Humain ou inhumain, telle est la question

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Les hommes de l'église me suivaient.

S'ils se croyaient discrets c'est raté. Bien qu'habillés en civil ils avaient tout des anciens soldats : le physique, la droiture, le regard.

La méfiance.

À peine sorti de l'église je les avais vu. J'avais alors mine de rien accéléré le pas, accompagné de ma mère, inconsciente de la situation.

Qui étaient-ils ? Des policiers ? Des agents spéciaux ?

Des tueurs ?

Non, ça c'est de la paranoïa, reprends-toi Samael.

Mais leur présence me frustrait, m'excitait. Je les sentais, qui étaient-ils ?

-Maman...dis-je soudain. Continue sans moi j'ai un truc à faire.

Ma mère acquiesça, surprise mais compréhensive. Je la regardai s'éloigner, sentant les hommes approcher. Je fis mine de m'intéresser à la vitrine voisine, observant mon reflet du même coup.

Qui éclata de rire :

-Regarde toi enfin ! Apeuré par deux gars dont tu ignores tout ! C'est pathétique.

-La ferme...sifflai-je à cet arrogant Moi.

-Non mais sérieusement. Qu'attend-tu pour leur faire face ?

Je me détournai et observai les arrivants avec toute la froideur dont je suis capable.

Autant dire beaucoup.

Les deux hommes tournèrent les talons et disparurent dans une ruelle.

Un peu étonné, je m'approchai de la ruelle en question, mince couloir insalubre se terminant en cul-de-sac.

Personne.

Où étaient-ils passés ?

Méfiant et perplexe, j'entre dans la ruelle très doucement.

Ce n'est pas possible de disparaître comme...

Quelqu'un me tomba dessus.

Je poussai un cri, écrasé au sol par une masse humaine dont j'ignorais tout.

Je relevai la tête et vit l'un des hommes qui me décocha une droite monumentale. Sonné, je vis danser des étoiles. L'un des deux s'approcha et posa la pointe d'un flingue sur ma tête.

-Dis-nous tout petit. Qui es-tu, de quelle race, et combien de personnes as-tu tué?

L'autre s'assit sur mon dos avec un sourire satisfait. Je grognai, sans comprendre.

L'homme au flingue retira la sécurité. Tout mon corps se tendit.

-Je ne vois pas de quoi vous parlez ! hurlai-je, plus furieux que paniqué.

-Pitié...lâcha l'homme sur mon dos. On sait reconnaître un Hôte du Purgatoire lorsqu'on en voit un !

-T'as tout d'un monstre mon gars ! ricana l'autre avec indifférence.

Je serrai les dents.

-Je ne suis pas un monstre.

Pourquoi l'Homme avait-il tant de mal à l'assimiler !

L'homme au flingue eut une moue agacée.

-Eh bien ! Tu refuses de l'avouer ? On vérifiera sur ton cadavre dans ce cas !

Je vis rouge. Je levai le regard extrêmement rapidement vers lui, le faisant tressaillir.

Ils voulaient voir le monstre ? Soit. Assez joué.

D'un brutal mouvement de reins je désarçonnait mon agresseur. L'autre voulut tirer mais tournant sur moi-même au sol je lui décrochai un coup dans le tibia qui le déséquilibra et le fit tomber à genoux devant moi. Je me relevai et le frappai du pied à la tête. Sonné il tomba et je me mis à le battre en un jouissif sentiment de puissance.

Quelque chose s'enserra autour de ma gorge.

L'autre homme en avait profité pour m'étrangler avec un fil de fer. Étouffant, je me mis à ruer et donner des coups vers l'arrière en grognant, mais il tint bon. Je commençais à perdre mon souffle quand quelqu'un hurla "Eh ! Vous !" à l'entrée de la ruelle. Mon assaillant fit volte face, puis dégagea mon cou, me permettant de respirer. Il fonça sur l'homme, le bouscula puis s'enfuit. Je tombai au sol, respirant à grandes bouffées.

L'arrivant approcha. C'était un policier, qui tremblant avait sorti son arme. Il hésitait entre la pointer vers moi ou l'homme au sol, inconscient.

Il me choisit.

-Debout ! Vous êtes en état d'arrestation !

Je le regardai.

Je me sentais à nouveau vide.

-C'est moi qui ai été agressé !

-Ah oui ? Et lui alors !

Il désigna l'autre homme. Je me détournai et horrifié m'aperçus qu'il baignait dans une petite flaque de sang, sérieusement amoché.

J'avais fait ça ?

Encore ?

L'absurdité de la situation me parvint :

Je ne m'étais jamais battu, pourtant je venais de mettre au tapis deux hommes.

Sans armes.

Au final, j'étais peut-être bien un monstre.

Un monstre sadique avec un vide à la place du coeur.

Le Diable au Cœur - 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant