Sixteen ways to Turn

Chapitre V : Au nom de la vérité

De cette soirée du 22 février et de notre arrivée à Manchester, je ne me souviens que de l'exaltation qui pouvait se lire sur nos visages. Un sentiment d'excitation qui nous traversait de part en part.

Persuadés d'être sur le chemin de la vérité, nous nous jetions avec impatience dans un bouillonnement d'idées, échafaudant tour à tour les hypothèses les plus folles ; même si nous refoulions, au plus profond de nous-mêmes, nos doutes et nos craintes. Qu'allions nous découvrir ? Que pouvions-nous espérer ? Jusqu'où irions-nous pour Zoe ? La vérité devait-elle être dévoilée ?

Avec le temps, doutes et craintes ont fait place aux regrets, teintés de remords. A cet instant, nous ne pouvions pas prévoir la suite des évènements et aujourd'hui encore, je ne parviens qu'avec difficultés à les expliquer.

Gavin Johnson avait accepté de les accompagner. Originaire de Stockport, au sud de Manchester, la cité n'avait plus de secrets pour lui. Et en entrant dans son appartement du centre-ville, il se revoyait vingt ans plus tôt ; à ses débuts dans l'affaire Baker. Il ressentit à nouveau ce qu'il était parvenu à refouler avec le temps : un regret au goût amer, masquant à peine celui de la culpabilité.

Sixteen et Adam ne le virent pas, aveuglés par leur excitation, comme absorbés par leurs ultimes recherches sur l'université qu'avait fréquentée Larry. Quelques photos suffirent à les plonger dans l'atmosphère de ce qui marquerait le début de leur enquête à Manchester.

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Adam et Sixteen erraient sur le campus de l'université, perdus dans une foule d'étudiants en retard s'afférant à leurs occupations. Passant tour à tour par la faculté de médecine, celle dédiée aux sciences physiques, à l'étude de l'art et après une bonne heure passée à espérer rencontrer une âme charitable pouvant les guider, ils se trouvèrent aux portes de la John's Ryland Library.

Un homme d'une cinquantaine d'années, à l'allure élégante venait d'en sortir. Adam l'interpella. L'homme les dévisagea d'un air presque méfiant. Après quelques présentations, Sixteen expliqua brièvement les raisons de leur présence ici. Et en l'écoutant, Adam jugea lui-même ridicule d'espérer qu'une personne, rencontrée par hasard, puisse réellement les aider.

- C'est votre jour de chance ! Harold Kellerman. Je donne des cours ici.

Son visage semblait s'être adouci. Mais subir les premières interrogations pressantes d'Adam le rendit irascible.

- Larry et moi faisions partie de la même promotion, nous étions amis. Lâcha-t-il d'un ton presque devenu sec.

Sixteen le perçut et tenta de calmer les esprits.

- Quel genre d'homme était-il ? reprit-elle.

- Un autodidacte de génie et un surdoué de la finance. On travaillait comme serveur dans des fast-foods qu'il commençait déjà à jouer les traders.

Y avait-il une once de dépit dans ses mots ou était-ce un simple constat ? Les deux jeunes gens ne surent le déceler. Mais à l'entendre ajouter « Brillant, peut-être trop. », Adam et Sixteen échangèrent un regard en disant déjà long sur leur opinion.

- On l'aurait fait disparaître avec Zoe uniquement par jalousie ? Rétorqua Adam presque incrédule.

Kellerman eut un léger rictus, il constatait alors avec amusement, en son for intérieur, l'imagination débordante de l'éditeur.