Chapitre 8

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Le silence.




C'était ce qui rendait ce moment si lourd. Un silence pesant, chargé de haine, de mots non dits, de violence contenue. Mon genou sur sa gorge, ses bras neutralisés par les miens, nos yeux qui ne se quittaient pas.  Une conversation se tenait dans ce silence.

Un brouillard s'était formé à l'arrière de ma tête. Une ribambelle de pensées, d'émotions inconnues, de mots qui ne voulaient rien dire  formait une cacophonie insoutenable dans mon crâne. Une pensée ressortait sur toutes les autres. Et elle m'assourdissait tant elle envahissait chaque recoin de mon esprit, provoquant une déferlante de raison dans mon corps.

Qu'étais-je en train de faire ?

Je pris peur. Peur de moi-même, de cet élan qui m'avait prise aux entrailles et qui avait failli avoir raison de moi. C'était comme un soufflé glacé qui anihilait les dernières braises de cette fureur violente, cette folie meurtrière qui s'était auparavant emparée de mon être.

Je reculais. Sans un mot, parlant seulement avec les yeux, je reculais. Il se releva, me regarda. Et dans un même mouvement. Nous nous écartâmes  l'un de l'autre, et partîmes chacun à une extrémité du couloir.

Je repris mes écouteurs, les enfonçai dans mes oreilles, attrapant ma playlist en plein milieu d'une musique : elle avait continué à jouer pendant tout ce temps.

Tout ce temps ? Non, il ne s'était écoulé que 4 minutes entre le moment où ils m'avaient aggripée et projetée contre ce mur et l'instant présent. Un temps si court. J'avais l'impression qu'il s'était écoulé des heures.

Une question de référentiel. La vie était une question de référentiel. Quand on croisait une personne dans la rue, elle nous paraissait parfaite. De notre point de vue, de notre référentiel. Mais du sien, elle ne l'était certainement pas. Elle se trouvait des complexes, des petits défauts, mais surtout elle se connaissait et elle savait quels secrets elle dissimulait, ce que nous observateurs extérieurs, ne faisant pas partie du référentiel intérieur à cette personne, nous ne voyions pas.

Des vibrations me parvinrent à travers le sol sur lequel j'étais assise. Quelqu'un arrivait. Je baissais la tête pour ne croiser le regard de personne. Chacun de mes muscles était contracté suite aux récents événements. La personne qui venait de débarquer avait-elle entendu le bruit de notre combat ? Avait-elle entendu les derniers mots prononcés par Alexandre ? Personne n'était au courant pour ma sœur dans l'enceinte du lycée, mes parents y avaient veillé. Cela aurait été mal vu si quiconque avait appris que le fils du proviseur et les deux soeurs Villaud avaient un passé commun bien plus torturé qu'il n'y paraissait.

J'étais attentive à chaque son qui me parvenait de l'être non identifié qui s'avançait dans le couloir. Le claquement de ses chaussures. Le frottement de son sac sur sa veste. Tous ces bruits se rapprochaient dangereusement de moi et je commençais à sentir la peur s'emparer de mes veines. C'était un venin froid qui se répandait dans toutes les zones irriguées de mon corps, depuis le centre de mon cerveau jusqu'à la plante de mes pieds. Une appréhension teintée d'effroi qui faisait retenir sa respiration à tout mon être et trembler mes mains.

Soudain, les pas s'arrêtèrent. Devant moi.

Un silence. De nouveau.

Je relevais légèrement les yeux. J'aperçus le bout de grosses bottes noires à lacets. Une seule personne portait de telles chaussures.

J'hésitais. Il n'y avait pas d'échappatoire possible. Je devais l'affronter. Je ne pouvais rien faire d'autre.

J'allais devoir faire face à ce regard sombre et perdre mes moyens. Mon coeur n'avait plus le courage de se battre.

Mes muscles se relachèrent. Un par un. La peur s'en fut dans les recoins de mon cerveau. Plus rien ne m'animait. J'avais perdu mon esprit combatif qui m'avait fait vivre ces 3 dernières années. Comme une vague qui retourne à la mer, la calme prit la place de la tempête, je n'étais plus qu'un grain de sable sur la plage du monde, qu'une infime partie d'un cercle trop grand pour moi.

Ce qui m'avait permis de tenir jusque là, de me relever, ou plutôt de faire croire que je m'étais relevée, avait disparu. Ma colère et mon désir de vengeance se cachaient dorénavant au fin fond de mon esprit derrière cette porte blindée que j'avais laissée ouverte jusqu'à lors. Mais sans eux, mes autres démons ressurgissaient. La tristesse.

Elle m'envahit comme un feu dévorant, une vague de pics acérés se plantant dans mon coeur et mes nerfs. Elle m'assaillit comme une armée de guerriers face à une pauvre jeune fille esseulée. Je n'avais plus d'armes pour me défendre. Je capitulai.

Alors je relevais la tête vers Malia. Les larmes dévalant mes joues comme les gouttes de pluie sur les feuilles des arbres, laissant une traînée humide qui coupait mon
visage comme le trait d'une lame aiguisée. Mon sang n'avait plus de couleur, il était mes larmes, le rouge de la colère n'y circulait plus.

J'avais lâché mes armes et je regardais mon ennemie, celle qui ne ferait que m'enfoncer un peu plus dans la mélasse des ténèbres et de la culpabilité. Elle m'achèverait avec ses mots, avec son regard, avec son être en fin de compte. Je le savais. J'y étais préparée. Elle allait me faire mal, plus mal que tout le reste du monde.

Oui j'y étais préparée. J'étais prête à tout en fait. Des insultes. Un sourire sadique. Des coups. Un simple rire. Un humiliation.

Je m'attendais à des choses plus horribles les unes que les autres de sa part,des choses que j'aurais méritées après tout ce que j'avais fait.

Mais je ne m'attendais pas à découvrir sur son visage un sourire de compassion.

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Je suis horrible non ?
Je sais que vous me détestez  parce que je fais genre je réponds aux questions que vous vous posez mais pas du tout.
Je rappelle également a ceux et celles qui n'ont pas voté dans le chapitre 7 qu'ils doivent IMPÉRATIVEMENT le faire.
C'est tout pour moi, j'espère que vous avez passé une bonne journée et je vous dis  à bientôt pour le chapitre 9 :)

Les Pleurs Du Mal Où les histoires vivent. Découvrez maintenant