Le Souverain Gelé - Tome 1 [En Cours]

Partie I - 4 hinvels avant.7 : Père & Fils

[...]

— C'est quoi cette folle dingue ? finit-il par demander, abasourdi.

— Oooh, ne jouez pas avec moi commandant... lâcha-t-elle d'une voix sombre.

Alors qu'elle tendit son bras encore indemne vers eux, Damos poussa un rugissement d'outre-tombe et s'élança vers le duo tandis que ses bras se transformèrent en une multitude de ronce prête à les attraper.

Khurt n'eut la force de bouger, mais Kharir posa rapidement son fils avant de bondir entre les lianes blanches. L'action fut si rapide que l'adolescent ne put comprendre ce qu'il se passait. La seule chose qu'il réussit à voir fut la tête de Damos tomber au sol.

Du sang gicla du corps décapité et s'effondra à côté du commandant qui, lentement, se tourna vers la demi-femme, le visage assombri et le regard froid.

Khurt sentit son cœur bondir et son dos frissonner de terreur.

Quelque chose de sombre... planait dans l'air. Était-ce son père qui dégageait une telle aura meurtrière ?

Visiblement prêt à la tuer de sang-froid comme il l'avait fait avec ce pauvre Damos, Kharir s'avança lentement vers l'hybride qui recula d'un sabot. Khurt ne pouvait voir le visage de son géniteur, mais ce qu'il dégageait était suffisant pour lui inspirer de la terreur... Alors qu'il était pourtant son fils.

Jamais il ne l'avait vu ainsi.

Les yeux de l'adolescent dérivèrent vers le corps de Damos, et il crut voir quelque chose se mouvoir pendant une fraction de seconde. La douleur lui dévorant les entrailles étant toujours présente, il préféra ne pas s'attarder sur un détail certainement illusoire.

Kharir s'élança silencieusement sous une vitesse fulgurante vers son adversaire. Tenant toujours son membre arraché par la lame du commandant, la demi-élafus lâcha un grognement dévoilant ses longues canines et leva rapidement ses doigts en pointant la terre, puis le ciel.

Dans un fracas assourdissant, d'autres ronces blanches jaillirent du sol vers le commandant, prêtes à l'empaler sur place.

Khurt cria son nom, mais son père continua sa route sans se soucier des ronces. Alors qu'il entendit des sifflements déchirer l'air, l'adolescent ne vit que des reflets lumineux se déchaînés autour du guerrier, aspergé de la sève blanchis des lianes découpées.

Abasourdi par cette manière de combattre surhumaine, Khurt resta sans voix. Pourtant, lorsqu'il avait tenté de trancher les ronces, il avait cru frapper contre de la pierre ! Comment était-ce possible ?

La demi-femme lâcha un grondement plus féroce, visiblement agacée. Sûrement souffrait-elle également de sa blessure infligée. Elle fit un bond en arrière assez agile pour un élafus, ce qui surprit Khurt, puis elle attrapa un long pic de glace qu'elle arracha à main nue.

Elle para avec force l'attaque frontale de Kharir, qui n'en démordait pas. Le commandant fut surpris que la glace ne se brise pas sous le choc, tandis que le regard de la femme hybride brillait d'un léger soulagement. Sûrement avait-elle douté, finalement pour rien.

La glace était indestructible.

Grâce au pic glacé qu'elle avait arraché, la créature força contre la lame de Kharir qui semblait reculer voire s'accroupir sous la pression. Khurt se sentit blêmir en voyant son père en mauvaise posture et voulu se lever pour l'aider. Mais lorsqu'il força sur ses jambes, celles-ci le lâchèrent et il lâcha un gémissement de douleur à cause de sa blessure ; même si Kharir l'avait atténuée, il n'était pas encore tiré d'affaire.

— Ne bouge pas, Khurt ! hurla Kharir, toujours sous la pression de l'imposante force de la demi-femme.

— Pas facile de se donner à fond quand on a un bambin derrière n'est-ce pas ? ricana-t-elle alors  qu'elle semblait prendre l'avantage à mesure que le genou de Kharir s'approchait du sol.

Subitement, Kharir lâcha toute pression en se laissant glisser sur le côté, faisant ainsi perdre l'équilibre à l'hybride, bien trop surprise pour réagir. Il la balaya de ses deux jambes, puis fit rapidement volte-face pour lui trancher son deuxième bras sans vergogne.

Elle hurla de douleur en tombant sur le côté, désormais privée de ses deux bras.

— Aaaaaargh... ! Sale insecte ! Stupide mortel ! jura-t-elle en tentant de se relever le plus rapidement possible. Je vais... tu vas p...

Kharir ne prit pas le temps de la laisser finir et frappa à nouveau une des jambes animales de la créature, bien décidée à l'immobiliser pour qu'elle ne puisse s'échapper. Khurt assistait au spectacle sanglant, pétrifié alors qu'il gardait sa main sur sa blessure ventrale.

Malgré les plaintes perçantes de la demi-femme, Kharir ne semblait éprouver aucune compassion. Il attrapa avec forces les cheveux lavandes de la femme et lui souleva la tête pour qu'elle voit son visage apathique. Il gardait sa lame près de sa gorge, prêt à la décapiter au moindre geste suspect.

— C'est... impossible... cracha-t-elle, un œil fermé sous la douleur. Un humain... un simple humain... alors que moi... moi... ! Kalya... ô ma déesse... Thalyssa... Thalyssa vous demande de l'aide ! sembla-t-elle implorer.

Kharir et Khurt écarquillèrent des yeux en l'entendant prononcer ce nom divin, stupéfait.

Comment cette créature pouvait-elle connaître Kalya ? Pourquoi suppliait-elle ainsi en l'appelant comme s'il s'agissait de sa propre divinité ?

Quant à ce nom... Thalyssa... ce monstre possédait son propre nom... ?

— ... Qu'est-ce que tu es ?... interrogea Kharir d'une voix sombre en la secouant, les doigts agrippant toujours sa chevelure.

— La ferme... si tu crois que je vais répondre à tes questions... !

— Tu vas devoir, de gré ou de force. Je ne te laisserai pas mourir maintenant ; cela fait bien trop longtemps que j'attendais de mettre la main sur l'un d'entre vous. Tu vas pouvoir répondre à toutes mes interrogations sur votre armée et la tempête.

La dénommée Thalyssa ne répondit pas, mais ses yeux givrés semblèrent s'élargir comme si elle eut une révélation. Ses lèvres mauves s'étirèrent en un sourire glacial, alors que ses épaules semblaient se secouer de rire.

Kharir plissa ses yeux, très prudent.

— Hé... héhé... héhéhé... je vais crever... par cet humain ? Par ce déchet ?... Ce n'est pas grave... oh non ce n'est pas grave... Thalyssa reviendra... Thalyssa vous dévorera... comme tous les autres... mais avant ça... avant ça... je t'avais dit que tu allais payer !

Il n'eut peu de temps pour réagir.

Lorsqu'il vit le regard de la femme dériver sur Khurt, Kharir la lâcha brusquement et dit demi-tour vers son fils.

Khurt ne comprit pas tout de suite l'affolement de son père.

Jusqu'à ce qu'il voit le corps de Damos exploser en morceau d'organes internes, sous une pluie de sang ; les mêmes ronces blanches qui l'avait dévoré de l'intérieur jaillirent du cadavre pour s'élancer vers Khurt, toujours incapable de bouger.

Le garçon vit la mort arriver en face, persuadé de se faire transpercé de part en part. Il ferma les yeux par réflexe.

[...]