𝙲𝚑𝚊𝚙𝚒𝚝𝚛𝚎 9 ~ 𝙳𝚘𝚞𝚝𝚎𝚜

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« Il n'y a rien de plus terrible que l'habitude du doute. Le doute sépare les gens. C'est un poison qui désintègre les amitiés et brise les relations agréables. C'est une épine qui blesse et irrite, c'est une épée qui tue. »

Le doute...Une chose tellement désagréable.
Une situation dont on perd le contrôle. Le doute s'installe, généralement, suite à une chose infime et quelconque qui s'est produit dans notre vie. Cette petite chose où nous nous disons « Ce n'est pas grave ! » ou « Ce n'est rien ! » et qui prend pourtant beaucoup d'ampleur au fil du temps. Puis c'est une réaction en chaîne : nous doutons de tout et n'importe quoi, car on a peur que des événements similaires à cette "petite chose" se reproduisent.
Le doute est un facteur nous permettant de nous remettre en question, mais à quel prix ?
Au prix de douter de tout ? De vivre dans la paranoïa ? De perdre confiance ?
Le doute est une impuissance horrible mais le doute envers soi même est encore pire...

 Le doute est un facteur nous permettant de nous remettre en question, mais à quel prix ? Au prix de douter de tout ? De vivre dans la paranoïa ? De perdre confiance ? Le doute est une impuissance horrible mais le doute envers soi même est encore ...

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Nous marchons d'un même rythme, lent et consterné. Je sais où nous nous dirigeons : nous allons vers le pont des chutes Ly'ph, la merveille de la prestigieuse école de l'EBI-NA.
J'entends les chutes, non loin. J'entends le bruit de l'eau se fracassant contre les rochers à une vitesse aberrante. Elles sont milles fois plus impressionnantes que le cours d'eau auprès duquel j'aime me ressourcer, dans mon "jardin secret".
Nous arrivons au pont de bois. C'est un pont couvert, de tuiles de couleur ocre et ses dérivés. Il est fait uniquement de planches magnifiquement sculptées, qui passe juste au dessus des chutes Ly'ph. Cet endroit n'est pas mon préféré mais il est tout de même apaisant.

Le Professeur s'arrête, en plein milieu de pont, et regarde au loin. Je fais de même. Je suis éblouie par la beauté du paysage auquel je fais face.

Je contemple le soleil doré aux aspects de feu qui peine à monter. Ce soleil, immense, donne au ciel une couleur rougeâtre se mêlant au violacé. Des oiseaux volent au loin. Je ne peux voir que leur fine silhouette noire, gracieuse, se détachant de tout le paysage qui s'offre à moi. Leurs chants emplis de joie brisent le calme de la nature. Tous ces éléments, aussi infimes soient-ils, donnent une atmosphère féerique, une atmosphère introuvable ailleurs. Je regarde les arbres verts en fleurs, encore humides par la rosée du matin, qui s'étendent à perte de vue. Je regarde le monde s'éveiller peu à peu, sortir du long sommeil que nous procure la nuit.

C'est mon premier jour dans cette école en tant que deuxième année et tout se déroule déjà mal :
-8 heures, j'arrive en retard en cours d'Histoire ;
-8 heures 45 minutes, j'apprends que mon petit frère va être envoyé à la mort ;
-9 heures, je suis éperdument seule dans mon recoin secret et je fais une crise d'insuffisance respiratoire ;
-9 heures 26 minutes, je suis dans ma chambre, tout ce brise autour de moi ;
-9 heures 53 minutes, j'ai une vision ;
-11 heures 02 minutes, je suis là, à contempler le soleil, avec mon Professeur de SVS...
Une question me vient alors en tête : que vais-je encore apprendre aujourd'hui ? Je crains ne pouvoir supporter une nouvelle chose...
J'ai l'impression que cette journée est un cauchemar, où je peux me réveiller à n'importe quel moment. J'aimerais tellement que se soit le cas...J'aimerais tellement que cette journée n'existe pas. Mais je le savais déjà : aujourd'hui n'était pas un jour comme les autres et il allait changer ma vie. Il allait changer toute mon existence, à jamais. Je ne savais pas encore ce qui allait arriver dans les mois à venir...Mais j'avais une intime conviction que rien ne serait comme avant. Je cherchais encore et toujours des réponses.

