Une bonne résolution

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1er janvier 2000

- Louis, arrête de faire semblant de dormir et vient manger un morceau !

Le roux grogna légèrement et sortit le haut de sa tête du plaid qu'il utilisait pour se cacher les yeux de la lumière du jour qui entrait beaucoup trop violemment dans le salon où il avait dormi. Un kangourou était en train de faire de la boxe dans son crâne et il avait tout sauf envie de se lever. Mais Aurélie ne semblait pas l'entendre de cette oreille puisqu'elle le rejoignit sur le sofa et poussa ses jambes pour s'asseoir près de lui.

- Tu te sens mieux ?

- Non, grommela-t-il en remettant sa tête sous la couverture.

- Qu'est-ce qui c'est passé, Louis ? Quand je t'ai récupéré tu ne faisais que pleurer...

- Tu... Tu penses quoi des homosexuels, chuchota l'avocat.

Un petit rire lui parvint. Il ferma douloureusement les yeux. Il avait cru un instant entendre Sarah. Et il savait que quand il sortirait la tête, ce ne serait pas elle. Ce serait sa sœur, avec son petit carré auburn et ses grands yeux verts. Il serra la couverture entre ses poings en retenant les larmes qui menaçaient à nouveau de couler. Seul le bruit des tasses venait troubler le silence qu'avait provoqué sa question. Jusqu'à ce qu'une main fine se pose sur ses cheveux et les caresse doucement.

- Tu sais, cette couverture ne va pas te protéger contre le monde entier. Sors de là.

- Réponds-moi avant.

- Non. Je te répondrais les yeux dans les yeux, Louis.

Louis soupira et se redressa, gardant la couverture sur ses épaules pour ne pas avoir froid. Aurélie lui sourit et lui tendit un chocolat chaud.

- Je n'ai rien contre, Louis. Sarah non plus.

- Je sais qu'elle, elle n'avait rien contre. Elle était parfaite et elle aimait tout le monde de toute façon, répondit-il en serrant la tasse entre ses mains.

- C'est une des premières fois que je t'entends parler d'elle depuis...

- Elle me manque. C'est horrible. J'aimerais qu'elle soit là. J'aimerais qu'elle m'aide à comprendre ce qui se passe dans ma tête. Et en même temps... Si elle était encore là ça ne serait pas arrivé.

- Qu'est-ce qu'il t'arrive, Louis ?

Le roux inspira profondément et ferma les yeux. C'était le moment. Il allait ouvrir les vannes de son cœur et il ne savait pas ce que ça allait donner. Il ne l'avait jamais fait, jamais autant. Il but une gorgée de sa boisson chaude, comme pour gagner un peu de temps. Puis il se lança.

- J'aime les hommes et les femmes, je m'en suis rendu compte parce que je suis tombé amoureux de Éric. Je crois qu'il m'aime aussi. Depuis très longtemps. Mais qu'il ne me l'a jamais avoué parce que... après ce qui c'est passé au lycée, on s'est éloigné. Et puis je me suis marié avec Sarah, j'ai eu un fils... Comme tout le monde. Il a dû penser que j'étais comme tout le monde, que je ne l'aimerais jamais. Mais c'est faux. Depuis qu'elle n'est plus là, il... il est le seul à me faire ressentir les mêmes choses qu'elle. Je l'aime tout autant.

- Où est le problème alors, le coupa sa belle-sœur en buvant son café.

- Aaron, déjà. Comment lui expliquer que son père aime quelqu'un d'autre que sa maman mais ce n'est pas pour autant qu'il n'a pas aimé sa mère ? Et comment lui expliquer que ce quelqu'un d'autre est un homme ? Et puis... Il y aussi nos parents. S'il n'accepte pas cette relation, il pourrait me le retirer. Ce serait tellement facile, une simple action en justice et...

- Ne sois pas idiot, Louis. Tu te mets la rate en court-bouillon pour rien. Fonce, parles-en à Éric ! Vous allez pas rester comme deux pauvres cons à vous regarder en chien de faïence pour le restant de vos jours !

