Ma Pierre de Lune (tome 2)

Chapitre 25

Soudain la porte s'ouvrit sur le colonel Chen qui ordonna :

-Saisissez-là !

Une dizaine d'unspiders emmenèrent Elea qui n'opposa aucune résistance. Le colonel Chen s'avança vers Lanster resté seul au milieu de la salle. Chen posa son regard sur le corps inerte de Barks et sur la veste de la jeune fille au sol.

-Que s'est-il passé ?

-Barks n'a pas apprécié mes méthodes.

Croyant comprendre, Chen hocha la tête.

-Il devenait un poids après tout. Tu as le code ?

-Non, elle est plus coriace que je le pensais.

-On va faire à ma méthode alors, dit le colonel Chen en souriant.

-Ici Agent Bêta.

-Ici Agent 02 au rapport.Je viens d'apprendre que la pierre de lune va être torturée en public. Chen veut calmer la population par la peur et en même temps récupérer le code.

-Tu sais qu'on ne peut pas laisser ça arriver.

-Je sais.

-Tu as échouer à la première occasion d'effectuer la mission.

-Chen a empêcher que la fille se fasse tuer, je ne pouvais rien faire.

-Comment Chen sait-il qu'Elea a le code ?

-Elle l'a avouée, c'est tout.

-Alors écoute, nous avons convenu d'un plan de secours. Il ne faut pas que la fille avoue le code, si on sent que c'est sur le point d'arriver, nos tireurs d'élite l'exécuteront.

-Elle ne dira rien.

-C'est ce que m'a affirmé l'agent Alpha. Si elle ne dit rien, elle finira par succomber à ses blessures et le peuple se révoltera. Tu pourras effectuer ta mission. Tu seras en communication avec l'agent Alpha qui contrôle nos tireurs et tu a pour rôle de lui dire quand tirer.

-Bien reçu.

Les unspiders me traînèrent jusqu'au podium. Ils avancèrent jusqu'au devant de la scène où la foule était toujours là depuis la mort de Mazart. Ils me lâchèrent et ils m'obligèrent à me tenir à genoux. Je n'avais plus de force. J'entendis une voix parler dans un micro. Je tournai la tête derrière moi. Le colonel Chen se tenait debout près de Léopold. Mon cœur se serra.

-Elea, regarde par ici. Un officier est chargé de te donner un coup de fouet si tu ne nous donnes pas le code de la salle de contrôle. Six chiffres Elea. Quels sont-ils ?

J'aperçus un grand homme tout en noir un fouet à la main, s'avancer vers moi. Je pourrais leur dire et tout serait terminé. Je n'aurais plus à souffrir. Puis mon regard se tourna vers la foule silencieuse devant moi comme si elle compatissait à ma douleur. Mes yeux s'arrêtèrent sur une femme en haillons tenant un enfant dans les bras. 16 11 25. Qu'avait espéré Aldrick en me confiant ce secret ? Si lourd à porter. Je repensai à la misère des Exclus, l'horreur des prisons-gardes. Ma décision était prise. Que valait une vie contre des milliers ?

-Je compte jusqu'à trois Elea.

1...

2...

3...

La corde du fouet pénétra violemment dans ma chaire, profondément. Je ne voulus pas hurler mais je ne pus retenir le cri de douleur qui franchit mes lèvres.

-Ici Agent Alpha. Léopold ?

-Simon tu sais comme moi qu'elle ne parlera pas.

-C'est ma faute, tout est de ma faute. Je devrais dire aux nettoyeurs de tirer Léopold, pour qu'elle ne souffre pas.

« Six chiffres Elea. Quels sont-ils ? »

-Agent 02, ici agent Bêta, ordonnez de tirer. Aucun humain ne peut surmonter cette torture. C'est surhumain.

L'agent 02 se révolta :

-Avez-vous une seule idée de ce qu'elle a enduré ? De ce qu'elle a vécu et surmonté ? Moi oui. Et je peux dire que ni vous ni moi n'aurions eu cette force. Alors oui elle est surhumaine mais je n'ordonnerai pas de tirer.

« Je compte jusqu'à trois Elea »

Il pensait qu'il réussirait à effectuer son devoir. On l'avait choisit pour ça. Car il n'avait montré aucune compassion dans son métier. Il n'avait fait que suivre les ordres depuis la première fois qu'ils l'avaient enrôlé. Il n'avait jamais échouer. Il s'était juré qu'aucun sentiment ne viendrait altérer son devoir. Mais avec Elea dès le début ça avait été différent. Le colonel observa la jeune fille à genoux. Il ne pouvait oublier ses yeux sombres et pétillants. Il était éveillé lorsqu'elle l'avait embrassé dans son sommeil. Il n'avait pas bougé. Jamais il n'avait ressenti ça auparavant. Il se rappela la première fois qu'il l'avait aperçu, dans son lycée, lors de la deuxième sélection. Belle, surprenante. Puis le regard noir qu'elle lui avait lancé à travers la vitre d'observation. Il avait alors esquissé un sourire et avait prononcé sur le champ : « Sélectionnez-la ». Il n'oublierait pas lorsqu'elle était venue vers lui, s'effondrer dans ses bras, rongée par la culpabilité d'avoir tué. Il n'oublierait pas ce regard si intense, sa main caresser sa joue et lui demander « Qui es-tu ? ». Il n'oublierait pas la sensation de son corps contre le sien, ses lèvres sur les siennes.

« 3 »

Il n'oublierait pas la souffrance dans ses yeux lorsqu'elle avait été torturée. La souffrance de voir qu'il n'était pas de son côté.

« 2 »

Il ne resterait pas les bras croisés.

« 1 »

Le coup de fouet partit. Le cri strident de la jeune fille fendit l'air. Il s'avança et sortit son revolver.

-Agent 02, que faites-vous ??

Il saisit le bras de l'homme qui portait le fouet et l'obligea à le lâcher.

-Agent 02, je vous ordonne d'arrêter !

Il lui tira une balle dans la tête.

-Agent 02...

La jeune fille tourna la tête vers lui.