Dare or not ?

22.Les jeux sont faits

« It all begins and ends in your mind. What you give power to has power over you »

Nous nous installons à notre table, un magnifique gâteau au chocolat assorti de fruits rouges trône dans l'assiette déposée à ma place.  Je salive devant ce dessert avant de me rappeler que je vais prendre un bon kilo rien qu'avec ce repas. Lucas aussi regarde son dessert avec des étoiles dans les yeux. Tout en dégustant notre gâteau, je vois Hugo monter sur l'estrade et prendre le micro en main. Quelques siècles plut tôt, il aurait pu être roi. Imposant et impitoyable. Même sa démarche agile et sa façon de se tenir me rappelle la grâce d'une panthère. Il explique le déroulement de la vente mais je le vois chercher quelque chose du regard. Ses yeux croisent les miens et s'arrêtent. J'ai l'impression qu'il peut lire en moi. Jamais je n'avais eu autant l'impression d'être mise à nue.

- Enchère numéro 1 : deux jours dans un SPA 5 étoiles sur la côte d'Azur, les enchères commencent à 2000€. Annonce le commissaire-priseur qui vient de prendre la suite d'Hugo.

- 2500 ! lance un homme avec un ventre rond comme un ballon géant.

- 3000 ! rétorque une femme, aussi refaite qu'une Barbie

Les enchères montent encore jusqu'à atteindre les 10 000€. Je suis abasourdie de voir comment ces personne estiment que 10 000€ ne sont qu'une miette de pain alors que pour moi, c'est la moitié de mon salaire annuelle.

Je n'écoute plus vraiment les lots, mes yeux ont trouvé autre chose sur laquelle s'attarder. J'observe Hugo à côté d'une blonde assez belle mais totalement refaite. Il a bien vu que je le regardais, partagée entre la surprise et la colère. J'avais bien raison, sa réputation n'est pas qu'une rumeur. La fille se penche vers lui pour exhiber ses seins en plastique qui dépasse presque de sa robe et je la regarde poser ses lèvres dans le cou Hugo. Sans se départir de son sourire, il tourne la tête vers elle et l'embrasse à pleine bouche. Mon sentiment de colère se transforme en haine viscérale et en dégout. Moi qui croyait presque avoir vu un bon côté chez cette homme, je me plantais complètement. Mais surtout je me rends compte que mon coeur se serre à la vue de cette scène pitoyable.

Je détourne les yeux de ce spectacle et croise le regard de Mia qui fronce les sourcils. Elle a bien vu ce que j'ai vu et apparemment, ne l'approuve pas. Soudain, j'entends Lucas crier à côté de moi, n'ayant rien suivi aux enchères je le regarde avec de grands yeux.

- 7000 ! Adjugé au jeune homme aux cheveux longs ! annonce le commissaire

- Lucas, qu'est-ce que tu viens de payer 7000 € ? je lui demande, totalement abasourdie par une telle somme.

- Nos prochaines vacances ma chère partenaire !

- Je te demande pardon ?! je manque de m'étrangler

- 4 jours pour 4 dans un chalet à Chamonix avec SPA, sauna, hamam et même masseuse à domicile ! Allé, début décembre je t'octroie des congés payés si tu viens profiter de l'air de la montagne avec moi !

- Mais t'es complètement malade ! je couine

- Oh allé, j'ai cru comprendre qu'Alexandra sortait avec Maxence, propose leur de venir aussi !

Je reste littéralement sur les fesses. Il est devenu fou, je ne vois pas d'autre explications.

- Lucas tu es mon patron je te rappelle !

- Et toi t'es ma meilleure employée !  Alors tu ne discutes pas ! J'appellerai Max demain, il sera ravis de quitter la capitale quelques jours. Et je sais trèèèès bien que tu adores les Alpes alors n'essaye même pas de refuser ! On ira dire bonjour à Papa Maman Nielsen en passant le long du Lac Léman.

- T'es pas croyable...

- Allé profite Clarisse ce n'est pas tous les jours qu'on a un patron aussi génial ! me dit-il en embrassant ma joue.

Je lui adresse un petit sourire, ravie de cette perspective d'enfin rentrer respirer l'air pur de Chez moi, mais mal à l'aise que ce soit mon patron qui m'y invite.

- Début décembre, ça sera compliqué Lucas. On regardera début de l'année prochaine.

- Quand tu veux ma chère.

