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Gémissant encore sous ses draps, Essia sorti de son sommeil censé être réparateur. Les paupières à demi-closes, la chevelure fixée en position allongée alors qu'elle s'était redressée, un bâillement sorti son corps de l'immobilité. À la recherche de sa télécommande universelle, elle tâtonna à l'aveuglette sur le matelas. Lorsque le bout de ses doigt rencontrèrent un objet, elle s'en saisit et appuya sur la commande de lévitation du lit. Toujours avec autant de lenteur, elle se dirigea vers son salon. Ses yeux parvinrent à vérifier l'écran de vérification incrusté dans la porte d'entrée. Une tête blonde aux yeux verts coiffée d'un chignon sophistiqué regardait vers l'objectif.
 
Sofy.
 
Essia émit un juron, se pris un objet pointu qui traînait sur le sol carrelé, lui en arrachant un second. À moitié endormie, elle ouvrit à sa cousine.
 
— Bon sang Ess, va mettre quelque chose, la salua-t-elle avant de franchir la porte sans ménagement.
 
L'énergie que dégageait sa cousine donna le tournis à Essia. Un mal de crâne aussi, mais elle doutait que cette dernière y soit responsable. Baissant la tête, elle réalisa qu'en effet, elle était à poil. Un rire sortit de sa gorge.
 
— Arrêtes, tu n'as jamais vu de femme nue ? s'esclaffa-t-elle tout en se dirigeant vers sa cuisine, prête à faire couler du café.
 
Pendant que la machine s'attelait à sa tâche, elle en profita pour ranger sa vaisselle dans le lave-vaisselle dernier cri qu'elle venait de recevoir. Et tiens, son regard se porta sur Sofy qui inspectait les lieux la mine moqueuse, non sans son air "spéciale réprimande Essia".
 
— Tu devrais ranger plus souvent, il existe des manuels pour les gens... comme toi, déclara celle-ci, qu'est-ce que c'est que ça ? Sof prit en main un linge blanc, une... Heurk, elle le jeta plus loin sur le sol, s'il te plaît, ne me dis pas qu'il y avait du sperme dessus.
 
— Arrête de raconter des conneries, ce n'est pas non plus une déchetterie, répondit-elle en reclapant la porte du lave-vaisselle avec son pied.
 
— Oui, c'est vrai, ce n'en est pas une, ça ne sent pas aussi mauvais.
 
Essia leva les yeux au ciel, accablée par le contraste de leur caractère. Les liens du sang devaient être extrêmement puissants pour que deux personnes s'acceptent et se complaisent malgré les divergences d'opinions.
 
Elle entreprit une fouille archéologique de fringues propres à enfiler tout en balançant les sales dans un coin et finit par dégotter une jupe noire et un débardeur fuchsia dans une manne rose. Et parfaitement repassés.
 
Merci maman.
 
— Au lieu de critiquer mon mode de rangement, tu pourrais me dire ce que tu fiches ici, aussi tôt le matin ?
 
Sofy fronça les sourcils, s'installa sur la chaise de bar rouge vif, dos au meuble et face à elle.
 
— Si tu désactivais un temps soit peu le mode "Jungle" de tes fenêtres, tu t'apercevrais qu'on est l'après-midi, dit-elle tout en désignant les grandes baies vitrées imposantes situé derrière la cuisine équipée, animée par une végétation sauvage.
 
Surprise, Essia cessa tout mouvement, débardeur abandonné au cou, bras ballants, elle venait de rater une journée de boulot. Le calcul mental qui s'afficha dans son esprit lui fit comprendre que même avec les trois à quatre heures qu'elle pouvait encore effectuer, son quota imposable par semaine ne sera pas clôturer.
 
Et merde !
 
— Je constate qu'une fois de plus, tu n'auras pas tous tes hebdos.
 
— Ferme-la, ma-man, répliqua-t-elle.
 
Sofy pinça les lèvres.
 
— En tout cas, je ne sais pas comment tu as réussi à obtenir une convocation, émit sa cousine d'un air posé.
 
Enfin habillé, Essia rejoignit sa cousine dans la cuisine et lui offrit une tasse de café sans s'oublier.
 
— Tu m'as entendue ? questionna Sofy le vert de ses yeux interrogateurs, tu as été convoqué ! finit-elle par hurler.
 
Essia faillit recracher la gorgée qu'elle avait en bouche, avala de travers et fut prise d'une quinte de toux. Puis le silence s'installa le temps que deux et deux fassent quatre.
 
Pour les habitants de Cersia, recevoir une convocation ne signifiait qu'une chose : le début de la transition pour intégrer Hestia.
 
— D'où tu tiens ça ?
 
— De grand-mère.
 
