Chapitre 1

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— Le frigo est vide. Je vais aller faire les courses. Tu as besoin de quelque chose ?

Son regard triste et avide se pose sur moi et elle me sourit faiblement. Parfois j'ai l'impression d'être la cause de tous ces malheurs, dont l'un est le départ de mon père.

— Bié wangle chī yào ( n'oublies pas de prendre tes médicaments )

Ma mère est malade, elle souffre et ça me déchire le coeur. J'essaye de lui rendre le sourire, de l'amuser un peu... mais en vain. Elle a toujours des larmes au coin de ses yeux verts. Je ne l'ai jamais vu sourire ! On dirait une personne condamnée à vivre dans la douleur et la souffrance.

— Tu ne vas pas travailler aujourd'hui ? me demande-t-elle.

— Non ! Monsieur Johns m'a accordé cette journée pour m'occuper de toi.

Je me dirige vers la porte quand ma mère se lève et croise les bras.

— Ni duìdài wǒ jiù xiàng yigè cuiruò de wàwà ( tu me traites comme une poupée fragile), dit-elle.

— À mes yeux, tu l'es.

Je sors de la maison et je prends mon vélo pour aller au supermarché. Je n'aime pas parler aussi durement à ma mère mais des fois, j'ai juste envie de me défouler un peu. Je donnerai n'importe quoi pour son bonheur !

J'arrive sur les lieux et je traverse plusieurs rayons. À cette heure du matin, il n'y a presque personne ici. Je remplis petit à petit mon panier en choisissant des aliments pour prendre un bon petit déjeûner. J'ai envie de faire plaisir à ma mère ! Elle adore la confiture aux fraises. Je souris en attrapant le bocal et en le placant dans mon panier déja rempli. Ensuite, je vais à la caisse payer.

La cassière scanne le code barre de tous mes achats puis une facture sort de la machine. Je paye et je sors. À quelque pas de moi, un groupe de filles ne cessent de me jetter des coups d'oeil coquins et dragueurs. C'est tellement amusant de leur faire autant d'effet ! J'ai toujours eu la sensation que j'étais moche.

— Hey, Lukei ! m'interpelle une voix dans mon dos.

Je me retourne vivement en la reconnaissant immédiatement. Je souris puis je m'approche de son pick-up rouge.

— Bonjour, monsieur Johns.

Il sourit à son tour et passe une main dans ma chevelure bouclée. Il me caresse comme un petit chien ! Il a l'habitude de faire ça à tous ceux qui ont des cheveux ondulés comme les miens. C'est étrange mais ce n'est désagréable !Je m'écarte en riant et il retire sa main.

— Tu t'es levé tôt, dis donc ! Tu devrais te reposer et profiter de ton jour de congé, fiston. Tu as travaillé dur cette semaine. Tu dois dormir.

Je baisse les yeux. C'est vrai que je dois de temps en temps reposer ma tête sur un oreiller mais je ne peux pas ! Ma mère est très matinale et je n'aime pas qu'elle se sente seule, alors je sacrifie mes quelques heures de sommeil pour lui tenir compagnie. Une fois, je me suis reveillé et en allant dans le salon, je l'ai vu pleurer silencieusement. Ça m'a fait très mal et j'ai juré qu'elle ne sera plus seule et qu'elle ne versera plus jamais des larmes.

— J'y penserai, répondé-je.

Monsieur Johns est mon patron. C'est un homme que j'admire et que je respecte beaucoup. Il est très aimable, gentil, social, croyant et compréhensif. Ça fait deux ans que je travaille pour lui et j'ai appris à bien le connaître.

— Comment va ta mère ?

— Oh, vous savez, elle n'est pas prête à changer d'humeur.

