Cette soirée m'était restée en mémoire. Cela faisait cinq jours à l'heure où j'étais assis dans mon café préféré. J'y allais après chacun de mes entrainements, et le soir parfois quand le doux café se transformait en bar géré par le grand tatoué. C'est les lèvres dans ma grande tasse de liquide sucré que je remarquais un garçon gracieux s'installer à coté de moi, de l'autre côté de la vitre. Il était beau avec son sourire insolent collé au visage, portant sa cigarette à ses lèvres. Je souris avec lui lorsqu'il porta ses doigts fins à la cicatrice circulaire dans son cou. Il écrasa sa cigarette dans le cendrier de ville accroché contre la façade du café et entra dans un carillonnement doux. J'avais détourné le regard, me retrouvant dos à lui jusqu'à ce que sa silhouette ne vienne s'installer face à moi.
- Ça pue la solitude ici, lança-t-il le regard dressé vers les plafonniers anciens.
- Je la vis bien la solitude moi, c'est toi qui est venu chercher de la compagnie, me moquais-je.
Il me regarda bizarrement avant de lever les yeux au ciel. Quelques secondes de silence s'installèrent avant qu'on ne vienne le servir. Un café noir, serré.
- Comment ça va? Lança-t-il sans but en prenant sa tasse entre ses lèvres.
- Ne fais pas comme si ça t'intéressais, ris-je en le regardant boire. Sérieux, comment tu peux avaler ça?
- J'aime l'amertume, rit-il à son tour.
- Pourquoi?
- À défaut de l'avoir dans le coeur, je préfères l'avoir dans la bouche, répondit-il.
Je ris franchement. Toutes ses réponses étaient drôles à mon sens, il ne pouvait s'empêcher de tout ramener à quelque chose de négatif.
- Tu ne peux pas t'empêcher d'être pessimiste? Demandais-je.
- Non, ça m'empêche d'être déçu. Si tu n'attends rien, tu ne peux pas être plus triste.
- Tu me fascines.
- Je prends ça comme un compliment.
Je souris. Il était vraiment fascinant. Il était beau, vraiment beau. Il avait tout pour rendre heureux, alors que lui même ne l'était pas. C'était fascinant. Il était beau d'une façon spécifique, quelque chose de bien à lui qui n'était pas explicable, mais qui était bien là dans sa façon de parler, d'être. Il était si près, et pourtant si loin. C'était renversant, vertigineux. J'enviais un peu sa façon de faire, de se foutre de tout. Ça avait beau m'énerver au début, maintenant ça me fascinait.
- Comment on vit dans ta peau? Lançais-je sans but.
- On vit mieux, je trouves, répondit-il.
- Pourquoi t'as décidé ça?
- Pour être moins triste, pour ne rien rater. Parce que quitte à vivre une vie de merde, autant la rendre un peu plus amusante. Parce que je n'ai juste pas envie de me réveiller un beau matin et me rendre compte que la moitié de ma vie n'a été qu'une grande dépression de laquelle je n'ai jamais essayé de sortir. Parce que en faisant ça peut être qu'un jour quand je serais vieux, en y repensant je me dirais peut être « c'était pas aussi triste que ça en avait l'air », alors je m'efforce d'entretenir le négatif au minimum de ce que ça peut être, même si je ne peut pas le faire disparaitre je peux le cacher avec du plaisir éphémère, sauf que l'éphémère doit être renouvelé tout le temps. Alors je cherches des nouvelles choses, des nouvelles activités, des nouvelles personnes... pour remplacer le petit bonheur d'avant et couvrir le mal un peu plus longtemps.
- Je suis la nouvelle personne?
- À toi de me le dire, termina-t-il sur un air de défi.

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happiness ; johnten
Fanfiction- On ne m'a dit que du bien de toi. - Ah oui? C'est bizarre. Je ne suis qu'un petit con.