Il était deux fois [MxM]

9 - Le roi, la princesse et l'appel

— La veille, à Paris —

     Il était deux fois, un adulte qui partageait sa vie avec son compagnon depuis bien longtemps. Depuis presque trente ans, à vrai dire. Et il s'en était passé, des choses, pendant trente ans. Mais rien qu'ils ne regrettaient. Le premier s'appelait Julian Leroy. À maintenant quarante-sept ans, une crise de la trentaine passée et de nombreux déménagements, ils étaient maintenant installés dans un grand appartement, quelque part dans le quatorzième arrondissement de Paris.

     Julian Leroy avait de nombreuses fois déçu ses parents durant les dernières décennies. L'une des première fois avait été quand il s'était orienté vers le métier de masseur-kinésithérapeute, et la dernière lorsqu'il avait fait son coming out en plein repas de famille. Il avait finit par ouvrir son propre cabinet dont il était très fier, et selon Raphaël Lelièvre, son compagnon (et époux officiel depuis 2013), il avait été temps qu'il s'affirme.

     Raphaël Lelièvre, quant à lui, décorait chaque semaine le cabinet avec des compositions florales provenant tout droit de sa boutique de fleurs. Leur aventure n'avait pas été simple ni de tout repos, mais cela faisait tant de temps qu'ils étaient ensemble que les épreuves qu'ils avaient surmonté ne leur faisait plus vraiment peur. Et de toute façon, Julian avait été très clair sur ce point ; plus jamais il ne voulait avoir affaire à des Némésis, ou autre. Il avait fait une ultime exception pour Maltus. Ce dernier menait une vie de rêve dans un réseau de cage que Raphaël avait aménagé spécialement pour lui.

     Il était environ une heure du matin lorsque Raphaël Lelièvre se réveilla en sursaut, faisant grogner Julian dans son sommeil. Il se retint de justesse d'hurler tant le poids qui compressait sa poitrine était lourd. D'une main tremblante, il ôta doucement le bras de Julian qui reposait sur son ventre, et il fut prit d'un violent haut-le-cœur.

     « Merde. »

     Il se jeta hors du lit et ouvrit la porte de la salle de bain beaucoup trop vite, la faisant cogner contre le mur. Il eut à peine le temps d'arriver aux toilettes qu'il eut un violent haut-le-cœur et qu'il régurgita un liquide noir comme de l'encre, inondant la cuvette. Il cracha plusieurs fois, attendit que la deuxième vague arrive et sa vue se brouilla un instant. Il eut un désagréable acouphène dans les oreilles et il entendit Julian arriver en trombe dans la salle de bain. Il resta d'abord sans voix devant ce tableau ; Raphaël avachit par terre, le corps tremblant et se tenant au rebord de la lunette des toilettes, du liquide noir gouttant sur le sol.

« Merde Raphaël, c'est quoi ça ?!

     Julian se précipita vers lui pour dégager les cheveux de son visage. Ses joues étaient maculées de liquide noir, le même qui sortait de ses oreilles et de ses narines.

— Bordel de merde, Raphaël !

— C'est rien, c'est rien, marmonna-t-il en attrapant son bras et en y laissant une trace noire au passage.

— Mais comment ça ne peut être rien ?! Merde, mais c'est quoi ça ?!

— Je...

     Alors que Raphaël s'apprêtait à lui répondre, deux choses se produirent. La première, c'est qu'aucun des deux adultes ne put s'empêcher d'entendre les pleurs qui venait du babyphone posé sur la table de nuit de Raphaël, et que son téléphone se mit à vibrer.

     Raphaël gémit de douleur.

— Désolé... Est-ce que tu peux m'apporter mon téléphone avant d'aller porter secours à notre princesse ?

     Julian soupira. Il déposa un baiser sur le front de Raphaël, seul endroit qui n'était pas recouvert de liquide noir et il repartit chercher son téléphone.