Il allume une cigarette. Il dit que ça l'aide à se sentir mieux. Lui aussi, a vécu des circonstances difficiles : sa femme est morte d'une leucémie et sa fille, Nehema, âgée seulement de quinze ans, a connu un accident de voiture qui lui a coûté la vie. Mais malgré ça, il a toujours le sourire aux lèvres. C'est l'une des rares personnes à encore posséder une âme aussi pure !

— Ne soit pas triste, mon enfant. Confies-toi en Dieu, il peut faire des miracles.

— Merci, monsieur.

Il me sourit gentiment.

— Prends soin de toi et ta mère.

J'hoche la tête et je vais récuperer mon vélo pour rentrer à la maison. Ma mère doit sûrement être assise devant la télé, à regarder des feuilletons. Elle n'aime pas être dérangée quand elle regarde la télévision. C'est sa seule et unique distraction !

— Maman ! Je suis rentré !

Je pénètre dans le salon et son humeur dévastatrice refait surface quand j'apparaît dans son champs de vision. Oui, je sais ! Arrêtes de me rappeler que papa est parti à cause de moi ! Voilà les mots, qui ont failli franchir mes lèvres mais je préfère ne pas la mettre dans un sale état comme elle l'est dèja. Je ne peux simplement pas ...

— Je suis désolé de t'avoir laissé seul ! Je vais préparer le petit déjeûner, je suppose que tu as faim ?

Avec ma mère c'est toujours comme ça, il faut s'excuser pour tout et pour rien ! À ses yeux, j'ai l'air d'être un étranger, un individu venu sur terre pour gâcher sa vie. Je l'aime tellement et je serai incapable de lui faire mal !

Je me dirige dans la cuisine où je fais griller des oeufs brouillés et du bacon. Ensuite, je vais dresser la table puis poser les assiettes bien garnies dessus. Je reviens dans le salon, prévenir ma mère que c'est prêt.

— Tu peux venir manger, maman.

Elle se lève tranquillement du canapé et me suit dans la minuscule salle à manger. Nous nous installons et commençons à manger. Le silence qui règne entre nous peut me rendre dingue ! Bien que j'ai l'habitude, je ne le supporte toujours pas.

— Ní xíhuān ma ? ( tu aimes ?), lui demandé-je.

Elle n'ose pas lever son regard vers moi mais me donne une réponse positive.

— Oui, Lukei.

Je lui souris tendrement. Après avoir fini, je débarasse et je fais la vaisselle. Pendant ce temps, ma mère va dans sa chambre se reposer et moi, je vais faire un tour à vélo.

Rouler m'aide à me détendre et à oublier un peu la merde de ce monde. C'est depuis que je suis petit que je fait ça ! Quand nous avons quitté la Chine et que nous sommes arrivés aux Etats-unis, ma mère et moi, j'ai été inscrit dans un collège où j'ai été pendant longtemps, le souffre douleur de mes camarades. J'étais victime de moquerie à cause de mon obésité et le fait que je ne parlais pas anglais seulement le mandarin. Aujourd'hui, je suis fier de l'homne que je suis devenu, un afro-chinois ! Je n'ai plus peur de marcher en public ou d'aller dans un parc d'attraction. J'ai repris confiance en moi quand j'ai commencé à faire du sport ! Le sport me permet de me défouler et de dépenser toute la douleur de mon âme.

Je décide de rentrer à la maison car je sais que ma mère est déja debout à cette heure. Je commence à m'inquiéter quand je ne la vois pas dans le salon, je fonce dans sa chambre et je reste immobile en apercevant un tube de comprimés, éparpillés par terre et ma mère, allongée à plat ventre juste à côté.

— Maman ! Oh non ... pas ça !

J'accoure vers elle et lui transporte sur mon dos. Mes mains et mes jambles tremblent de peur ! Je sors rapidement de la maison et je cours aussi vite que je peux vers l'hôpital le plus proche. Quand j'aperçois le bâtiment au loin, j'accélère.

— Tiens bon, maman. On est presque arrivé !

Good luck charmOù les histoires vivent. Découvrez maintenant