Il sourit ironiquement, en se frottant les mains. Puis, il saisissait le dossier bleu, le refermait et le jetait au fond de la pièce. Je sursautais. Et regardais un tourbillon de feuilles voler au fond de la pièce, jusqu'à frôler le sol de la pièce.
"Je t'apprends des choses sur ta famille, et tout ce que tu trouves à me dire c'est : 'est-ce que vous allez me tuer'." maugréa Kai. "Tu es réellement un cas extraordinaire, EunJi."
Les sourcils froncés, je tournais mes yeux vers lui.
"Vous pensiez quoi ?" crachais-je. "Que j'allais vous demander comment mon père s'amusait à rendre dingue ma sœur ? Eh bien non. Je n'en ai rien à faire. Tout ça appartient au passé."
C'était évident, je mentais.
Mais j'étais si troublée... Je n'avais jamais réussi à faire le lien auparavant avec tout ça, et voilà qu'un simple patient se révélait et osait me parler de ma vie en connaissant les moindres détails croustillants de celle-ci. Ça me rendait dingue.
"N'oublie pas qui est le maître du jeu, EunJi." déclara autoritairement. :Et n'oublie pas aussi que j'ai gagné. Je connais ton secret. Je connais ton passé."
"Vous mentez." contestais-je tant bien que mal. "Vous ne savez rien de moi."
"Ah bon ?" sourit-il. "Donc le fait que ton père te fasse du chantage avec ces photos de ta sœur est un mensonge alors ?" me demanda-t-il, l'air faussement perdu. "La mort de ta mère aussi est un mensonge ? Et le fait que ta sœur cherchait chaque jours un autre moyen de te tuer ? Et ton père, le roi de cet endroit, celui à cause de qui tu viens ici chaque jours, lui aussi est un mensonge ?" insistait-il.
Il plaquait ses mains sur la table et se hissait. Il ne tardait pas à se pencher vers moi, tout sourire. Je sentais mon pouls s'accélérer, ma vue se brouiller, mes doigts se crisper et ma respiration se couper.
Il me faisait terriblement peur. J'avais juste envie de me boucher les oreilles et mes yeux...
"Est-ce que tu comprends, EunJi ?" me questionna-t-il, tout sourire. "Est-ce que tu comprends enfin pourquoi toi et moi sommes ensemble, dans cette salle alors que la police est à l'extérieur, à tuer tous les autres patients de cet endroit ? Est-ce que tu sais réellement qui a organisé cette sinistre soirée ?"
Mon père.
"Je sais EunJi, je sais que tu as enfin compris qui est le centre de tout ça. Celui qui nous a fait nous rencontrer, celui qui a déclenché l'alarme."
"P-Pourquoi...?" murmurais-je faiblement.
Kai sourit, puis passait ses mains dans ses cheveux, d'un geste excité, pressé.
"Mais tout ça n'est qu'une question de science, EunJi." me sourit-il. "Tu n'as toujours pas compris ? Tout ça n'était qu'une expérience depuis le début." insistait-il. "Ce n'était pas AeJi sa chouchoute. C'était son cobaye. Vous étiez ses cobayes. Et c'est toi qui a réussi l'expérience EunJi. Parce que c'est toi qui a survécu. C'est ta sœur l'erreur, c'est elle l'échec. Toi, tu es la solution." me murmura-t-il.
Il se léchait rapidement les lèvres.
"Depuis le début il avait prévu notre rencontre." m'avoua-t-il. "Il avait prévu de te faire travailler ici avec la mort de AeJi comme garantie. C'est pour ça qu'il voulait deux enfants. Il voulait créer une compétition entre vous deux, et ensuite, vous faire vous entretuer." déclara-t-il.
Elle n'avait même pas seize ans, et moi j'avais à peine onze ans... Comment pouvait-on être aussi monstrueux..?
Je secouais rapidement la tête.
Tout ça était trop gros. Je ne pouvais pas avaler ça. C'était tout simplement impossible. Mon père était dingue, mais pas au point d'accepter de tuer sa femme mais aussi l'un de ses enfants. Non. C'était impossible. Oui, impossible.
"Ta mère et ta sœur n'étaient que des pions dans tout cela. Et cet asile était l'échiquier." poursuivit-il. "Nous sommes tous ses pions. Et il a joué toutes ses cartes. Il a gagné, EunJi. C'est fini."
"C'est faux."
"Ah bon ? Tu crois ?" sourit-il. "Qui se retrouve enfermée avec un tueur en série et violeur, hein ? Qui est destinée à tuer pour survivre depuis sa naissance ? Ce n'est pas lui, EunJi. C'est toi."
J'essayais de bouger, pour retirer ces fichues chaînes. J'avais juste envie de me lever et de presser mes mains sur son cou. Je voulais qu'il se taise. Il ne faisait que mentir. C'était un menteur. Un menteur !
"Alors, tu veux me tuer, hein ?" me demanda Kai, tout sourire. "Avoues-le. Dis-moi que tu rêves de presser tes mains sur mon cou. Avoues que tu veux me tuer. Ça te ronge de l'intérieur, hein ?"
"Putain oui."
Kai sourit, il se levait par la suite de sa chaise, sans pour autant me quitter du regard.
"Ça t'as plu de tuer ta sœur ?"
Je me crispais. Cette question me prenait clairement de court.
"Je rêve de le savoir. Depuis que je sais ce que tu as fait, je rêve de savoir ce que tu as ressentir en broyant son crâne. Comment c'était, hein ?" insistait-il.
Je détournais le regard, totalement chamboulée.
"EunJi, ne me force pas à te faire mal."
Je le voyais contourner la table, pour s'arrêter devant moi. Je relevais donc mes yeux vers lui. Son regard semblait moins pétillant. Il avait juste l'air sérieux et curieux à la fois. Ça ne faisait que m'énerver davantage.
"Alors, comment c'était ?" me demanda-t-il. "Tu as aimé voir ses yeux perdre toute trace de vie, hein ? Tu as aimé sentir sa peau devenir glacée et blanche, avoues-le."
Ma respiration s'accélérait.
"Non. Je l'aimais. C'était ma sœur."
"Alors tu avoues l'avoir tuée ?" persistait-il tout sourire.
"Non... Enfin... Je voulais pas la tuer ! C'est pas de ma faute !" m'écriais-je.
Ma respiration devenait haletante, mes doigts transpiraient abondamment tout comme le reste de mon corps, et ma gorge devenait sèche. Je voulais que ça s'arrête. Je ne voulais pas parler de tout ça !
"Je suis innocente..." murmurais-je. "Je l'ai pas tuée... C'est elle..."
"Quoi 'c'est elle' ?" répéta-t-il. "Qu'est-ce que tu veux me dire, EunJi ?"
Sa main se déposait sur la mienne, je réprimais une grimace de dégoût.
"C'est elle qui m'a tuée."
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