Sur les coups de minuit je commence à fatiguer et Lucas se rend compte que je risque de m'endormir debout s'il ne me ramène pas chez moi. Il me propose de me raccompagner ce que j'accepte avec plaisir en songeant à la route qu'il nous reste avant d'arriver à Paris. Je le préviens que je vais juste dire au revoir à Mia. Il acquiesce et se dirige vers les grandes portes de l'entée pour récupérer mon manteau et les clés de sa voiture.

Je trouve Mia ou du moins je l'entends hausser le ton avec une voix qui appartient à son frère ainé. Je m'arrête derrière la grande porte à demi-ouverte derrière laquelle ils se sont éclipser, n'osant pas les couper dans leur discussion quelque peu houleuse. Mais je me rends bien vite compte que j'aurais mieux fait de tourner les talons.

- Hugo t'es pas sérieux là ? Julia ? Sérieusement t'as pas trouvé pire comme idée ? T'essaye de faire quoi ? Te foutre de nouveau dans la merde comme l'année dernière ? T'es PDG maintenant ! Et Clarisse hein ? t'en fais quoi ? J'ai bien vu comment tu la regardais alors me prends pas pour une conne ! Putain Hugo t'es vraiment trop con !

- AH donc elle t'a raconté comment elle m'a planté comme un con après que je l'ai sauvé de son ex complètement taré 2 fois ? Vous vous connaissez à peine et elle te raconte ça ? Super ! Normal que son ex se soit foutu de sa gueule, t'as vu comme elle est naïve ? Cette fille est trop crédule et complètement déglinguée ma parole ! Bien sûr que j'ai envie de me la taper Mia, elle reste canon mais ça s'arrête là. Je ne fais pas dans le social !

Les mots d'Hugo me transpercent à la vitesse de la lumière et avec la force d'un poignard. Le choc d'entendre ça, et la haine qu'il a mis dans ses paroles me percutent et m'ébranlent. Je recule comme si j'avais pris un coup dans la poitrine. Malheureusement, je me heurte à cette fille que j'ai vu accroché à Hugo tout à l'heure.

- Oh fais attention, imbécile ! sa voix hautaine m'exaspère et je n'ai qu'une envie c'est de la faire taire.

C'est à ce moment-là que Mia et son frère remarque ma présence et mes yeux qui commencent à briller. Je sens les larmes monter mais le retient pour ne pas passer pour la pauvre petite chose. Mia tente un geste vers moi mais je recule encore, son contact bien qu'amical me rappelle trop celui de son frère. Un contact qui a laissé des traces qui semblent me brûler la peau à cet instant.

Je fixe Hugo, trop choquée par ses propos. Il me regarde lui aussi et ses yeux se rivent aux miens. Je crois y lire un éclat de peine et de tristesse mélangées avant que la haine ne reprenne sa place. Je tourne les talons en essayant de m'éloigner le plus vite possible perchée sur mes talons hauts. M'éloigner de cet homme complètement détraqué. Cet homme qui m'attire beaucoup trop pour que ça ne soit pas malsain. J'entends le bruit d'une autre paire de stiletos qui claque sur le beau carrelage.

- T'es vraiment un connard Hugo ! crie-t-elle à son frère. Clarisse attends ! Clarisse il ne pensait pas ce qu'il disait ! murmure Mia en me rattrapant à l'entrée de la demeure.

- Mia, tu es merveilleuse mais ce que ton frère vient de dire, je ne peux pas le supporter. Je suis arrivée au mauvais moment mais finalement j'ai découvert le vrai Hugo. Sa réputation est fondée.

- Clarisse, fais-moi confiance il ne le pensait pas...

- Laisse tomber, ce n'est rien, j'ai survécu à bien pire. Je voulais juste te dire au revoir, Lucas me ramène et je crois que c'est mieux pour tout le monde. Tiens mon numéro, écris-moi si tu as envie de me revoir.

- Bien sûr que j'ai envie de te revoir, je t'écris demain. Me dit-elle dans un souffle avant de me prendre dans ses bras.

Quand je rejoins finalement Lucas, il m'attend devant la voiture, un air étrange sur le visage.

- Tout va bien ? me demande-t-il

- Oui oui je suis juste exténuée, on rentre ?

Le trajet retour se fait dans le plus grand des calmes. Mon cerveau s'est arrêté de tourner et mêmes mes pensées m'ont désertées. Je n'ai qu'une hâte me rouler en boule sous ma couette, protégée et au chaud.