13. Save me

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«Certains cauchemars continuent même quand on a ouvert les yeux »

Le week-end passe à une vitesse effarante. Alexandra est rentrée samedi matin, les cheveux en bataille et un sourire niais sur le visage. Quand je lui ai demandé comment s'est terminée sa soirée elle a ris puis m'a dit qu'elle me raconterait quand elle aurait dormis au moins 6heures d'affilées. Je l'ai donc abandonnée à son lit, n'ayant pas envie de lui tirer les vers du nez alors que sa ressemblance avec un zombie est frappante.

J'ai pris le temps de faire du tri dans mes vêtements. Différentes piles prennent toute la place sur mon lit blanc : à donner, à jeter, à brûler. Cette dernière pile est surement ma préférée et je rends compte que je dois avoir quelques penchants pour la pyromanie. Le samedi soir nous sommes restées toutes les deux à l'appart devant des films d'horreur, passant d'Amityville à Silent Hill avant de tomber sur Catacombes, merci Netflix, tu peux être sur que je ne descendrai jamais sous les rues de la capitale.

Je passe mon dimanche après midi à flâner au Marais avant de rejoindre les quais. Je m'arrête boire un chocolat chaud dans mon petit salon de thé favori. Les murs alternent entre couleurs crème et taupe, les tablent hautes sont faites en bois claires et les petites tables basses en bois blanc. Les fauteuils sont tous différents et créent une ambiance chaleureuse. Une bibliothèque couvre la moitié du mur de droite, tandis que le petit bar se tient sur le mur de gauche.

J'adore cet endroit, les deux propriétaires d'une cinquantaine d'années sont adorables, les desserts et les boissons sont délicieux et c'est toujours calme. Un petit coin de paradis en plein Paris.

Je croque dans le cinnamon roll tout chaud qu'Alice, la propriétaire, vient de m'apporter.

- Voila ma jolie !

Je la remercie avec un sourire et me replonge dans le bouquin à l'eau de rose que j'ai trouvé dans la bibliothèque. Je me demande parfois comment je fais pour ne jamais me lasser de lire. Je suis le type même du rat de bibliothèque avec ma grosse écharpe et mes lunettes de lecture qui glissent sur mon nez quand je lis.

La clochette de la porte tinte et un courant d'air frais se glisse par l'ouverture. Je m'enfonce dans mon fauteuil pour me réchauffer. J'entends une voix chaude discuter avec Alice et commander un café noir. Une voix qui est restée imprimée dans ma mémoire. Mon inconnu aux yeux verts.

J'ose un regarde vers lui par-dessus mon bouquin. Il est de dos et tourné vers la caisse. J'en profite pour l'observer. Il porte un jean clair et une veste en cuir. Ses cheveux sont ébouriffés et il dégage une puissance incroyable. J'ai envie de le remercier mais je n'ose pas. Il m'a vu dans la pire des situations et doit me prendre pour une fille complètement déglinguée.

Je baisse la tête, je ne veux pas qu'il me reconnaisse. Mais se souvient-il de moi après tout ? Des filles il doit en avoir à ses pieds par dizaines. Il a même dû repartir de la boîte avec quelqu'un. Je me dépêche de rassembler mes affaires.

Je le vois se diriger vers le fond de la salle. C'est ma porte de sortie. Je sors presque en courant du café, lâchant un petit sourire à Alice mais en gardant la tête baissée. Et comme par hasard c'est à ce moment-là qu'Alice l'appelle pour récupérer son café. Il fait demi-tour et nous nous croisons. Son parfum m'effleure et mon corps y réagit tout de suite. Je suis presque tentée de me retourner. Je ne résiste pas à jeter un coup d'œil derrière moi et je croise son regard. La demi-seconde qu'il prend pour réagir me permet de m'enfuir dans les rues de Paris.

Je m'engage dans la première bouche de métro qui se présente et me mélange à la foule. J'attrape la rame qui est sur le point de partir et laisse mon cœur se calmer. Cet homme fait bien trop d'effet à mon pauvre coeur, mais je n'arrive pas à savoir si mes sentiments sont bons ou mauvais.

