Souvenirs

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« Oh my Creator, why ? Why did you not make me of steel and stone ? Why did you allow me to feel ? »

Cela faisait cinq jours que Crowley n'avait pas répondu au téléphone. Cinq jours entiers, sans qu'Aziraphale n'ait eu la moindre nouvelle du démon. L'ange avait appelé environ toutes les deux heures, laissé des messages vocaux à chaque fois, et avait envoyé plus d'une centaine de SMS. Mais rien à faire, il n'avait pas de réponse.
Pourtant, quand l'ange se concentrait, il parvenait à retrouver l'aura de Crowley, afin de savoir où il était. Et il était dans son appartement, depuis cinq jours. Mais s'il ne répondait pas à Aziraphale, peut-être était-ce qu'il n'avait pas envie de lui parler ? Ou peut-être qu'il dormait ?

Cela faisait près d'une année depuis la Non-Apocalypse. Aziraphale avait lu quelque part qu'à l'anniversaire du traumatisme, le syndrome de stress post-traumatique s'accentuait. Mais la Non-Apocalypse n'avait pas pu marquer Crowley à ce point, puisqu'ils avaient gagné, pas vrai ? Et il n'y avait rien d'autre qui était arrivé à cette date. Enfin, il y avait bien quelque chose, mais non, Aziraphale se refusait d'y penser. Tout sauf ça. Ce n'était pas ça, ce n'était pas possible.

Après avoir laissé une sixième journée passer – sans bouger, sans lire, juste à penser – Aziraphale se décida. Il attrapa son manteau, ferma la porte de la librairie et la verrouilla avec soin, et se matérialisa devant la porte d'entrée de l'appartement de Crowley.

Il n'y était jamais allé avant. La porte était entièrement noire, lisse et moderne – tout ce qu'Aziraphale détestait. Peut-être que Crowley l'évitait, tout simplement, pensa soudainement Aziraphale. Peut-être qu'il le détestait. Mais alors, comment expliquer tous ces dîners, tous ces sourires échangés...

Et ce baiser, quand, moins de deux semaines auparavant, lors d'une énième nuit alcoolisée, et que, dans une sombre rue de Soho, à peine éclairés par la lumière orange d'un lampadaire, ils s'étaient embrassés, tous les deux. D'abord, ils s'étaient tenus la main, puis Crowley avait posé la sienne sur la joue d'Aziraphale pour l'attirer à lui.
Depuis, plus rien. Plus de sourires, plus de dîners, plus de visites inopinées à la librairie, jusqu'à ce que Crowley ne donne plus de nouvelles du tout.

Hésitant, Aziraphale leva la main pour frapper contre la porte. Trois coups retentirent, avant qu'une voix ne s'élève :

- Partez ! Laissez-moi, tranquille, bordel de...

La porte s'ouvrit alors que Crowley parlait, et quand il vit Aziraphale, il s'interrompit :

- Oh. Aziraphale, mon ange, qu'est-ce que tu fais ici ?

La première chose qui marqua Aziraphale, c'était les yeux découverts de Crowley, qui le regardaient sans vraiment le voir, comme si un voile les recouvrait. Ensuite, il remarqua que Crowley était habillé de la même manière que lorsqu'ils s'étaient quittés pour la dernière fois, un costume entièrement noir. La seule différence était les lunettes manquantes et la chemise entrouverte.

- Ça fait deux semaines que l'on ne s'est pas vus, Crowley.

Quelque chose n'allait vraiment pas avec Crowley. Le démon fit entrer Aziraphale dans son appartement, ferma la porte derrière lui, et alors qu'Aziraphale découvrait l'appartement luxueux mais tellement moderne et vide de Crowley, celui-ci tendit vaguement le bras vers le canapé en marmonnant :

- Vas-y, vas-y, assieds-toi...

Aziraphale – qui resta debout - fronça les sourcils. Et finalement, ça le frappa de plein fouet.

- Crowley... Tu t'es drogué, pas vrai ?

Une grimace tordit le visage de Crowley. Mais il ne nia pas. Aziraphale soupira et s'approcha de lui. Crowley s'appuyait sur un meuble, juste à côté de la statue de l'aigle. Aziraphale ne sourit même pas en la voyant. Il était trop préoccupé par Crowley.

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