« Cette journée ne va pas avoir que des répercussions sur ta vie, Nanciley...Elle va avoir des répercussions sur tout notre monde, sur tous les êtres vivants... »

Je le regarde. Encore une fois, j'ai l'impression qu'il lit dans mes pensées. Cela m'a toujours intriguée chez le Professeur Layan. Il semble toujours deviner ce que l'on pense, ce que l'on ressent...C'est assez déroutant.

« Tu vas changer ta vie, tu vas changer des vies !

- Mes parents...Mes parents ont toujours été convaincu que j'accomplirais de grandes choses. Je voulais les croire et je me devais de les rendre fiers. Mais, et si ce n'était pas le cas ?

- De toutes les façons, tu es destinée à accomplir des choses extraordinaires. Tu es une princesse de sang royal, tu es l'héritière du trône d'Atlana. Tu accompliras obligatoirement de grandes choses ! L'avenir nous dira, cependant, si ses choses seront admirables ou détestables.

- Avec la vision que j'ai eu, je doutes qu'elles soient admirables...Mes parents attendent tellement de ma part, le royaume et le peuple attendent tellement de ma part...Je doute de pouvoir leur donner ce qu'ils espèrent...Je doute de pouvoir un jour me comporter comme une reine, d'être comme ma mère et mon père.

- Personne ne te demande d'être comme eux ! Et pour ce qui est de leurs attentes c'est parce qu'ils ont une grande estime pour toi...

- Et si ils se trompaient ? La vison l'a montré, Professeur ! » j'insiste. « C'est inévitable !

- Je ne devrais pas dire ça mais... »

Il se tourne vers moi pour planter ses yeux dans les miens.

« Certaines choses n'arriveront pas...Certaines choses nous apparaissent pour nous terrifier, pour nous faire peur, pour nous faire perdre pied...L'important ce n'est pas ce que tu as vu, Nancy, mais ce que tu feras. Ne te base pas sur quelque chose d'irréaliste, mais sur des faits. Base toi sur ce que tu crois, fais le comme tu l'entends. Ne laisse pas un prétendu "au-delà" te faire douter de tes choix. Nancy, quoique tu fasses, fais le avec conviction. Mets y toutes tes forces si il le faut...Fait ce qui te semble juste, fait ce qui te ressemble. Tant que tu es sure, au plus profond de ton cœur, que tu rendras justice, cela mènera forcément à quelque chose d'admirable. Tu es une jeune fille intelligente, et tu sais ce que tu dois faire. Ne laisse pas quelqu'un te transformer en ce que tu n'es pas. Reste toi-même ! »

J'écoute chacune de ses paroles dans le plus grand soin, et je trouve son éloquence parfaite. Il a raison, en tout point. Je ne dois pas me faire rabaisser, je ne dois pas baisser les bras. Je dois...Tout simplement être moi, avec mes qualités et mes défauts...Je le regarde, les yeux embués. Je murmure un « Merci ! ». C'est un mot court mais qui en dit long pour moi, et il l'a compris. Merci de me supporter. Merci de me donner confiance en moi. Merci de croire en mes capacités. Merci de m'apporter des réponses.

« Bien entendu, tout ce que je t'ai dis là reste entre nous ! Déjà que je risque d'être envoyé aux Erèdïs pour ce que je t'ai dis là alors si en plus d'autres personnes l'apprennent... »

Je souris.

« Bien entendu... » je chuchote, la voix brisée.

Je me tourne pour contempler de nouveau le soleil levant. Il est d'une pureté magnifique et bouleversante. Dans mes rêves les plus fous, je m'approchais de se soleil brûlant, si près que je n'avais qu'à tendre la main pour le toucher.

Tout comme mon destin...Je peux le prendre en main, je dois le prendre en main, le saisir...

J'ai des doutes, mais je sais qui je suis. Je ne connais peut être pas ma véritable place au sein de mon peuple, je me demande de quoi je suis capable...J'ai des doutes sur ma vie, sur mon existence, sur ma place dans l'immense équation qu'est l'univers. J'ai des doutes sur la société dans laquelle je vis, sur son authenticité qu'elle assure. J'ai des doutes sur ma famille et sur ses réelles motivations. Mais malgré tout ça je sais qui je suis, et c'est le plus important. Je peux douter de tout, mais pas de mon âme, pas de moi !

 Je peux douter de tout, mais pas de mon âme, pas de moi !

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Don't Call Me AngelOù les histoires vivent. Découvrez maintenant