Welcome to the End Times

Remember ?

« I don't think I could ever forget  you. »

Aziraphale se souvenait bien, trop bien, de comment tout avait commencé. C'était après avoir retrouvé son corps quand son esprit avait finalement quitté le corps de Mme Tracy, après la Non-Apocalypse. Ça aurait presque pu être un jour comme les autres. Tout était habituel : Crowley et lui, assis sur un banc, à partager une bouteille d'un bon vin.

Puis Aziraphale avait émis à haute voix la réflexion qu'il devrait miraculer le bus pour qu'il aille jusqu'à sa librairie. D'un air concerné, Crowley s'était tourné vers lui et avait murmuré :

- Elle a brûlé, tu te souviens ?

Aziraphale avait froncé les sourcils, sceptique, puis la mémoire lui était revenue : oui, il se souvenait de Crowley, ivre, dans un bar, qui lui disait que la librairie avait entièrement brûlé. Aziraphale, sur le moment, ne s'était pas inquiété.

Il n'avait pas de quoi : il était déboussolé par son bref passage dans un corps étranger, rien de plus. Crowley non plus ne s'était pas inquiété, il avait simplement pensé qu'Aziraphale était fatigué, et qu'il avait bien le droit après une telle journée.

Puis l'échange de corps entre les deux amis se fit naturellement, puis ils se retrouvèrent et allèrent dîner, comme ils l'auraient fait en un soir normal. Ce soir-là, ils burent beaucoup, rirent, sourirent, souvent. Crowley sourit tout doucement quand il vit une rougeur s'étaler sur les joues d'Aziraphale après que le démon lui ait lancé un clin d'œil.

Puis ils étaient rentrés, Aziraphale, dans sa librairie, qu'Adam avait rendue tout à fait comme avant, avec quelques ajouts – certains livres à propos d'un détective qui était un pirate que l'ange était sûr de ne pas posséder auparavant – et Crowley l'avait suivi, comme si c'était la chose à faire.

Ils ne s'étaient pas quittés, depuis. On voyait des plantes déménager dans la librairie, et à l'étage, une chambre s'aménagea pour combler les envies de sommeil d'un certain démon. Crowley avait ramené la statue qui avait une vague forme d'aigle étendant ses aigles, celle qu'il avait gardé après qu'ils aient – miraculeusement – survécu à des bombes tombant sur une église.

Des traités d'astrologie prirent place sur les étagères d'Aziraphale, et, négligemment posés sur des meubles décoratifs, des maquettes de planètes et d'étoiles apparurent. Puis, encouragé par le fait qu'il ne s'y rendait plus, Crowley vendit son appartement, et sa Bentley trouva une jolie place sur un parking non loin de la librairie.

Tout allait bien. Qu'est-ce qui aurait pu dégénérer ? Qu'est-ce qui aurait pu mal se passer ?

Crowley commença à s'inquiéter sérieusement quand, alors qu'il montait les escaliers pour aller se coucher, Aziraphale l'interpella :

- Mon cher Crowley, où penses-tu aller ? Il n'y a rien là-haut, juste un grenier.

Crowley redescendit de quelques marches, pour tomber nez à nez avec Aziraphale, qui, un livre à la main, l'observait par-dessus ses lunettes de vue. Il scruta les yeux sincères et si bleus de l'ange et répondit :

- On y a aménagé une chambre, tu te souviens ?

Aziraphale fronça les sourcils et son nez se plissa alors qu'il se concentrait. Il finit par lâcher un sourire lumineux, effaçant toutes les rides de concentration de son visage, et dit :

- Oh, oui, c'est vrai. Bonne nuit !

Crowley lâcha la rampe de l'escalier pour plonger ses yeux dans ceux d'Aziraphale, qui soutint son regard avec une innocence débordante. Le démon resta ainsi durant quelques instants, avant de demander d'une voix très douce :