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J'étais à une soirée, regardant Ten danser, une douce impression de déjà vu se mélangeant à mon verre d'alcool sucré. Je réfléchissais à ce que je pouvais faire avec lui, à ce que lui m'avait déjà fait. J'avais l'impression de goûter un nouveau parfum de la vie depuis qu'il était entré dans la mienne. Il m'avait appris à lâcher prise, il m'avait appris à me perdre pour mieux me retrouver. La seule chose que je n'avais pas trouvée en faisant ça, c'était lui. Il était juste là pourtant, si proche et pourtant si loin. J'avais son corps, mais je n'avais jamais réussis à m'approcher de son coeur. Il était à quelques mètres, me laissant voir à quel point il était incroyable. Ses yeux de braise, son sourire enflammé, ses lèvres brûlantes, petit pyromane sentimental. Il était beau, particulièrement. Il était la poésie dans un monde qui était encore en train d'apprendre l'alphabet et j'étais sa personne, pour l'instant. Tout en sachant qu'il allait partir, je me cramponnais à ce garçon. C'est stupide de s'accrocher à quelque chose qui nous fait du mal, mais le plus stupide ce serait d'abandonner quelque chose que j'ai toujours voulu. Il me faisait du bien autant qu'il allait me faire du mal. Sa simple apparition dans ma vie avait éliminé toute impression de déjà vu, cet arrière gout rance et terne d'une vie un peu trop merdique et routinière, il l'avait balayé à l'instant où il était apparu. Je m'avançais vers lui.

- Je peux? Demandais-je.

- Je ne danse que seul. Avec quelqu'un ça devient trop... personnel, sourit-il.

Je fis demi-tour pour retourner à ma place. Quelques pas plus tard je sentis une main venir de derrière et avancer plus vite que moi, toujours tout droit pour arriver dans le couloir, puis dans une chambre, puis sur le balcon. Nous nous asseyons alors à nos places, comme la dernière fois.

- De quoi tu veux parler cette fois? Lançais-je, amusé.

- Pourquoi on devrait parler? Répondit-il.

- T'as l'air d'en avoir besoin, rétorquais-je.

- J'ai pas besoin de quelqu'un qui écoute ce que je dis, seulement d'une personne qui entend ce que je ne dis pas.

Je ris. Il était spécial comme garçon, mais je comprenais ce qu'il voulais dire.

- Alors tais-toi et laisse moi écouter ton silence, Chittaphon.

- Ne m'appelles pas comme ça, s'il te plait.

- Désolé Ten, m'excusais-je sans vraiment savoir pourquoi, une amertume coupable en fond de gorge.

Il y eu un silence où je pus entendre sa respiration tremblante, qu'il essayait de canaliser. Il se retenait de pleurer, et ça s'entendait. Ou peut-être que c'est moi qui savait bien écouter son silence...

- Il n'y a que mon père qui m'appelait comme ça, lança-t-il dans un murmure.

- Désolé, répétais-je.

- C'est moi qui le suis, répondit-il. Je te fais croire tout le temps que j'ai oublié et que tout va bien alors que pas du tout.

- T'as le droit, c'est pas une honte.

- Merci, susurra-t-il au creux de mon oreille alors qu'il m'enlaçait.

happiness ; johntenOù les histoires vivent. Découvrez maintenant