Alors le bûcheron se lamenta :
« Comment allons-nous continuer à nourrir nos enfants, puisque nous n'avons plus rien ?
- Sais tu une chose mon homme ? répondit la femme. Demain, au petit matin, nous conduirons les enfants dans les bois et nous les abandonnerons. Ils ne retrouveront plus le chemin pour rentrer et nous en serons débarrassés. »
Hansel et Gretel, les frères Grimm.
*
En voyant toute la foule qui grouillait dans l'immense salle de réception, Gretel eut un mouvement de recul. Elle ne pouvait pas affronter tant de monde d'un coup. C'était trop après des siècles de solitude. Elle resta debout à les observer, tous ces gens qu'elle avait jadis connus, bien qu'il y avait des nouveaux venus. C'était une foule en mouvement qui lui évoquait le roulement d'une vague. Une vague qui l'emporterait. Ils étaient nombreux, si nombreux... Et puis tous les bruits, les couleurs, les parfums... Comme des flashs, ils lui sautèrent tous à la figure et la faucheuse chancela. Sa panique roulait sur sa peau comme des flammes prêtes à la dévorer toute entière, comme des serpents vicieux distillant leur venin maléfique... Elle ne parvenait plus à respirer et ses doigts cherchèrent à dénouer le col de sa courte robe noire. C'était trop.
Non, elle ne pouvait pas. Tremblant légèrement, elle porta ses mains à ses tempes pour les masser, espérant chasser la perfide voix qui sifflait dans son esprit.
Fais demi-tour. Fuis.
Mais elle ne fuirait pas, son frère comptait sur elle. Elle le retrouverait. Gretel n'avait pas le choix. Il le fallait. Pour elle, il s'était battu des siècles, pour elle, il avait affronté mille cauchemars, pour elle, il avait abandonné l'espoir de toute retraite. À elle de lui rendre la vie qu'il méritait. D'autant plus qu'après cela, elle n'aurait plus jamais à retourner dans sa chambre forte, dans sa cage sans lumière. Ils pourraient vivre ensemble tous les deux, loin de tous. C'était tout ce qu'elle voulait. Peu importe l'époque, peu importe le lieu... Elle ne voulait que lui.
Fuis, fuis, fuis...
Alors que la faucheuse tentait de faire taire ces mots malicieux et vicieux, une tornade brune la bouscula, manquant de la faire tomber par terre. Une main douce se saisit de son bras pour empêcher la chute.
Gretel écarquilla des yeux quand une jeune femme au teint blanc comme neige, aux cheveux noirs comme suie et aux lèvres rouges comme sang la serra dans ses bras en s'exclamant dans un chatoiement de douceur et de parfums familiers :
« Bon sang ! Je n'arrive pas à croire que tu es de retour parmi nous Gretel ! Tu m'as tant manqué !
La jeune femme se recula, laissant à la faucheuse tout le temps de la reconnaître. Le masque perdu de Gretel se fissura tandis que son regard s'embuait de larmes. Dans un immense élan de bonheur, sa voix se brisa lorsqu'elle s'étouffa :
— Blanche ?
La brune sourit, délicieusement. Elle resplendissait, véritable étoile dans cette salle de réception. C'était la plus belle. La plus belle d'entre toutes.
— Et oui, ma belle, c'est moi !
— Tu n'as pas changé ! souffla la jumelle, d'un ton tremblant.
Mais ce n'était plus la peine qui étreignait son cœur. Seulement la joie sans fin de retrouver son amie de toujours. La présence celle-ci semblait calmer les sifflements dans sa tête et elle n'en était que trop heureuse.
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Les Faucheurs I - Sombre prophétie
ParanormalNous connaissons tous bien des histoires à propos des sorcières. Certaines les font passer pour bonnes. D'autres pour cruelles. La vérité est bien plus sombre... Depuis des siècles déjà, l'ordre des Faucheurs se charge de débarrasser la Terre de ces...