𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝐍°𝟕

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║𝟚𝟘𝕙𝟘𝟟║

"Vous souhaitez commencer ?" me demanda Kai.

Surprise, et encore fébrile, je relevais mes yeux vers lui. Il semblait si inoffensif, assit ainsi, sur cette simple chaise, et avec cet air angélique scotché au visage. J'aurais presque même pu croire qu'il n'était qu'un innocent enfermé à tort. Presque.

"C'est votre jeu. Alors commencez." me contentais-je de répondre.

"Bien, c'est comme vous voulez."

Rapidement, ses mains se posaient sur la surface glacée de la table de métal, tandis qu'un sourire carnassier vint prendre place sur ses croissants de chairs. La peur m'attrapait. Elle s'accrochait à moi. Et je sentais déjà mon ventre se tordre douloureusement, et m'en donner des nausées.

"Je sais déjà que vous avez été fiancée ou mariée, mais j'en juge par la beauté et la simplicité de votre visage que ce n'était qu'une erreur de jeunesse, donc simplement des fiançailles." me confia-t-il l'air incroyablement sérieux.

Exact'.

"Mais cela n'est pas ce qui m'importe." sourit-il. Non. "Ce qui m'importe c'est de savoir pourquoi l'ordure qu'est votre père a laissé son enfant si innocente et pure dans une pièce avec un véritable assassin, violeur, ou plus communément comparé à un monstre." cracha-t-il. "C'est-à-dire moi."

Je me crispais.

Je sentais que j'allais gagner.

L'histoire de ma vie était d'une telle complexité et horreur qu'il fallait être fou pour en imaginer un tel scénario. Et même mon patient n'était pas tordu au point de s'imaginer ce que j'avais pu vivre. Même moi je venais à me demander si ma vie n'était pas simplement un vieux film d'horreur.

"Déjà, je sais que vous avez une sœur." déclara Kai. "Et elle doit être d'une beauté, intelligence et sociabilité sans nom. C'est pourquoi vous êtes ici. Je pourrai même vous comparez à un échec, une erreur de parcours que votre père cherche à oublier." murmura-t-il. "Je me trompe ?"

"Que devrais-je répondre ?" lui demandais-je du tac au tac.

Il s'agitait sur sa chaise en se rapprochant de la table. Il s'y collait, l'air impatient, excité. Et je pouvais le comprendre. Il ressemblait à un enfant cherchant son cadeau de Noël en plein mois de novembre.

"C'était rhétorique." s'amusait-il. "Pourquoi prendre le risque de vous savoir me mentir alors que vos réactions parlent pour vous-même ?" gloussa-t-il. "Si vous perdez, ce sera de votre faute."

Je me contentais de hocher la tête. Voilà, doucement, je commençais à comprendre comment son 'jeu' fonctionnait. Il utilisait mes réactions, ma posture, et toutes les autres séances où il m'avait vu, pour m'étudier. Et rien qu'avec ça, il allait tenter de découvrir mon secret.

"J'aimerais juste savoir ce qu'est devenue votre sœur." pensa-t-il, les sourcils légèrement froncés. "Peut-être est-elle décédée, tuée de vos mains, peut-être était-ce un malheureux accident dont vous vous sentez coupable..." poursuivit-il. "Ou alors elle coule-t-elle des jours heureux au soleil, alors que vous êtes enfermée avec moi, dans cette salle comparable à une cage."

Son cerveau était d'une rapidité sans nom. Il évaluait toutes les possibilités possibles avant d'en sortir les plus collantes avec mon comportement. Il me les exposait, et prenait la bonne réponse de pleine main, celle sur laquelle j'avais réagit...

"Elle est morte." souffla-t-il brusquement. "Et vous vous en sentez responsable." poursuivit-il instantanément. "Quel bien triste tableau... Je suppose que cela n'est pas récent. Que cela doit vous ronger de l'intérieur. Comme un parasite, qui vous dévore de l'intérieur. Qui utilise la peur et le regret comme carburant, afin de vous faire souffrir, chaque jours de votre misérable vie."

Il avait encore tout bon. Et rien que de sentir qu'il touchait au but, me donnait des sueurs froides. Comment pouvait-il avoir tout bon rien qu'avec de maigres contemplations ? Je doutais qu'il soit surdoué à ce point.

"Néanmoins, vous êtes un cerveau exceptionnel." reprit-il soudainement. "Et je comprends pourquoi votre père cherche à vous enfermer avec des fous. J'ai eu la chance de partager cette pièce avec vous, dans le plus grand des calmes, et j'ai aussi réussi à analyser avec perfection vos petits tic et toc."

Perplexe, je fronçais mes sourcils. Mes bras compressaient ma poitrine, comme si rien qu'en faisant cela, je serais protégée de tous coups pouvant provenir du monstre qui me faisait face. Mais je savais évidement que c'était faux.

"Je me souviens de mes cours." murmura-t-il. "Et, en regardant votre père, je suis sûr et certain qu'il voyait chaque jours sa mère s'occuper de la maison et de ses enfants, alors que son père allait travailler. Le parfait clichés des années cinquante, n'est-il pas ?" sourit-il.

C'était le portrait exact' de mes grands-parents...

"Alors, j'en conclu que votre père a vu en vous un potentiel surprenant, a la limite de l'horreur." me déballa-t-il. "Et qu'il a cherché à faire taire cette partie de vous. Il a chercher à faire comme le père de sa propre mère. Il a fait taire toute trace de rébellion en elle, et l'a élevée avant de l'offrir a un autre homme."

Je commençais doucement à comprendre. Et j'avais peur que lui aussi n'ait comprit. Mais je savais que jamais, il n'aurait pu passer à côté de ce détail. Parce que, si je l'avait comprit, lui aussi l'aurait forcément vu et interprété de ma façon.

"Alors votre père a fait de même." poursuivit-il. "Et c'est à moi qu'il vous a offert."

『912』

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༄❛Moᥒ⳽tᥱɾ❜Où les histoires vivent. Découvrez maintenant