Chapitre X : Mal de mer

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Camila, Scarlett, quelques proches de Camila et moi-même avions décidé de prendre des vacances en Thaïlande. Pour et malgré moi, cela ne représentait pas l'échappatoire que j'espérais. Alexander était là. Scarlett, aussi. Mais, j'avais un rôle à tenir, je prétendais. Et, les détails comptaient.

Afin de fuir la folie de la ville, les gens, j'avais loué un yacht qui allait nous permettre d'explorer les magnifiques côtes thaïlandaises autrement. Pendant que nous partagions quelques bouteilles de champagne sur le pont supérieur, Alexander sympathisait avec le personnel naviguant. Le comportement de Scarlett à son égard en disait long ce qui me mit terriblement mal à l'aise dès le début du séjour. Je prétendais, mon masque au visage, alors que je désirais savoir ce qu'il se passait entre eux. Avaient-ils couché ensemble depuis ce baiser ? De mon côté, je n'avais pas revu Elias...

Au bord de la nausée, je finis par me retirer dans ma suite pendant que les autres s'amusaient la position semi-allongée étant la seule position que mon estomac pouvait digérer. Camila et Scarlett me rendirent visite chacune leur tour.

— Ça va aller ?, vint me demander Alex, inquiet.

— J'ai un peu la nausée, c'est tout.

— Prends un anti-vomitif. Je t'en ramène.

Il revint quelques minutes plus tard, une plaquette de cachets dans la main.

— Tu es sûre que ce n'est pas un simple mal de mer ?

— J'n'en sais rien. Un mélange des deux, peut-être. J'voudrais rester seule, s'il te plaît.

Je ne l'avais même pas remercié pour les médicaments.

— Tu en es sûre ?

— Oui ! Vas-y ! Scarlett sera ravie, tu verras !

— Scarlett ?

— Oui, Scarlett ! Ça lui fera plaisir de pouvoir te mater en mon absence.

— Qu'est-ce que tu racontes, Kiana ?!

Il referma la porte de ma suite. Je me levai du lit.

— Va-t'en, laisse-moi vomir tranquillement !

— Non ! Je ne te comprends pas ! Tu me demandes de me mêler de mes oignons et toi, tu me dis ça ! Tu m'en veux, j'ai compris ! Si tu ne veux plus me voir, vire-moi dans ce cas !

— Je n'ai pas envie de te virer ! J'ai... j'ai besoin de toi.

Il se retint un instant.

— Il ne se passe rien entre elle et moi. Rien du tout... C'est pour ça que tu es allée coucher avec ce Turner ?

— On n'a pas couché ensemble...

— C'est vrai ?

— Oui. Il ne s'est rien passé.

Une lueur particulière apparut dans son regard. Il s'approcha de moi avec la ferme intention de me toucher.

— Non ! Reste où tu es...

Je lisais parfaitement dans ses yeux quelle était son intention.

— Kiana...

— Non. Non ! C'est non, Alexander. Recule...

Il avait réussi à me faire frissonner sans même me toucher.

— Pourquoi ?, demanda t-il avant de déglutir.

— Parce que les choses sont déjà assez compliquées comme ça.

Il s'approcha un peu plus, mon cœur s'emballait. Un pas de plus et je tombais inéluctablement dans ses bras.

— Va-t'en, Alex, s'il te plaît, demandai-je, les yeux fermés.

J'ouvris les yeux. Il n'avait pas bougé.

— Alexander, je te demande de partir.

Enfin, il me laissa et je pus reprendre mon souffle.

Les minutes, les heures, les jours suivants, mon désir pour lui renaquit. Avec une puissance supplémentaire. Même s'il n'avait jamais réellement disparu... Je voulais le toucher, le sentir plus qu'autre chose, me donner à lui. Et pourtant, j'étais parvenue à mettre une distance étonnante entre nous tout en me posant un nombre incalculable de questions... Disait-il la vérité à propos de Scarlett ? Je n'avais pas eu la prétention de poser la question à mon amie qui, depuis le début, avait probablement été bien plus honnête que moi...

Un après-midi, nous avions navigué du côté des splendides îles Phi Phi, secteur où nous avions décidé de larguer l'ancre. La nuit tombée, je m'étais installée sur le pont, sur un des transat-canapés pendant que les filles s'étaient affalées devant une émission de télé-réalité.

La nuit était fraîche, agréable et silencieuse. Ma position me permettait d'avoir une vue imprenable sur le ciel étoilé et la déesse lunaire. Le bruit de l'imposante mer en fond, un verre de vin à la main, je pris le temps d'apprécier ma propre compagnie.

Tout allait bien, jusqu'à ce que des cris ne m'interpellent. J'avais reconnu la voix de Camila. Perplexe, surprise, je me levai de mon transat confortable. Soudainement, un bras s'enroula violemment autour de mon cou et m'immobilisa. En une fraction de seconde, je compris que quelque chose de grave se passait. Un homme me sortit quelques mots en thaïlandais avant de positionner ce qui me semblait être un couteau à la gorge.

— Ne m'faîtes pas de mal, j'vous en prie...

Ma vessie s'alourdit instantanément pendant que mon cœur perdait le contrôle. L'homme me parla encore. A l'intérieur, encore des cris.

— Je-je ne comprends pas... c'que vous vous dîtes. Si vous voulez de l'argent, j'en-j'en ai !

Il me demanda quelque chose, son bras serrant fermement mon cou. Évidemment, je n'étais pas en mesure de répondre. Au même moment, j'entendis plusieurs coups de feu. Mes jambes voulaient me laisser tomber, je sentais une pression au niveau de mon bas ventre, j'avais chaud, froid, peur. Tout à la fois.

— Au secours !, parvins-je à crier.

Cette fois, ce fut une nausée venue de nulle part qui prit possession de mon corps. J'en perdis la notion du temps.

— Lâchez-la !, exigea Alexander en apparaissant.

— Alex... Alex..., gémis-je, les larmes aux yeux.

Il pointait son arme sur nous, le flanc ensanglanté.

— Laissez-la partir, tout de suite, insista-t-il, le regard soutenu.

L'homme qui ne comprenait probablement pas un mot de ce qu'il disait me serra fortement contre lui se rendant probablement compte qu'Alex n'était pas en mesure de tirer sans me blesser. Je fermai les yeux, prête à mourir.

Rapidement, la peur s'envola pour laisser place à une paix intérieure que je n'avais jamais expérimentée auparavant. Elle était douce et en parfaite adéquation avec ce que j'étais. Elle me berça avec une délicatesse incomparable.

Et, ce fut à ce moment précis qu'un coup de feu retentit. La seconde d'après, je me retrouvai penchée par-dessus la barrière du pont, vidant mon estomac du plat de nouilles et du vin que j'avais ingurgités. 



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