De qui d'autre ? Leur grand-mère travaillait au Centre de Contrôle de Thenia, lieu où les postes étaient les plus influents.
 
Mais la convocation aurait bien pu induire sa grand-mère en erreur. Essia ne se considérait pas assidue au boulot pour mériter une telle récompense.
 
Et si...
 
la deuxième possibilité pour recevoir une convocation était bien souvent en rapport avec des délits commis. Mais elle ne se trouvait non plus dans cette catégorie alors... à moins que, son club n'avait rien de conforme, peut-être avaient-ils découvert la liste des membres et les traquaient pour...
 
Impossible.
 
— Pourquoi ? Ne me dis pas que grand-mère est derrière tout ça ! S'exclama-t-elle soudain.
 
N'étant pas à son premier coup d'essai pour lui dégotter un mec avec une bonne situation. Du genre : en pleine transition pour rejoindre Hestia. Inutile de précisé qu'Essia n'en avait accepté aucun. Du moins, les moins intéressants, ceux qui avaient eu le malheur d'être à son goût, n'avait pas dépassé le cap de "coup d'un soir". Et comme elle se refusait toute relation à long terme, elle s'était arrangée pour qu'ils disparaissent de sa vie. Ce qui par la même occasion avait dissuadé sa grand-mère de continuer ses petites combines. Le croyait-elle.
 
— Dans ce cas, pourquoi toi et pas moi ? Sofy observa ses ongles parfaitement manucurés puis reporta son attention sur elle.
 
— Bordel ! Et comment cela ce fait-il que c'est à toi qu'elle le dise ? Mon badge est encore en état de marche, bon sang ! s'emporta-t-elle.
 
— Eh calme-toi, elle à tenter de te joindre à plusieurs reprises mais tu ne répondais jamais, je crois que ton badge ne fonctionne pas aussi bien que tu ne l'imagines.
 
Muette, Essia resta sans réponse, il était vrai qu'elle avait dormi toute la journée alors, bon.
 
— Je vais voir grand-mère, décida-t-elle.
 
— Quoi ? Là, maintenant ? Mais tu ne devais pas aller travailler ?
 
— Si, mais si je reçois une convocation comme tu me l'as dit, cela n'a pas trop d'importance.
 
— Je ne sais pas, Ess, et si cela était à condition que tu finisses tes hebdos ?
 
— Tant pis, dans ce cas c'est déjà foutu.
 
Sofy ouvrit la bouche comme si on venait d'insulter sa mère.
 
— Écoute Sof, je dois savoir, sinon je ne tiendrais pas en place, imagine que ça n'a rien avoir avec les examens ?
 
— Qu'est-ce que ça pourrait être d'autre ?
 
Essia haussa les épaules pour éviter de mentir à sa cousine. Puis se dirigea vers sa chambre, vérifia son badge et constata qu'en effet quinze appels en absence émit par sa grand-mère l'attendaient.
 
— Tu devrais plutôt lui sonner, tu aurais une réponse directe.
 
Sofy l'avait suivie et se trouvait contre le chambranle de la porte de sa chambre.
 
Dans un soupir, elle s'exécuta.
 
Et lorsque, oui, on lui confirma que la convocation concernait bien sa transition, que, non, sa grand-mère n'y était pour rien et que, oui, elle le méritait, elle raccrocha abasourdie.
 
— Alors ?
 
Se tenant la tête, elle se mit face à Sofy, tenta de sourire mais une grimace s'y dessina.
 
— C'était bien pour une transition.
 
Sans un mot de plus, elle retrouva son café, s'assit le regard dans le vague. Tandis que Sofy se réinstalla sur sa chaise, elle lâcha.
 
— Je ne comprends toujours pas, je ne suis pas assidue au boulot, je clôture rarement mes heures. Quand je vous vois bosser comme des malades dans l'espoir d'une convocation qui n'arrive jamais, OK, Haxel est la seule à avoir obtenu la convocation, mais c'est à cause de son agression mais moi...
 
Le Thenium avait dédommagé son amie après une violente altercation avec un gros salopard. Contrepartie minime en considérant que l'accusé courrait toujours et qu'elle devait à présent supporter le jugement des examens.
 
La main de Sofy enveloppa la sienne.
 
— Sois contente, depuis Hax, je sais que le Thenium ne récompense pas que l'assiduité au travail. Tu es une technologue remarquable, tes productions reste révolutionnaire. Bon, je dois y aller, ma pause est finie, on se voit tantôt pour fêter ça ?
 
Le sourire d'Essia illumina ses traits provocant par la même occasion le fou rire cristallin de sa cousine. Et sur un "toi alors" elle s'en alla.

CLONES - Tome 1 ( En réécriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant