II) Cauchemar

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Après avoir été larguée, ma vie a pris une tournure un peu différente, mais pour le coup, moins monotone. Cela faisait maintenant deux semaines que je tentais de l'oublier. Je n'y parvenais pas en le croisant tous les jours.

Vingt deux septembre. Je me lève comme a mon habitude, croisant Inès, ma mère et mon père dans la cuisine. Je bois mon café comme à mon habitude. Je m'habille comme à mon habitude. Je m'apprête à partir quand une soudaine envie de vomir me prend. Je n'ai pas mis longtemps à arriver jusqu'au toilettes. Ma mère, qui sait que je suis très rarement malade, viens toquer à la porte:

-Paloma ! Qu'est ce qui se passe? T'es malade?

J'ouvris la porte.

-Je sais pas ce qu'il m'arrive maman, j'ai tout le temps mal à la tête, je vomis...

-Ça doit être l'effet de la rupture. Il faut que tu passes à autre chose.

Le mot « rupture » me provoqua une deuxième giclée. J'entendis ensuite Inès gueuler de la salle à manger:

-Ahhh! Paloma elle vomit maman c'est degueuuu!

-Bon Inès ne te mêle pas de ça, vas déjeuner, lui répondît ma mère. Ce fut au tour de mon père d'entrer en piste:

-Oh Paloma mais qu'est ce que je t'avais dit ! Le café n'est pas conseillé à ton âge, ça provoque des vomissements!

-Mais t'es con, c'est pas le café! lui repondit ma mère dare-dare, et de toute façon on est en retard! Allez Paloma sors des toilettes, on y va.

Vingt minutes plus tard, nous nous mettons en route pour le lycée. Alors que je m'apprêtais à sortir de la voiture maternelle, ma mère m'attrapa par le bras et me demanda:

-Tu es sure que tu es malade?

-Ch'sais pas maman, en tous cas c'est pas en me demandant ça que ça va s'arranger...répondis je en me débattant, allez j'y vais à ce soir.

Après être descendue de la voiture, je retrouvais Pauline comme à mon habitude dans la cour du lycée.

-Hé Ben, t'en fais une tête! Qu'est ce qu'il y'a ma poule ? me questionna Pauline.

-Ben rien, je sais pas ce que j'ai, j'ai tout le temps la gerbe...

Pauline prit un air sérieux:

-Je veux pas t'affoler mais si on vomit alors que l'on est pas malade y'a pas 36 solutions, t'es enceinte !

-N'importe quoi, pouffai-je, comment ça se pourrait d'abord ?

-Ben, quand t'as passé la nuit avec Jules, vous aviez des préservatifs?

-Justement j'crois pas...répondis je en regardant autour de moi pour que personne ne surprenne cette conversation.

-J'pense que tu devrais faire un test de grossesse quand même on sait jamais...

-Mouais, chais pas.

La sonnerie retentit. Pendant la journée, j'ai réfléchi à ce que Pauline m'avait dit, et finalement même si le résultat me faisait peur, je devais faire un test pour être sûre. A la sortie des cours, Pauline et moi avons couru à la pharmacie. Je me suis approchée du comptoir:

-Un test de grossesse s'il vous plait, demandai-je, assez gênée.

Après m'avoir regardé d'un drôle d'œil, la pharmacienne me tendit un petit sac en papier, avec l'objet dedans. Mais qu'est ce que j'étais en train de faire ? J'étais en train d'acheter un test de grossesse alors que je n'ai que 15 ans: c'est du délire. En sortant de la pharmacie, Pauline et moi nous séparons, pour rentrer chez nous. Il était 18 heures 30 et j'allais encore me faire engueuler par mes parents!
A peine j'ai tourné la poignée de la porte d'entrée que mon père se jeta sur moi, car il avait vu mes dernières notes en maths, qui étaient vraiment catastrophiques je dois l'avouer.

-Alors, tu peux m'expliquer ces notes? piailla mon père en brandissant mes copies devant moi.

Pour échapper aux reproches du paternel, je courrais dans la salle de bains, pour faire mon test. Qu'est ce que je m'en foutais des notes, j'avais quelque chose de plus important à vérifier.

-PALOMA! J'ai pas fini, reviens ici! S'époumona mon père depuis le couloir.

Enfermée dans la salle de bains à double tour, je m'empressais de faire le test. Une fois terminé, je ne pus me résoudre à le regarder. La boule au ventre, je ne pouvais plus faire machine arrière.

Positif. P-o-s-i-t-i-f. POSITIF.
Le test était positif. Mon cœur se décomposa, et je me mis à trembler d'angoisse. Comment est ce que j'allais faire ? J'envoyais alors un sms à Pauline pour avoir ses conseils:

Chuis enceinte, qu'est ce que j'vais faire ?!

Mes mains tremblaient tellement que j'en fis tomber mon iPod par terre. La réponse de Pauline ne se fit pas attendre:

Oh merde... On ira au planning demain : tu peux t'faire avorter ! j' connais l'adresse t'inquiète pas! Bisous

Au planning familial. Mais qu'est ce que je dirais à la secrétaire? Que je suis enceinte à 15 ans et que je veux avorter comme ça en un claquement de doigts? Tout ça c'était la faute de cet enfoiré de Jules. Il m'a mise en cloque et venait de me plaquer.
J'me détestais.

Cette nuit la, je n'ai pas dormi. Après une soirée horrible à me faire engueuler par mon père, un tas de reproches de ma mère et cerise sur le gâteau, ma grossesse, cela ne pouvait pas être pire. Je regrettais l'époque où j'étais une ado normale, sans histoires.
J'ai vraiment été trop conne. J'aurais bien aimé me dire que c'était  juste un cauchemar.

Le lendemain, je rejoignais Pauline pour aller au planning familial. Devant l'entrée, Pauline me dit:

-J' t'attends à la sortie.

J'entrais ensuite dans le premier bureau disponible, avec à l'intérieur une femme blonde, la cinquantaine, et plutôt étonnée de me voir débarquer. Je lui tendis le test de grossesse.

-Je voudrais avorter s'il vous plaît.

-Vous avez fait votre échographie?

-Non pas encore.

-On va vous en faire une alors. Suivez moi.

La dame m'emmena dans une salle spécialisée pour les échographies. Elle me mit un gel visqueux bizarre sur le ventre et me passa ensuite l'espèce de stéthoscope. Curieuse, je regardais l'écran d'ordinateur pour regarder. Mais qu'est ce qui me prenait ? J'en avais rien à faire après tout, c'était à cause de lui que j'en suis là ! De toute façon, on ne voyait rien, si ce n'est qu'un petit haricot dans cet écran d'ordinateur si grand. Voilà ce que c'était pour moi: un haricot. Soudain la dame mit une main devant sa bouche, et prit une mine grave. Oh non qu'est ce qui allait encore m'arriver ?

-Qu'est ce qui y'a ? demandais je.

-Vous ne pouvez pas avorter mademoiselle, c'est trop tard!

-Comment ça trop tard ? vociférais-je.

-Vous êtes à plus de seize semaines mademoiselle...Je suis vraiment désolée.

Mon visage se décomposa, cette fois ci, et une larme roula sur ma joue. Je me mis à pleurer. J'étais coincée.

Maman trop tôtOù les histoires vivent. Découvrez maintenant