Chapitre XXI : Stratégie d'évitement

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Hayley et Scarlett ne m'avaient jamais regardé de cette façon. Ressentaient-elles de la pitié ? De l'incompréhension ? Du regret ? A leur place, je ne saurais même pas comment réagir. Quelques jours plus tôt, j'avais tout avoué à Scarlett qui avait tenté, me semble-t-il, de me faire croire qu'elle ne m'en voulait pas.

— Tu comptes vendre ta maison, du coup ?, me demanda Hayley.

— Oui. Et, je souhaiterais que tu t'en occupes, s'il te plaît.

— Pas de soucis, je m'occuperai de tout ! Je m'occuperai de t'envoyer toutes tes affaires personnelles aussi...

Le surlendemain, je lui laissai les clés de la maison, le cœur gros.

— Apelle-moi quand tu arrives à Londres.

— Bien sûr...

Elle observa mon chauffeur empiler les valises dans le coffre du 4x4 avant de nous laisser.

— Il reste une dernière valise à l'intérieur. Merci..., lui-indiquai-je.

Alors que je m'apprêtai à m'installer dans la voiture, je remarquai la Dodge d'Alexander s'approcher et s'arrêter le long du trottoir, près de moi. Aussitôt, mon cœur se serra, mes jambes se mirent à frémir me donnant l'impression de perdre mon équilibre. Il sortit de la voiture et me rejoignit, le regard insistant, rempli de questionnements. La présence imposante qu'il dégageait eut un effet immédiat sur ma personne.

— Salut.

Je ne l'avais pas vu depuis un moment. Je l'avais évité. J'avais fui. Comme une lâche. Pas un message, aucun appel. Le silence radio.

— Salut, Alex.

Il me dévisagea ce qui me mit mal à l'aise. Lorsqu'il vit le chauffeur ranger ma dernière valise dans le coffre, il sembla s'interroger.

— Comment vas-tu ?

J'avais honte de mon comportement pourtant j'en avais été responsable.

— Je vais bien..., mentis-je.

— Tu pars ?

— Oui... Je... je déménage.

— Ah bon ?, s'étonna-t-il.

Il s'approcha un peu plus de moi cherchant probablement mon regard fuyant.

— Où ça ?

Je tentais de me faire minuscule mais j'étais au centre de son attention. Après tout, il avait droit à des explications.

— Kiana ?, insista t-il.

— A... Londres.

— A Londres ?! Définitivement ?

Je secouai la tête de haut en bas.

— Pour un certain temps, du moins.

— Ah ouais... Je vois... OK, je comprends.

— Ça n'a rien à voir avec toi, Alex. C'est moi... J'ai besoin de partir. J'suis désolée...

— En fait, non, je ne comprends pas ! Tu... tu fais la morte pendant je-ne-sais-combien de temps et là tu te casses au Royaume-Uni comme si de rien n'était !

— J'suis désolée.

— Tu comptais me dire au revoir au moins ?

Je baissai la tête. Malgré les efforts que j'avais réuni pour ne plus y repenser, je me remémorai ma fausse couche. J'avais failli à la tâche, incapable de garder cet être vivant intact.

— Je suppose que te convaincre de rester est une perte de temps...

— J'suis désolée.

Il fit un pas en arrière, me regardant toujours avec insistance.

— Pas autant que moi.

Sur ces mots, il me tourna le dos, m'abandonna sur le trottoir laissant la culpabilité se charger du reste. Le vide qui avait pris possession de mon être gagna un peu plus de terrain. Je finis par ne plus rien ressentir, plus rien ne comptait.


Alexander,

J'espère que tu vas bien. Je suis bien arrivée à Londres. Je m'installe petit à petit.

Je sais que tu m'en veux. Je m'en veux terriblement moi aussi. Mais je devais partir... Les choses étaient devenues bien trop compliquées pour moi. Et perdre ce bébé a été la goutte de trop. Si tu savais à quel point je m'en veux de ne pas avoir pu le protéger, le garder en vie. J'ai besoin de temps, d'espace pour guérir de toutes ces blessures et tout recommencer.

Quoiqu'il en soit, je voudrais que tu saches que tu as de l'importance à mes yeux. Tu en auras toujours. Tu es un homme exceptionnel que j'admire énormément, tu es la plus belle chose qui me soit arrivée depuis un moment. Prend soin de toi, je t'aime.

K.

LustOù les histoires vivent. Découvrez maintenant