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VIII - L'art de stagner

Séoul, Mondo, septième étage

Bo Hwa avait passé la matinée à fixer le plafond de sa chambre. Elle était allongée sur son lit lorsqu’un bip sonore résonna dans toute la pièce. Elle se releva paresseusement et observa attentivement autour d’elle : en face, son bureau était sens dessus dessous, ses livres d’anglais traînaient par terre et un peu de rangement dans son armoire serait la bienvenue.

Son ordinateur afficha un nouveau mail à exactement treize heures vingt-cinq. Elle mit ses lunettes et s’installa devant la machine. Bo Hwa poussa d’abord les petits papiers, les baguettes en bois et les emballages plastiques sur un côté avant d’ouvrir son courriel.
Elle avait encore échoué. La lettre expliquait qu’elle avait toutes les qualités requises pour le travail mais qu’elle aurait à se déplacer, ce qui revenait à aller à l’encontre de ses propres principes. Ils ajoutèrent même qu’une personne avec autant de potentiel ne devrait pas être aussi « paresseuse » ou « timide ».

Bo Hwa sortit son miroir de poche : la vision globale de son visage lui arracha une horrible grimace. Ca ne va vraiment pas du tout... Elle reposa l’objet sur la table, s’approcha de l’écran, relut le mail et haussa les épaules. Elle finirait par trouver et de toute façon, ces compagnies, là elle ne les appréciaient pas particulièrement : les agences de voyage étaient ennuyeuses, les écoles maternelles trop bruyantes et elle voulait vraiment travailler à domicile.

Bo Hwa avait déjà trouvé son travail parfait au début de l’année : l’entreprise lui envoyait des documents et des enregistrements qu’elle devait traduire, ensuite elle recevait l’argent à chaque fin de semaine. Le salaire était plutôt bon et c’est grâce à son travail que les filles avaient pu compléter rapidement l’argent pour la maison. Mais peu de temps après, la société fit faillite à cause d’une fuite d’informations personnelles et Bo Hwa s’est retrouvée au chômage pendant plusieurs mois. Le travail d’interprète à domicile était chic à entendre mais, difficile à trouver.

La prochaine entreprise, si elle l’aime du moins, elle accepterait sans chipoter. L’idée de devoir s’occuper de beaucoup de paperasse dans un bureau avec d’autres individus ne lui déplaisait pas vraiment mais juste que « Ce serait tellement mieux de pouvoir travailler à la maison. »

- Je devrais peut-être changer mon CV et accepter ce qui viendra. Se dit-elle en se dirigeant dans la chambre de la petite dernière.

Bo Hwa entra sans frapper et soupira : le désordre était commun à toute la maison. Mi So était vautrée par terre, elle griffonnait son carnet de dessin et des tonnes de boules de papier traînaient autour d’elle. Bo Hwa devina que son amie faisait une crise de « ce n’est jamais assez bien » et hésita à retourner dans sa chambre. Il arrivait souvent que Mi So passe des jours entiers à dessiner et à rester devant son ordinateur en multipliant les nuits blanches, puis quand on lui demandait de montrer ce qu’elle avait fait, elle s’énervait et finissait par pleurer en disant « Rien, rien du tout, je n’ai rien fait ! »

- Argh ! S’écria Mi So en déchirant la page d’un seul coup.

Elle froissa la feuille et l’envoya valser dans la pièce.

- Wow, du calme, dit Bo Hwa en prenant place sur le lit. Ca va ? Ca va bientôt faire des semaines que tu es…Comme ça.

Mi So pouffa et enferma ses cheveux dans un gros chignon touffu.

- Je n’arrive pas à savoir quoi dessiner…L’entretien c’est demain, vers l’après-midi et mon dossier n’est pas encore complet.

- Mais je croyais que t’avais eu la bourse, non ? S’étonna Bo Hwa. Pourquoi tu dois passer un entretien ?