13 - LE CYCLE DU MONSTRE

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« On va rester ici encore combien de temps ? Demanda Guénolé entre deux bâillements.

- Tu le fais exprès ou quoi ? Si tu te fatigues aussi vite, ce n'était vraiment pas la peine de m'accompagner, répondit Bill d'un ton excédé.

Depuis de longues minutes, les deux garçons étaient cachés sous les massifs d'hortensia qui entouraient une magnifique demeure blanche de plusieurs étages. Tout en eux, de leur dégaine à leurs vêtements, les rendait totalement indésirables dans le paysage idyllique des fleurs et des murs rutilants, mais de là, ils avaient une vue imprenable sur la rue qui menait au cirque. Ils observaient Alice faire les cents pas à quelques mètres de leur cachette. Elle allait et venait sans discontinuer depuis une heure, en se rongeant les ongles d'impatience.

Guénolé incarnait son contraire, il ne bougeait plus d'un millimètre et s'ennuyait à mourir.

- Tu crois qu'elle va revenir ? Demanda-t-il.

- Aucune idée. Si Alice n'avait pas été là, on aurait pu la suivre. Qui sait ce qu'elle peut manigancer.

Bill s'était mis dans en tête d'espionner Laurasia dans ses moindres faits et gestes. Il y pensait depuis leur confrontation. Il était convaincu de sa culpabilité quant au meurtre du jeune riche et à la disparition de Léni. Selon lui, cela faisait trop de coïncidences pour qu'elle soit étrangère à tous ces événements. Il lui fallait juste une preuve. Alice se trompait sur son compte, il en était convaincu.

- Je ne vois pas pourquoi tu veux faire ça. Si c'est vraiment elle la coupable, qu'est-ce qu'on peut y faire ? Elle nous arrachera la tête.

- On pourra la dénoncer ! Prouver à Alice qu'elle ne devrait pas lui faire confiance ! Tout le village serait avec nous.

Bill ne s'était jamais senti aussi déterminé. Son meilleur ami avait disparu sans laisser de traces, lui qui était si rusé et débrouillard, ce n'était pas son genre. Bien sûr, il avait été surpris d'apprendre qu'il voulait rejoindre la troupe du cirque. Mais il devait avoir ses raisons, et il ne serait pas parti sans lui dire au revoir.

- Tu crois vraiment que c'est elle la responsable ? L'interrogea Guénolé, d'un ton timide.

Lui aussi vivait mal la disparition de Léni, mais il était moins catégorique. Bill lui jeta un regard si sévère que son ami s'enfonça dans le sol.

- Tu as la mémoire courte. Elle a failli nous tuer ! Et si tu avais vu le corps du...

Le haut le cœur qui lui remonta le long de la gorge lui coupa la parole. L'image du cadavre avait hanté ses pensées toute la nuit.

- ... si tu l'avais vu, tu comprendrais que c'est forcément son œuvre. Personne de normal ne peut faire ça.

- Mais Alice a dit...

- Je sais ce qu'elle a dit, s'énerva Bill.

Il était en colère contre Alice. Elle avait accordé sa confiance à la thérianthrope si facilement, cela ne lui ressemblait pas.

- Elle a tort, trancha-t-il sans plus de cérémonie. Ce n'est pas la première fois qu'elle se trompe, mais cette fois, c'est notre vie qui est en jeu. Cette fille est un monstre ! Tu ne trouves pas ça étrange que – comme par hasard – Léni ait disparu juste après avoir piqué ses affaires ?

- Peut-être, mais à nous, elle n'a rien fait. Et pourquoi aurait-elle tué ce petit garçon ?

Bill se mordit la lèvre.

- Léni a pris des extras, tu le sais. Il l'a payé cher. Et je ne serais pas étonné qu'elle ait tué ce môme pour créer une diversion.

Guénolé pâlit. L'idée que son ami soit dans le vrai semblait le terrifier.

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