- C'est trop tard, souffla le roux en baissant la tête pour cacher les larmes qui commençaient à couler, hier soir, j'étais avec lui et il... il a embrassé un mec qui lui tourne autour depuis pas mal de temps. Il...il était... dans ses bras et...

- Tu n'as pas à te plaindre.

Louis serra les dents. Il savait qu'elle avait raison, il n'était pas à plaindre. Il avait lui-même créé cette situation avec son silence et ses hésitations. Éric l'avait vu se marier, l'avait vu heureux avec une autre, sans jamais rien montrer. Et lui, au moindre baiser, il s'effondrait en pleurant que son cœur était brisé ? Vraiment, il était un égoïste. Il se demandait bien ce qu'il pouvait lui trouver...

- Je sais. Je ne sais pas pourquoi je suis comme ça. Je devrais être heureux pour lui. Mais je ne le veux que pour moi. Je me fais peur moi-même.

- Espèce de gros sensible, se moqua Aurélie en lui donnant son épaule, il ne sort pas avec lui donc rien n'est perdu. Franchement, tu te fais des films pour rien...

- Oui... Tu as raison, je suis parti avant de voir quoi que ce soit d'autre. Ils ont juste dû... coucher à nouveau ensemble.

- Je préfère te voir comme ça ! Maintenant, tu vas arrêter d'hésiter et tu vas lui parler. Disons que c'est ta résolution de l'an 2000.

- Merci, Aurélie...

La jeune femme lui sourit et lui tendit un mouchoir pour qu'il sèche ses larmes. Il la remercia et effaça les traces de sa tristesse sur ses joues. Aurélie avait raison. Il devait arrêté d'hésiter et parler avec Éric. C'était le seul moyen de tout arranger. Lui confier ses sentiments et ses peurs, en discuter avec lui, trouver une solution ensemble.

Oui. C'était sa résolution pour l'an 2000. Il allait ouvrir son cœur à Éric.

~~~

Éric se servait tranquillement au bol de lait avec des céréales pour enfants quand il sentit deux bras l'enlacer. Son cœur se serra. Il savait que ce n'était pas Louis mais il n'avait pas pu s'empêcher de s'imaginer pendant quelques secondes que c'était lui. Et ça faisait mal...

- Tu manges ça ? C'est bourré de sucre, le réprimanda Yves en glissant la tête dans son cou.

- Mais j'aime bien le sucre, moi...

Il avala une cuillère en mettant la machine à café en route. Il repensa à Louis, qu'il avait vu partir si précipitamment hier soir. Il ne savait même pas s'il était rentré chez lui. Dans son état ça n'aurait pas été raisonnable. D'autant plus que Claire lui avait dit qu'il ne se sentait pas très bien. Mais il avait été trop long à apprendre que son ami était réellement parti et trop long à réagir... Un souffle contre son oreille le sortit de ses pensées :

- Dis, Éric... cette nuit, c'était encore seulement pour t'amuser ?

L'asiatique se figea. Seulement pour s'amuser... Son collègue n'avait pas tort, il s'amusait à coucher avec différents hommes sans jamais garder de relations sérieuses. Parce qu'il y avait Louis et qu'il était amoureux de lui. Mais il fallait qu'il soit lucide, son meilleur ami ne lui rendrait jamais ses sentiments. Il inspira profondément. Il devait arrêter d'espérer, ça faisait plus de dix ans qu'il souffrait en silence.

Il commençait une nouvelle année. Un nouveau siècle. Alors il allait changer. Et faire le choix d'essayer d'être heureux.

- Non, c'était pas pour m'amuser. 



HEEEEEEEEEEEEEEEEEEEYYYYYYYYYYYY ! 

Désolée pour le léger retard de chapitre, je pense que la fin de la semaine a été un peu chamboulée pour tout le monde en France ^^" Enfin, il faut voir le côté positif, je vais avoir plein de temps pour vous écrire des histoires ! 

J'espère que ce chapitre vous a plu en tout cas !

Portez-vous bien, les amis ! Et à la semaine prochaine ! 

Un Bouquet de RosesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant