypocrites ! Qu'est-ce que vous avez en tête ?

La reine se redresse à son tour, la mine dure.

– Je ne joue pas avec toi, Lahna ! Entre nous, c'est toi l'hypocrite ! Tu arrives ici sur tes grands airs avec un sourire ravageur, comme si tu étais envoyé chez nous pour briser notre bulle de joie, et ensuite tu joues à la petite pitié.

Outrée, elle ouvre grande la bouche.

– Je n'ai jamais eu l'intention de briser ton bonheur. Bon au départ, je haïssais Asteria et Amaralia ainsi qu'Erwan, mais je n'ai jamais eu l'envie de les briser, voyons ! s'emporte-t-elle les sourcils froncés. Si je suis venue ici, c'est pour te retrouver et retrouver l'amour maternel.

Après ces mots, un silence plane entre elles. Lahna, enragée qu'on met la faute sur elle, préfère de regarder le buisson que sa mère. Elle n'avait jamais eu l'idée de briser le bonheur de sa mère. Elle voulait une seule chose : être de nouveau aimer par sa mère.

– Mais tu ne pouvais pas arriver comme ça, je n'avais rien dit à Erwan à ton sujet, s'exclame la reine après un long silence.

– Et dire que tu es la première personne à détester le mensonge, ironise-t-elle. Je ne voulais pas rester avec les sœurs sataniques, les femmes que tu prétendais bonne pour mon éducation. Elles n'ont pas allé de la main la moins forte...

Elle reporte son attention sur sa mère.

— Je voulais une seule chose à ce moment là : partir d'ici. J'ai dû faire beaucoup de sacrifices, comme laisser mes seules amies là-bas et Félix, le hibou que tu m'avais offert à mes cinq ans. J'ai dû utiliser tout mon énergie pour ouvrir les grandes portes du couvent et de me téléporter  aux États-Unis, raconte-t-elle avec amertume. Une fois arrivée ici, je me suis retrouvé en Utah et une sorcière m'a aidé. C'est à partir de là que j'ai perdu mes pouvoirs. J'ai... j'ai trop utilisé ma magie, ce sont les portes du couvent qui m'ont épuisé. J'ai fait tout cela pour toi, et voilà ce que je gagne à la fin : l'ignorance.

Elle secoue sa tête et quitte l'endroit. La faire souvenir de son parcours est si poignante pour elle. Comment regarder sa mère après cette confession ?

La Captive De Kader Où les histoires vivent. Découvrez maintenant