Comment est-ce possible ? Quelle est la probabilité pour que je croise l'homme qui m'a aidé à me défaire de Louis dans un café perdu au fond d'une ruelle ?
Sûrement proche de 0. A quoi joue ma vie ?

Quand le métro s'arrête à ma station j'ai encore la tête pleine de questions. Il faut que je me défoule. Je rentre presque en trottinant jusqu'à l'appart.

Un mot d'Alex me prévient qu'elle est sortie, sûrement avec Maxence. D'ailleurs elle me doit des explications. Mais ça attendra.

Je cours jusqu'à ma chambre ou mon jean rejoint mon pull au sol. J'attrape mon collant de course, ma brassière et un pull thermique. Mon coupe-vent sur le dos et mes runnings aux pieds je me précipite dehors. Mon téléphone est dans mon brassard et mes écouteurs déversent une musique lente dans mes oreilles.

Je pars de l'appartement et traverse les 5,6 et 7ème arrondissement avant d'arriver près du Champ de Mars où je bifurque direction le Grand Palais. Je cours jusqu'à en perdre le souffle, la tête et le cœur.

C'est devant Notre Dame que je reprends mes esprits. La course m'a vidé la tête. Je ne sais pas combien de kilomètres j'ai parcouru mais ils ont eu l'avantage de me faire tout oublier pendant quelques instants. Je m'arrête sur le Quai de Montebello. La nuit est déjà tombée et la cathédrale a revêtu ses lumières. Octobre s'annonce froid et pluvieux.

Je regarde mon portable, presque 20h. Deux messages. Je déverrouille mon téléphone pour accéder aux deux sms.

De Alex : je suis au resto avec Max et son frère. Popcorn devant la télé toute à l'heure ?

Je souris, et lui réponds

A Alex : je suis à Notre Dame, je rentre, à toute !

Numéro masqué : pièce jointe
J'ouvre la photo. C'est moi. En train de courir. Sur le pont Alexandre III.
« Je ne suis jamais loin ma chérie »

Ce mec est taré. Je me retourne pour observer les alentours. Il y a trop de monde dans les rues. Impossible que je le repère mais Louis ne doit pas être loin. Je commence à paniquer. S'il réussit à m'approcher je n'arriverai plus à lui échapper.

J'appelle Alexandra, ma voix est rauque alors que j'essaye de garder mon calme.

- Morue t'es où? Demande t elle surement souriante, en décrochant

- Alexandra j'ai besoin de toi.

- Clarisse? Qu'est ce qu'il y a ?

- Alexandra il est prêt de moi, il est là. Il faut que tu viennes me chercher

Je vois un regard bleu perçant me scruter au loin. Ce connard a du tout entendre. Des frissons parcourent ma colonne vertébrale.

- Alexandra il est là

J'entends Alexandra crier une longue série d'injures pendant que je me retourne pour courir loin de lui. Ses pas résonnent sur le macadam et il crie mon prénom dont l'écho se fracasse contre mes tympans.

Je détale comme un lapin vers le 5ème, priant pour ne pas tomber ou me prendre un mur.
En tournant au coin d'une ruelle je dérape et perd l'équilibre. Mon téléphone se fracasse par terre. Merde il m'a coûté cher ce con. Je ne prends pas le temps de regarder dans quel état je l'ai mis et continue de courir.

Je continue de courir encore et encore en faisant des détours pour le distancer.
Mais merde ce mec est vraiment détraqué. Demain je vais porter plainte pour harcèlement ce n'est pas possible.

J'atteins le 5ème et à l'angle de la rue saint Sulpice, j'entends une voix crier mon prénom. Une voix que je ne reconnais pas sur le coup puis une autre derrière moi.

- Ma chérie revient vers moi. Je suis toujours là. Crie Louis

Cette fois ci je suis foutue. Je heurte quelqu'un de plein fouet. Alors que j'essaye de me dégager il me retient.

- Clarisse ! Hurle Alexandra qui arrive en courant derrière l'homme.

Quand je relève la tête je croise ce regard vert jade et me laisse aller contre ce torse d'acier.

Dare or not ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant