Chapitre 29

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Après une dizaine de minutes, Rousseau sort de l'ascenseur en trombe. Elle pourrait tuer avec ses yeux. Plus tôt, j'avais parié avec Maggie une somme de dix dollars qu'Éliane allait se faire virer. Ma collègue, elle, a parié qu'elle allait être rétrogradée. Éliane se dirige vers son bureau, un peu plus loin du mien, et range ses affaires dans une boîte. Maggie fouille dans son sac et en ressors un billet de dix dollars. Avec satisfaction, je l'attrape. Un gars va vers elle et lui demande ce qu'il s'est passé.

-J'AI DÛ QUITTER MON POSTE! hurle-t-elle en gesticulant.
-Tu t'es faite renvoyée? lui demande une collègue.
-Non! Je vais être.. concierge..., dit-elle en retenant un vomissement.

Mes yeux s'agrandissent. J'y crois pas! Je redonne l'argent à Maggie avec un dix dollars de plus.

-C'est..., je commence.
-Incroyable! complète-elle.

Nous nous esclaffons.

-TOI! s'exclame Éliane en se dirigeant vers moi.

Je la fixe s'approcher sans rien ajouter.

-Tu t'es plainte auprès du boss, hein? C'est de ta faute si je suis concierge!
-Éliane, Éliane, Éliane, dis-je en me levant pour être à sa hauteur, Anderson t'a averti, mais tu as continué. Tu es comme une gosse qui doit être punie pour son attitude de merde. Je te souhaites de t'amuser à nettoyer les cuvettes des toilettes.

Puis, elle prend un mouvement de recule. Elle ne va pas me frapper quand même? Si? Je ne la lâche pas des yeux. Je ressens les choses comme au ralentit.. Je me concentre du plus profond de mon être. Je me sens comme connectée à quelque chose que je ne connais pas encore.

-Non, dis-je.

Soudain, Éliane est arrêtée dans son élan: son poing excessivement près de ma joue. Je vois qu'elle serre les dents.

-Prends tes affaires et va au sous-sol. Concierge.

Sans rien dire de plus, elle prend sa boîte, puis monte dans l'ascenseur. Quand tout le monde est sûr qu'elle est partie, des rire éclatent et j'entends Maggie soupirer.

-Il était temps qu'elle parte! dit-elle en riant.

J'acquiesce son propos. Depuis quand suis-je capable de contrôler les autres? Je ne me souvenais plus que les Sirènes ont ce pouvoir. Et quand je fais quelque chose de génial, Charles n'est pas là pour le voir!

Après une dizaine de minutes, les employés retournent à leur travail. Le restant de la journée se déroule calmement.. quoique plusieurs de mes collègues me félicitent pour mes fiançailles et pour ma répartie envers Éliane Rousseau. Cette fille-là, je n'aurais pas de problème à lui percer les tympans avec mon cri. Si seulement je pouvais la rendre muette...
Le soir venu, je finalise un dossier avant de fermer mon ordinateur. Tout le monde est parti chez soi. Je regarde l'heure; 22h53. Évidemment, je dois attendre Anderson.. Mais que fait-il? Je l'attends pendant quinze minutes, mais il ne vient pas me rejoindre devant les portes de sortie. Tant pis, je pars sans. À cette pensée, Charles apparaît devant moi en souriant.

-T'aurais dû me dire qu'il fallait que je pense cela pour que tu viennes. Je t'attendais depuis un moment.
-Allez, répond-t-il en ouvrant la porte vitrée devant moi.

Je passe en première, puis il m'emboîte le pas. Il est déjà tard, mais la circulation est dense. Ça fait si longtemps que je n'aie pas sorti dans un bar avec mes amis ou dans une boîte de nuit.

-Parle-m'en pas. Avec tous ces hommes qui te tourneraient autour.. Il y aura des morts.

Je le dévisage.

-Tu ne me ferais pas assez confiance? je demande.
-Pas dans ce sens-là. Les vampires sont des créatures très possessives. Si un autre homme que moi te touchait, ma jalousie et ma possessivité prendraient le dessus. Je n'y peux rien.
-Y a-t-il autres choses que tu me caches par rapport aux vampires?
-Si oui, je te le dirai.

Je continue de marcher en fixant mes pieds. Je suis toujours en colère contre lui et je ne veux pas lui donner l'impression que je lui aie tout pardonné. Je l'entends soupirer d'exaspération. S'il considère ma colère envers lui ainsi, son calvaire est loin de se terminer.

-Dis-moi.

Je lève les yeux vers lui. Nous embarquons dans sa voiture, puis démarre le moteur.

-Te dire quoi?
-Ce qui ne va pas.
-Tu es censé le savoir.

Il me fixe quelques secondes.

-Eh bien, non, je ne sais pas. C'est pour ça que je te demande de me le dire.
-Creuse tes méninges. Tu es supposé savoir ce que j'ai en tête, non?

Son expression s'assombrit et je sais que je suis sur une corde raide avec ses émotions.

-OK.. Euh, j'ai..
-Je sais que tu as rétrogradé Éliane, je le coupe. Charles, tu es censé me connaitre, alors dis-moi.. tu n'as une petite idée du pourquoi que je suis en colère?

Ses yeux ne quittent pas la route.

-Oh, tu parles par rapport à plus tôt? Avec notre mariage?
-Alléluia! crie-je dans ma tête.
-Pourquoi es-tu fâchée? Je croyais que c'était réglé!
-Charles, quand une femme quitte une pièce en claquant la porte, c'est qu'elle est encore fâchée et ce, jusqu'à ce que tu lui dises ce qu'elle veut entendre. Prend des notes.
-Que veux-tu que je te dise? pose-t-il, énervé.

Je me retiens de rire. Bon sang, il n'a rien compris.

-Ça, c'est à toi de le deviner. Et tu n'as pas deux chances.

Son irritation frôle ma peau. Je joue assez avec le feu.. Pour le reste de la route, je ne lui adresse plus la parole.

Arrivés chez nous, je suis la première à descendre de la voiture. Anderson m'emboîte le pas.

-Meghan! m'interpelle-t-il.

Sans l'attendre, j'ouvre la large porte de l'entrée, puis m'engouffre dans le bâtiment.

-Eh! J'ai pas fini! dit-il en m'emboîtant le pas.
-Moi, si.

Une fois dans l'appartement, je claque la porte de la salle de bain et me coule un bain chaud. Cette journée m'a épuisée. Et Charles m'épuise encore. C'est incroyable de ne pas avoir la moindre idée de ce que j'attends. Pourtant, ce n'est pas si impensable! Seulement trois petits mots... S'il pouvait ravaler son ego et juste le dire.

Le reste de la soirée, je ne lui adresse plus un mot et m'endors dos à lui. Je me demande quand va-t-il comprendre..

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